De nouvelles recherches pour lutter contre le parasite des huîtres


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Par La Presse Canadienne, 2024
Les scientifiques poursuivent une nouvelle piste de recherche pour prédire le moment et le lieu des infestations parasitaires qui déciment les huîtres de la côte atlantique.
Ces travaux s'inscrivent dans le cadre des plus récents travaux visant à étudier la sphère multinucléée inconnue, un parasite communément appelé MSX.
La nouvelle recherche examinerait le matériel génétique, ou ADN environnemental, laissé par le parasite et tout autre hôte intermédiaire. Les scientifiques pensent que cela pourrait les aider à mieux comprendre le comportement du MSX dans l'eau et ses déplacements.
«Cela nous apportera beaucoup plus d'informations sur le parasite, ses activités et sa durée de vie», a expliqué Rod Beresford, professeur agrégé au département de biologie de l'Université du Cap-Breton.
Le professeur Beresford fait partie d'un groupe de scientifiques de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard qui ont obtenu 800 000 $ de diverses sources, dont Génome Atlantique, Génome Canada et les gouvernements provinciaux, pour une période de deux ans, à compter de cet été, afin d'étudier le MSX à l'aide de l'ADN environnemental.
Bien que leurs recherches soient probablement loin d'être appliquées concrètement, les scientifiques affirment qu'elles pourraient faciliter la protection des huîtres contre les épidémies mortelles qui ont laissé les éleveurs dans l'embarras.
Le parasite unicellulaire MSX fait des ravages chez les huîtres depuis une soixantaine d'années. Il a été découvert pour la première fois dans la baie du Delaware, près du New Jersey, en 1957, puis dans le lac Bras d'Or, en Nouvelle-Écosse, en 2002. Il a depuis été détecté à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick et dans le sud de la Colombie-Britannique.
Le parasite cible les huîtres d'élevage et sauvages et tue environ 95 % des mollusques infectés dans les deux à trois ans suivant l'infection, les empêchant d'atteindre leur taille maximale. Cependant, il ne présente aucun risque pour la santé humaine ni pour la sécurité alimentaire.
Dans la plupart des cas, l'industrie de la pêche observe souvent le parasite après que les huîtres ont commencé à mourir, a expliqué le professeur Beresford.
Mais les scientifiques affirment que cette nouvelle recherche pourrait permettre d'obtenir des alertes plus précoces en cas d'épidémies potentielles. En approfondissant leurs connaissances sur l'ADN environnemental du parasite, les scientifiques pensent pouvoir résoudre un mystère concernant son cycle biologique, a expliqué Ryan Carnegie, pathologiste des mollusques et crustacés au Virginia Institute of Marine Science.
«C'est la principale application pour résoudre ce mystère du cycle biologique», a-t-il dit.
L'ADN environnemental peut être détecté dans un échantillon environnemental comme l'eau de mer, a expliqué Carnegie. Mais il est impossible de le détecter dans des organismes individuels comme les mollusques et crustacés.
L'utilisation généralisée de l'ADN environnemental a commencé au début des années 2000 et un article paru dans la revue Bioscience en 2021 indiquait que cet outil se généralisait car il nécessite de très petites quantités d'échantillons génétiques, est fiable et non invasif.
Beresford a déclaré que les scientifiques pourraient utiliser l'ADN environnemental pour identifier les hôtes intermédiaires du MSX avant qu'il n'infecte les huîtres. Ces hôtes intermédiaires pourraient être de minuscules planctons, des escargots, des vers, des poissons ou d'autres organismes vivant sur les fonds marins.
Bien qu'il ait affirmé qu'il serait probablement impossible d'éliminer ces hôtes intermédiaires, il a expliqué que les scientifiques pourraient être en mesure de recueillir des informations à leur sujet afin de prédire le moment où une épidémie pourrait survenir ou d'évaluer si des huîtres sont résistantes au parasite.
«Nous ne savons pas s'il faut beaucoup de particules MSX pour qu'une infection se produise, ou si cela n'en prend qu'une petite quantité», a ajouté M. Beresford.
Cette recherche pourrait être particulièrement bien accueillie par les ostréiculteurs d'une industrie qui pèse des millions de dollars. Globalement, les données de Statistique Canada de 2023 indiquent que l'industrie ostréicole était évaluée à 17,8 millions $ à l'Île-du-Prince-Édouard, 3,7 millions $ en Nouvelle-Écosse, 25,9 millions $ au Nouveau-Brunswick et 16 millions $ en Colombie-Britannique.
Bien que le parasite menace de réduire à néant une partie de cette valeur, cette nouvelle recherche pourrait être une bouée de sauvetage pour certains ostréiculteurs.
Bob MacLeod, président de la P.E.I. Shellfish Association, a expliqué espérer que la recherche sera fructueuse. «S'ils découvrent un jour l'hôte intermédiaire ou un moyen de le contourner (…) ce serait un réel avantage pour nous. Car, à l'heure actuelle, tant d'années après l'apparition du virus aux États-Unis, ils n'ont toujours pas trouvé la solution.»
La Presse Canadienne