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La visite de Carney à la Maison-Blanche sera observée de près par les Canadiens

durée 11h35
4 mai 2025
La Presse Canadienne, 2024
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5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

WASHINGTON — Le premier ministre Mark Carney sera observé de près par les Canadiens exaspérés par Donald Trump — et par une communauté d’affaires anxieuse à la recherche d’un allégement tarifaire — lorsqu’il rencontrera le président des États-Unis mardi à Washington.

Après des mois de menaces d’annexion de la part du président Trump, le premier ministre nouvellement élu devra faire preuve d’un équilibre délicat — montrer sa force tout en maintenant la place du Canada dans un pacte commercial nord-américain essentiel que les droits de douane du président Trump ont cherché à renverser.

«Mon gouvernement se battra pour obtenir la meilleure entente possible pour le Canada», a déclaré M. Carney vendredi dans sa première conférence de presse depuis les élections du 28 avril.

L’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) sur le commerce a été négocié pendant la première administration Trump à la Maison-Blanche. Le président Trump l’avait alors qualifié du meilleur accord jamais conclu et les responsables canadiens affirmaient que c’était une victoire pour le Canada.

Toutefois, l’ACEUM fera l’objet d’un examen approfondi l’an prochain. Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, il est rapidement devenu évident que le président avait l’intention de faire dérailler ce pacte commercial.

Le Canada et le Mexique ont été frappés par des droits de douane imposés par le président Trump qui a prétexté des problèmes liés au fentanyl et au trafic de drogue traversant la frontière. Les données du gouvernement américain montrent pourtant qu’un faible volume de fentanyl a été intercepté à la frontière canado-américaine. Le Canada et le Mexique ont également été frappés par des tarifs douaniers sur l’acier, l’aluminium et les automobiles importées aux États-Unis, mais les pièces fabriquées dans le cadre de l'ACEUM ont par la suite été exemptées de ces droits de douane.

Les provocations du président Trump comprenaient le fait d’appeler le premier ministre de l’époque, Justin Trudeau, un «gouverneur» et de dire que le pays serait mieux en tant qu’État américain, plus précisément le 51e État.

Bien que ce changement de ton à Washington ait alarmé les plus proches voisins des États-Unis, certains signes indiquent que le président américain accorde toujours de l’importance à l’ACEUM.

Lorsque Donald Trump a lancé sa guerre commerciale au monde entier avec des tarifs dits «réciproques» début avril, le Canada et le Mexique n’étaient pas inclus.

Le président Trump a suspendu le plus important de ces droits de douane pendant 90 jours, pour laisser du temps pour négocier des accords, mais il a maintenu un tarif universel de 10 % sur la plupart des importations aux États-Unis.

«Si vous lisez entre les lignes, le Canada et le Mexique semblent avoir été mis de côté (...) Espérons que cela signifie que l’administration Trump va considérer l'ACEUM comme un ensemble de mesures», a déclaré Laura Dawson, experte des relations canado-américaines et directrice générale de la coalition Future Borders Coalition.

La réunion de mardi pourrait donner un aperçu du plan de Trump pour ce qui était autrefois l’une des relations bilatérales les plus stables et amicales au monde. M. Trump a décrit la semaine dernière le premier ministre Carney comme «un monsieur très gentil» et a dit qu’il s’attend à avoir une «grande relation» avec le Canada.

Le représentant commercial des États-Unis, Jamieson Greer, a laissé entendre que l’administration américaine veut maintenir des partenariats avec ses voisins proches. M. Greer a déclaré à Fox News la semaine dernière que «le président veut vraiment avoir une relation saine en Amérique du Nord.»

«Nous devrions avoir plus de fabrication en Amérique du Nord — nous devons l’avoir dans notre hémisphère», avait affirmé M. Greer.

Il n’est pas encore clair ce que l’équipe de M. Trump veut du Canada.

En parlant des négociations avec d’autres pays, M. Greer a décrit un «bon accord» qui voit les pays abaisser les niveaux tarifaires et supprimer les barrières sur des produits, comme les produits agricoles américains. Il a déclaré qu’une bonne entente répondrait aux préoccupations des Américains au sujet du commerce numérique et de la propriété intellectuelle, harmoniserait les contrôles à l’exportation pour assurer la sécurité économique et offrirait aux États-Unis des possibilités commerciales, y compris des investissements dans les minéraux essentiels.

L’ACEUM a instauré un commerce sans droits de douane pour presque toutes les marchandises entre le Canada et les États-Unis. Les ministères de la Défense des États-Unis et du Canada investissent déjà dans des projets sur les minéraux critiques.

Le Canada a imposé des droits de douane sur les véhicules électriques, l’acier et l’aluminium chinois, en partie pour apaiser les inquiétudes des États-Unis.

Steve Verheul, ancien négociateur commercial en chef du Canada, a récemment déclaré au Sommet de la croissance du Canada du Forum des politiques publiques que l’atmosphère actuelle est semblable aux tensions qui ont marqué le premier gouvernement Trump après que le président eut déchiré l’Accord de libre-échange nord-américain, qui a été remplacé par l'ACEUM.

Les États-Unis avaient présenté des propositions «extrêmes, totalement inacceptables», mais le Canada avait finalement surmonté la situation en étant créatif et en proposant des solutions, a rappelé M. Verheul.

Encore cette fois, ce dernier voit des signes d’un recul de Donald Trump. Le président a reporté à plusieurs reprises, depuis mars, les droits de douane sur divers produits canadiens. Il a notamment souligné que M. Trump a réduit l’impact des tarifs sur le secteur automobile nord-américain.

Le Canada est sur le point de «mener des négociations difficiles», mais M. Verheul pense qu’il y aura finalement un commerce «hors taxes».

Le Canada doit faire preuve d’unité dans ses discussions avec l’administration Trump, a pour sa part indiqué Laura Dawson, qui dirige la coalition Future Borders.

Le premier ministre Mark Carney devrait former un front multipartite sur le commerce, selon l'experte des relations canado-américaines. Pendant la première administration Trump, le comité consultatif d’Ottawa était composé de Rona Ambrose, ancienne chef conservatrice intérimaire.

«Il faut une forte représentation conservatrice, régionale et sectorielle», de l'avis de Mme Dawson.

M. Carney devra être stratégique, souligne-t-elle. Les entreprises canadiennes veulent de la place pour la croissance économique au Canada et aux États-Unis, mais le premier ministre ne peut pas laisser entendre que tout est pardonné, a ajouté Mme Dawson.

«Il y a encore beaucoup d’animosité au Canada», a affirmé Laura Dawson. «Il sera difficile de gérer une crise à court terme (...) avec les États-Unis, ainsi qu’un défi de compétitivité à long terme pour l’économie canadienne.»

Kelly Geraldine Malone, La Presse Canadienne

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