Des progrès pour attirer des étudiants noirs dans les programmes de médecine


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — La proportion de médecins noirs est faible en comparaison avec la représentativité de cette communauté dans la population. Même s'il existe encore des défis pour recruter des étudiants noirs en médecine, on commence à voir des changements positifs.
Par exemple, l'Université de Montréal a mis en branle il y a quelques années un programme pour mettre de l'avant la diversité dans le milieu médical. En 2022, l'université lançait son Plan d’action pour favoriser l’accès des communautés noires aux professions de la santé.
Cela comprenait des actions spécifiques déclinées en plusieurs axes, notamment: développer des contenus de cours intégrant des réalités vécues par les personnes noires; intégrer des professionnels des communautés noires dans les comités d’admission et les entrevues d'entrée aux programmes; et élaborer un programme d’accès visant à améliorer la représentativité des étudiants noirs.
«On est parti du constat qu'effectivement, il y a une représentativité faible par rapport à ce qu'on a dans la population. Au Canada, il y a à peu près 4,7 % de la population qui est noire, et au Québec, c'est autour de 6 %. Mais quand on regarde historiquement les chiffres en médecine, on était à peu près à trois étudiants pour des cohortes de 300 ou 350, donc moins de 1 %», explique Prévost Jantchou, professeur agrégé de clinique à la faculté de médecine, dans le département de pédiatrie de l'Université de Montréal.
L'un des changements apportés par le programme qui promeut la diversité est que les étudiants peuvent faire une autodéclaration qui va leur permettre de faire valoir «des dimensions qui ne sont pas uniquement les performances scolaires».
«Ça permet, cette autodéclaration, de valoriser les candidatures des étudiants noirs et puis démontrer la valeur ajoutée de leur présence au sein de la communauté étudiante, indique Dr Jantchou. La sélection des programmes contingentés fait en sorte que quand les candidats sont nombreux, il y a très peu de places. Souvent, on va avoir par exemple 3000 candidats et il n'y a que 300 places. Le fait d'avoir cette autodéclaration permet aux étudiants noirs qui seraient passés dans une maille des filets de pouvoir au moins être convoqués à l'entretien, qui est une étape supplémentaire au-delà des notes.»
Dès le lancement du programme, le nombre d'étudiants noirs en médecine a augmenté, a pu constater le professeur Jantchou. «Les chiffres ne sont pas encore finalisés, dit-il, mais on a quelque chose qui a augmenté de façon significative. Je dirais au moins le double, voire le triple d'étudiants par rapport à ce qu'on avait.»
Il a par ailleurs bon espoir que la relève réussira à se départir des biais qui existent et persistent grâce à la façon dont les cours sont donnés, avec l'accent qui est mis sur l'inclusion. «Parce que le racisme systémique, c'est vraiment des choses qu'on veut éviter que les nouvelles générations de médecins puissent perpétuer, souligne Dr Jantchou.
«On a beaucoup parlé du racisme systémique, où parfois on peut être moins tolérant envers des candidats noirs par rapport à ces biais, alors que les résidents ou les médecins noirs ont les mêmes compétences, les mêmes aptitudes, poursuit-il. Il y a vraiment un changement de culture qui fait en sorte que l'hôpital, ça doit être le reflet de la société. Et d'avoir cette diversité dans l'institution permet aussi qu'il y ait un dialogue assez transparent.»
Inspirer la jeunesse
Augmenter les effectifs médicaux issus des communautés noires a aussi des répercussions positives pour des patients. Dr Jantchou estime que la stigmatisation est moindre. «Ça change beaucoup de choses. Déjà, le patient se sent en confiance», dit-il.
De plus, il existe des maladies qui peuvent parfois être mal comprises, notamment en ce qui concerne les maladies spécifiques à la population noire. Dr Jantchou a parlé entre autres d'anémie falciforme et du don de cellules souches, dont les besoins sont importants par rapport au nombre de donneurs noirs.
D'autre part, le Dr Jantchou est aussi le fondateur de la Fondation Inspire qu'il a mise sur pied il y a cinq ans. Chaque année, un camp d'entraînement (bootcamp) est organisé, réunissant plus de 200 jeunes majoritairement issus de la diversité.
Durant le camp, on informe les jeunes sur la panoplie de métiers qui existent dans le domaine de la santé. «C'est un objectif fondamental puisque beaucoup de familles immigrantes n'ont pas une grande connaissance du système, des fonctionnements, des différents parcours, des métiers. Il y a des métiers que beaucoup ne connaissent pas, par exemple technologues de laboratoire ou inhalothérapeute», soutient Dr Jantchou.
Plusieurs professionnels de la santé vont participer aux activités du camp pour inspirer les jeunes, qui vont aussi recevoir des outils pour réussir, notamment des stratégies pour les études, les révisions, pour passer une entrevue.
Le camp d'entraînement de cette année a lieu les 12 et 13 juillet.
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Katrine Desautels, La Presse Canadienne