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Qigong et méditation en oncologie intégrée

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2 juin 2007
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Nous avons déjà parlé de médecine intégrée. Incluant ce qui fut dit de celle-ci, l’oncologie intégrée combine la chirurgie, la chimiothérapie et la radiothérapie avec des modalités des médecines alternatives et complémentaires (MAC) qui répondent aux exigences de sécurité et d’efficacité telles que définies par des données scientifiques probantes. Le qigong et la méditation comptent parmi ces MAC qui se taillent peu à peu une place comme alliées dans le combat contre le cancer. Nous en faisons le sujet de cet article.

Bien que le qigong fasse partie de la médecine traditionnelle chinoise (MTC), ce n’est pas à elle que nous devons vraiment son introduction comme complément au traitement du cancer tant en Chine qu’en Amérique du Nord. D’après le Dr Raymond Chang, formé à la fois en MTC et en médecine conventionnelle, la MTC n’aurait d’ailleurs jamais eu de succès avec le traitement de cette maladie comme telle. Laissez-moi vous conter l’anecdote  qui, à mon sens, est à la source de la popularité du qigong en oncologie.

Une anecdote chinoise
Nous remontons à la Chine de 1949 alors que madame Guo Lin (voir illustration), une artiste de 43 ans, est diagnostiquée d’un cancer de l’utérus. Elle subit alors une hystérectomie et tout se passe bien jusqu’en 1960 où une métastase oblige à une résection partielle de la vessie. Elle connaît ensuite d’autres récidives qui amenèrent ses médecins à émettre un pronostic fatal.

N’ayant rien à perdre, elle sort des vieux livres de qigong légués par son grand-père, un médecin chinois traditionnel. Après deux heures de pratique quotidienne pendant six mois, ses lésions sont totalement disparues. Cédant à la pression des proches et des voisins, elle commence à transmettre sa méthode en secret. Au début des années ’70, en Chine, la Révolution Culturelle (1966-1976) battait son plein et elle craignait des représailles, ce genre d’enseignement étant proscrit à l’époque.

Sa renommée se répandit vite. Si bien que, de 1982 à 1984, elle fit une tournée dans toute la Chine afin d’établir des clubs de rétablissement du cancer. Des articles parurent dans des journaux chinois relatant les réalisations de ces centres. Madame Guo Lin mourut en 1984 à l’âge de 78 ans d’un accident cérébro-vasculaire.

Bien entendu, la médecine chinoise « fit du pouce » sur ce mouvement. Diverses formes de qigong sont pratiquées dans les hôpitaux en Chine pour aider à diminuer les effets secondaires du traitement du cancer. Cette vague a ensuite atteint des grands centres américains de traitement du cancer vers la moitié des années ’90, devançant les sacro-saintes données probantes.

Le qigong aurait réduit le stress chez 78% de 334 patients et aurait accru leur bien-être dans 74% des cas selon des statistiques d’un programme de support au traitement du cancer du Stanford Center for Integrative Medicine. Au Québec, la Maison Accueil-Sérénité, avec le support initial du Centre de santé de Bellechasse puis celui du Centre de santé et de services de Beauce, a fait œuvre de pionnière en s’inscrivant dans ce mouvement dès 2001. Peu de temps après, l’Organisation québécoise des personnes atteintes de cancer puis la Fondation québécoise du cancer lui emboîtaient le pas.

Actuellement, des collaborations, tant aux États-Unis qu’au Canada, sont mises en place avec la Chine pour établir des bases scientifiques à cette approche. Quelques résultats préliminaires sont encourageants.

Les cas du Dr Ainslie Meares
Les bienfaits de la méditation pour les patients atteints de cancer ont commencé à être notés dans des revues médicales depuis au moins une trentaine d’années. Un pionnier dans ce domaine fut le docteur Ainslie Meares, psychiatre et hypnothérapeute australien réputé qui vécut de 1910 à 1986. Au cours de sa pratique, il a initialement développé un intérêt pour le traitement de la composante psychologique de la douleur.

Au fil du temps, il s'investit également dans une recherche sur les mécanismes biologiques de la douleur. Sa quête peu orthodoxe du savoir l’amena à voyager sur le continent asiatique afin de documenter la capacité des mystiques orientaux à influencer leurs perceptions par le pouvoir de leur esprit.

Un de ses voyages le mena au Népal où il rencontra un sage vieil homme réputé être âgé de 134 ans. Il lui enseigna une technique de méditation trompeusement simple que le Dr Meares appliqua dans son approche du traitement de la douleur, entre autre chez les personnes atteintes de cancer.

En 1980, il relate les conclusions de ses observations faites tout au long de sa carrière dans une revue médicale australienne dont voici un résumé : Chez 73 patients en phase terminale, après 20 sessions de méditation intensive, il y a une réduction significative de l’anxiété et de la dépression, de l’inconfort  et de la douleur chez presque tous les patients. Dans 10% des cas, un ralentissement remarquable de la croissance de la tumeur, dans 10%, un ralentissement moindre mais significatif, dans 10%,  une régression, dans 50%, une amélioration importante de la qualité de vie et dans 90%, une mort dans la dignité.*

Cependant, une accumulation d’anecdotes ne constitue pas une évidence suffisante pour une médecine fondée sur des preuves. Madame Linda Carlson, de l’Université de Calgary, adopta une approche plus rigoureuse face à ce genre de pratique, plus spécifiquement en regard de la méditation de pleine conscience (MBSR). Les données préliminaires, démontrant une amélioration de nombreux aspects de la qualité de vie, demandent à être validées par de plus vastes études mais le potentiel est là. Les implications cliniques de ce mode d’intervention sont pertinentes et une rationnelle quant à son utilisation chez la population cancéreuse fut développée.

* Référence : Meares A, Aust Fam Physician, 1980, May;9(5):322-5
“The results of treatment of 73 patients with advanced cancer who have been able to attend at least 20 sessions of intensive meditation, indicates that nearly all such patients should expect significant reduction of anxiety and depression, together with much less discomfort and pain. There is reason to expect a ten per cent chance of quite remarkable slowing of the rate of growth of the tumour, and a ten per cent chance of less marked but still significant slowing. The results indicate that patients with advanced cancer have a ten per cent chance of regression of the growth. There is a fifty per cent chance of greatly improved quality of life and for those who die, a ninety per cent chance of death with dignity.”

 

Informations complémentaires :

Qigong et cancer, voir sections « Observations » et « Anecdotes ».

The Carlson Lab , voir section « Publications » pour des articles scientifiques concernant la méditation et le cancer.


Claude Fournier, MD.
Courriel : [email protected]

Claude Fournier est clinicien au Centre de santé et de services sociaux de Beauce où il enseigne le qigong et le taijiquan. Un partenariat avec la Fondation du cœur Louis-Georges Fortin et Accueil-Sérénité lui permet de transmettre ces enseignements à des personnes respectivement atteintes de maladies cardiaques et pulmonaires et de cancer.

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