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Inquiets, des Canadiens de la diaspora birmane annulent leur voyage aux États-Unis

durée 16h37
6 juin 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

TORONTO — Hla Wynn attendait avec impatience son voyage annuel à New York cet été, impatient de passer du temps avec sa famille et d'aider son frère à se remettre d'une opération. Mais ce professeur d'université à la retraite a déclaré que ses projets de longue date étaient suspendus jusqu'à nouvel ordre, le président américain Donald Trump ayant annoncé une interdiction de voyager pour les résidents de plus d'une douzaine de pays, dont son pays natal, le Myanmar.

«Nous avons fait des allers-retours : certaines années, ils viennent nous rendre visite, parfois nous allons leur rendre visite, pour un voyage pendant l'été, passer une semaine ou deux avec eux, a raconté l'homme de 73 ans à propos de ses voyages estivaux. Mais à cause de cette nouvelle situation, je ne suis pas à l'aise pour leur rendre visite.»

M. Trump a annoncé mercredi que les citoyens de 12 pays — le Myanmar (Birmanie), l'Afghanistan, le Tchad, la République du Congo, la Guinée équatoriale, l'Érythrée, Haïti, l'Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan et le Yémen — se verraient interdire l'entrée aux États-Unis.

Sept autres pays — le Burundi, Cuba, le Laos, la Sierra Leone, le Togo, le Turkménistan et le Venezuela — sont soumis à des restrictions de voyage renforcées. Certains des 12 pays figurant sur la liste des pays interdits ont été visés par une mesure similaire promulguée par Donald Trump lors de son premier mandat.

M. Wynn, qui vit maintenant à Toronto, a conservé des liens étroits avec son pays d'origine et s'inquiète des conséquences plus larges de l'interdiction de l'administration Trump, qui doit entrer en vigueur lundi.

Il a indiqué avoir aidé en ligne des étudiants universitaires birmans après qu'ils ont perdu l'accès à l'éducation à la suite du coup d'État militaire de 2021, et il craint maintenant que l'interdiction ne complique la tâche de ceux qui souhaitent poursuivre leurs études.

«Tout a été fermé, ou même s'ils sont ouverts, ils sont sous régime militaire, ce qui constitue un système éducatif très médiocre, a-t-il dit. J'étais tellement triste pour ces personnes, car beaucoup tentent d'entrer aux États-Unis et au Canada (…) et maintenant, de nombreux étudiants sont bloqués pour obtenir un visa.»

Une décision «cruelle»

Le président d'une association représentant la communauté birmane en Ontario a déclaré que la nouvelle interdiction de voyager était «cruelle» envers la population de son pays. Napas Thein, président de l'Association birmano-canadienne de l'Ontario, a souligné que le peuple birman est déjà confronté à des difficultés dans son propre pays en raison du coup d'État et d'une nouvelle loi rendant le service militaire obligatoire. Cette interdiction rendra plus difficile l'accès à un lieu plus sûr.

«Cela a vraiment mis à rude épreuve les personnes que je connais au Canada, a-t-il déclaré. Je connais un étudiant, censé être un futur doctorant, qui devait intégrer une université aux États-Unis, mais dont le parcours là-bas pourrait être complètement interrompu parce qu'il est un ressortissant birman.»

M. Thein a expliqué que lui et ses compatriotes canadiens de la diaspora birmane se sentent mal à l'aise à l'idée de traverser la frontière canado-américaine, et que certains ont déjà commencé à annuler leurs projets de participation à des conférences ou de visite à leur famille.

«Nous ne savons vraiment pas, et même si, techniquement, les personnes nées (au Myanmar) mais qui sont citoyens canadiens devraient pouvoir y aller, nous n'en sommes vraiment pas sûrs», a-t-il ajouté.

M. Thein a souligné que la nouvelle interdiction de voyager aux États-Unis est entrée en vigueur quelques jours après l'adoption par le Canada de nouvelles mesures de sécurité frontalière qui, si elles étaient adoptées, limiteraient la capacité des personnes à demander l'asile au Canada.

Les critiques et les groupes de défense des droits qualifient cette vaste législation sur la sécurité frontalière de menace pour les libertés civiles dans le système d'immigration et d'asile.

Le gouvernement affirme que le projet de loi de 127 pages présenté lundi vise à assurer la sécurité des frontières, à lutter contre le crime organisé transnational, à endiguer le flux de fentanyl mortel et à lutter contre le blanchiment d'argent.

Une modification proposée au projet de loi libéral empêcherait les personnes résidant au Canada depuis plus d'un an de présenter une demande d'asile. Cette modification n'affecterait pas les demandes déjà soumises, mais serait rétroactive au 3 juin, si le projet de loi est adopté.

«Cela a été une double peine pour mes amis qui sont au Canada, qui ne sont pas citoyens canadiens mais qui sont originaires du Myanmar, car ils ont déjà traversé plus de quatre ans de lutte personnelle, a-t-il ajouté. Restreindre l'accès à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) ou à l'asile aux personnes ayant déjà étudié ici pourrait être très dramatique pour ces personnes.»

La diaspora érythréenne aussi préoccupée

Dawit Demoz, vice-président du Centre communautaire érythréen-canadien de Toronto, a indiqué que son organisation était «profondément préoccupée» par les conséquences de la nouvelle interdiction de voyager aux États-Unis pour la diaspora érythréenne.

Il a ajouté que de nombreuses familles de la communauté érythréenne au sud de la frontière restent séparées en raison de la crise politique et humanitaire qui sévit dans leur pays d'origine, et que la nouvelle interdiction complique encore davantage leurs efforts de réunification.

«(L'interdiction) crée une peur et une incertitude supplémentaires pour ceux qui recherchent la sécurité et des liens au-delà des frontières, a-t-il soutenu. Pour notre communauté, des politiques comme celle-ci n'ont pas seulement un impact sur les voyages, elles aggravent l'isolement, retardent les réunifications et aggravent le fardeau émotionnel des personnes déplacées.»

— Avec des informations de l'Associated Press.

Maan Alhmidi, La Presse Canadienne

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