Discours du Trône à Ottawa: le roi Charles dans les traces de sa mère


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Le roi Charles est sur le point d’ouvrir une nouvelle session du Parlement, mardi à Ottawa, assis dans un trône qui incorpore un morceau de noyer commun provenant du Grand parc de Windsor, en Angleterre, une zone de conservation depuis le règne de sa mère, la défunte reine Elizabeth II.
Le lien avec la famille royale est particulièrement approprié étant donné que la reine a été la première souveraine à prononcer un discours du Trône au Canada, rôle habituellement assumé par le gouverneur général.
Lorsque la reine est venue à Ottawa en 1957, elle a non seulement ouvert la première session de la 23e législature, mais elle a aussi prononcé son premier discours télévisé, un discours personnel aux Canadiens depuis Rideau Hall.
Des centaines de journalistes de La Presse Canadienne et d’autres médias ont suivi chaque geste de la Reine et de son époux, le prince Philip, lors de leur visite durant la fin de semaine de l’Action de grâce.
Cette visite royale avait fait la une des journaux, éclipsant le prix Nobel de la paix de Lester B. Pearson, alors ministre des Affaires extérieures, pour son implication dans le dénouement de la crise de Suez en 1956. Ce dernier, devenu plus tard premier ministre du Canada, est considéré comme le «père» des Casques bleus de l’Organisation des Nations unies (ONU), selon le site de référence Perspective Monde de l'Université de Sherbrooke. La visite de la reine Elizabeth II avait aussi éclipsé les conseils sur comment repérer dans le ciel le satellite soviétique Sputnik, récemment lancé, alors qu’il traversait le ciel nocturne.
La Reine avait livré son premier message de Noël télévisé en 1957, une tradition royale des Fêtes qui impliquait à l'époque de se rassembler autour de la radio.
Elle avait eu l’occasion de s’habituer à la caméra et au télésouffleur, qui était alors une technologie nouvelle, lorsque Elizabeth II s’est assise à un bureau pour parler aux Canadiens en anglais et en français le dimanche 13 octobre 1957. On pouvait alors y apercevoir des photos de son époux, le prince Philip, de son fils Charles, qui allait avoir neuf ans, et de sa fille Anne, âgée de sept ans.
La Reine s'était adressée aux jeunes du Canada dans son allocution.
«C’est un pays merveilleux et exaltant qui mérite votre meilleur service quand vous grandirez», avait-elle déclaré. «Nous espérons qu’un jour, nous pourrons amener nos enfants ici pour le voir», avait-elle affirmé, 68 ans avant que son fils Charles lui succède dans une visite au Canada à titre de Roi.
Le lendemain, des milliers de personnes s'étaient rassemblées dans les rues d’Ottawa sous un ciel bleu pour voir le couple royal se rendre au Parlement à bord d’un carrosse ouvert tiré par quatre chevaux noirs.
Ils se sont rendus au Sénat, où la reine a lu le discours du Trône résumant les objectifs du gouvernement progressiste-conservateur de John Diefenbaker.
La reine avait rappelé sa prédécesseur, Elizabeth I, en s’adressant chaleureusement aux députés.
«Maintenant, ici dans le Nouveau Monde, je vous dis qu’il est de mon souhait que, dans les années à venir, je puisse régner ainsi au Canada et que cela soit aussi mémorable.»
Elle régnera en tant que reine du Canada pendant encore six décennies.
La reine Elizabeth est revenue au Canada pour prononcer le discours du Trône 20 ans plus tard, le 18 octobre 1977, lors d’une tournée marquant son jubilé d’argent.
Les rituels de deux décennies auparavant se sont à nouveau déroulés dans les rues de la capitale.
Cette fois, la reine et le prince étaient protégés du froid par de grandes robes de buffle alors que le landau royal se rendait sur la colline du Parlement.
«Des garçons sur des bicyclettes pédalaient à côté du carrosse royal jusqu’à ce que la police les arrête», rapportait alors La Presse Canadienne.
Le couple royal avait été accueilli par Pierre Trudeau, premier ministre à l’époque, qui portait une rose rouge épinglée sur son manteau, un style qu'il a souvent arboré.
À l’intérieur de la salle du Sénat, un silence s’est imposé parmi les parlementaires et les juges de la Cour suprême vêtus de rouge alors que la reine a enfilé une paire de lunettes à demi-lune — c’était la première fois qu’elle portait des lunettes en public — et a commencé à lire le discours du Trône, avait écrit le service de presse.
Le discours s’était attardé sur des thèmes qui semblent familiers encore aujourd’hui.
«Compte tenu des nouvelles réalités économiques auxquelles le Canada doit s’adapter et de l’urgence qu’il y a à promouvoir l’harmonie linguistique et culturelle, il est évident que le Canada entre maintenant dans une nouvelle ère», avait déclaré la reine en français.
Le gouvernement libéral de l’époque avait utilisé ce discours pour assurer les Canadiens de son profond engagement à redécouvrir «l’esprit d’unité».
La Reine avait conclu en déclarant qu’elle aussi s’était consacrée à nouveau au peuple et à la nation, dont elle était «très fière de servir».
Jim Bronskill, La Presse Canadienne