L'Ordre des audioprothésistes dénonce la couverture de la RAMQ pour les aînés


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Des personnes âgées sont privées d'appareil auditif ou retardent le moment de s'en procurer un parce que la couverture de la RAMQ est insuffisante, dénonce mardi l'Ordre des audioprothésistes du Québec.
Il demande au gouvernement Legault de moderniser les critères d'admissibilité au Programme d'aides auditives de la Régie de l'assurance-maladie du Québec (RAMQ). Présentement, pour pouvoir avoir un remboursement de prothèse auditive, il faut être malentendant des deux côtés et avoir une perte auditive moyenne d'au moins 35 décibels dans chaque oreille. À ce seuil, la perte auditive est «bien installée», puisqu'à partir de 25 décibels, on considère qu'il y a déjà une baisse de l'acuité auditive, souligne l'audioprothésiste David Gélinas, également président de l'Ordre des audioprothésistes du Québec.
Pour illustrer la discrimination que cela engendre, M. Gélinas a parlé d'un de ces patients, qui est devenu admissible à la RAMQ à l'âge de 99 ans. Avant cela, une de ses oreilles avait une perte auditive de 32 décibels et l'autre de 37 décibels. Il a pu avoir un appareil quand sa meilleure oreille a dégradé à 35 décibels.
M. Gélinas mentionne que pour couvrir l'appareil de la deuxième oreille, les gens doivent débourser en moyenne entre 1000 et 2000 $.
Les personnes de 18 ans et moins peuvent avoir le remboursement d'une seule prothèse auditive et le seuil d'admissibilité est établi à 25 décibels. «Ce qu'on déplore à l'Ordre des audioprothésistes, c'est que la couverture pour les personnes adultes, elle est restrictive, beaucoup plus restrictive par exemple que celle qui est offerte aux enfants et aux étudiants. Donc ce qu'on demande au gouvernement c'est tout simple, s'il y a une perte auditive dans une oreille, on paie une prothèse auditive, et s'il y a une perte d'auditive dans les deux oreilles, on paie deux prothèses auditives et ça pour tout le monde», a-t-il déclaré.
L'incohérence dans la couverture du régime public fait en sorte que plusieurs personnes qui auraient besoin d'un appareil auditif s'en privent. Le taux d'adoption des prothèses auditives au Québec est de 32 %, alors que dans d'autres pays où il y a peu, voire aucune barrière d'accès, comme en Allemagne, en France ou au Danemark, environ une personne sur deux en bénéficie.
L'Ordre des audioprothésistes du Québec fait aussi valoir que l'accès aux prothèses auditives peut améliorer la santé des aînés. Être appareillées correctement est associé à une diminution du risque de démence jusqu'à 30 %, jusqu'à deux fois moins de risque de chutes, et une diminution de symptômes de dépression. Cela contribue aussi à avoir plus de relations sociales.
M. Gélinas a rappelé que ce n'est pas la première fois que l'Ordre dénonce la couverture du régime public. «Ce qu'on se fait répondre, évidemment, c'est que c'est une question de sous», dit-il, ajoutant qu'il n'est pas insensible au contexte budgétaire actuel.
«On sait que le gouvernement a fait des déficits importants. Donc, on a voulu parler le même langage que le gouvernement, que les décideurs politiques, avec un langage qui est purement économique. Ce qu'on a démontré avec une étude indépendante, c'est que c'est bénéfique non seulement au niveau de la santé, mais c'est aussi économiquement intelligent d'investir en santé auditive parce que toutes les retombées permettent des économies qui sont substantielles au gouvernement», explique M. Gélinas.
Différents scénarios de bonification de la couverture de la RAMQ ont été évalués dans une analyse avantages-coûts du programme de prothèses auditives menée pour l'Ordre. L'un des scénarios s'est inspiré du modèle français avec un taux d'adoption des prothèses auditives à 46 %, ce qui nécessiterait un investissement supplémentaire de 133 millions $ du gouvernement québécois sur cinq ans. Or, l'État ferait des gains de 1,2 milliard $, soit un avantage net de 1,04 milliard $.
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Katrine Desautels, La Presse Canadienne