Le Canada se classe 19e sur 36 en matière de bien-être des enfants, selon l'UNICEF


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Par La Presse Canadienne, 2024
Une étude mondiale de l'UNICEF suggère que de nombreux enfants canadiens sont malheureux, les obstacles sociaux, tels que l'intimidation et la difficulté à se faire des amis, étant parmi les sources de leur angoisse.
Le 19e Bilan Innocenti de l'UNICEF indique qu'un jeune sur cinq au Canada est fréquemment victime d'intimidation, qu'un sur cinq se sent seul et qu'un sur quatre a du mal à se faire des amis.
Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) attribue notamment à l'intimidation la baisse de la satisfaction à l'égard de la vie déclarée par les jeunes de 15 ans, un recul de trois points de pourcentage depuis 2018, pour atteindre 76 %.
Il s'agit de la plus forte diminution observée au Canada parmi les catégories examinées par le rapport, qui compare le bien-être des enfants canadiens à celui d'autres pays riches entre 2018 et 2022.
Bien qu'il figure parmi les 10 pays les plus riches étudiés, le Canada se classe au 19e rang sur 36 pays, se classant parmi les derniers pour le suicide chez les adolescents, la mortalité infantile et les compétences sociales.
Des résultats décevants
La directrice d'une unité d'apprentissage précoce à l'Université de la Colombie-Britannique à Vancouver a confié que les résultats sont particulièrement décevants, car le Canada devrait disposer des ressources nécessaires pour s'attaquer aux difficultés des jeunes et aux facteurs sociétaux qui les exacerbent.
«À bien des égards, la situation des enfants est pire. Le soutien diminue au lieu d'augmenter», a pointé la Dre Mariana Brussoni, directrice du Human Early Learning Partnership.
«Les enfants font partie de familles, qui font partie de communautés, de quartiers et de sociétés, donc ce ne sont pas seulement les enfants qui sont en difficulté. Il faut penser à tout ce qui les entoure, et nous avons constaté les difficultés des parents et des communautés.»
Un rapport complémentaire, également publié mardi, qui se concentre sur les résultats canadiens, indique que l'intimidation contribue grandement à la baisse de la satisfaction dans la vie: 22 % des jeunes de 15 ans déclarent être fréquemment victimes d'intimidation, ce qui les place au 26e rang sur 40 pays.
Le Canada se classe 28e sur 41 pays en matière de compétences sociales. Un jeune de 15 ans sur quatre dit avoir de la difficulté à se faire des amis à l'école, un chiffre légèrement supérieur à la moyenne du rapport et qui s'inscrit dans une tendance inquiétante.
«Le présent rapport met en lumière les aspects auxquels nous devons accorder la priorité pour nos enfants, à savoir leur santé, leur sécurité, leur éducation et leur bonheur», a expliqué Sevaun Palvetzian, présidente-directrice générale d'UNICEF Canada, dans un communiqué.
«Je suis profondément déçue par la baisse de satisfaction des enfants et des jeunes du Canada à l’égard de leur vie. Une bonne santé mentale est la fondation de l’enfance, et pourtant elle continue d’être négligée», a ajouté Matin Moradkhan, défenseure des jeunes chez UNICEF Canada. «Nous demandons un changement fondamental des politiques à l’égard de nos systèmes d’éducation, de financement et de soins de santé, afin que chaque enfant et chaque jeune ait la possibilité de s’épanouir.»
L'étude de l'UNICEF indique que les compétences sociales sont restées globalement stables pendant une période inhabituelle où la COVID-19 a bouleversé le quotidien de nombreuses familles.
Au Canada, la pandémie a contraint les cours à se dérouler en ligne dans la plupart des régions du pays, a annulé certaines activités parascolaires et a restreint les rassemblements.
«Cet indicateur a relativement peu évolué entre 2018 et 2022: il a augmenté de plus de 5 % dans sept des 36 pays, tandis qu’il n’a diminué substantiellement que dans un seul», indique l’étude. «C’est un signe positif compte tenu des inquiétudes concernant les répercussions potentielles des fermetures d’écoles pendant la pandémie de COVID-19.»
Néanmoins, la Dre Mariana Brussoni affirme que ces tendances existaient avant la pandémie et se poursuivent aujourd’hui, ce qui exige une vigilance accrue pour garantir l’accès à un soutien adéquat dès le début de la vie d’un enfant, lorsque cela «s’avère bien plus rentable que d’essayer de régler les problèmes plus tard».
Trop fort taux de suicide adolescent
Le Canada se classe au 13e rang pour la satisfaction globale à l’égard de la vie. Bien qu’il y ait eu une légère baisse, l’étude précise qu’elle n’est pas considérée comme statistiquement significative.
L’étude a également révélé que le Canada a amélioré ses taux de suicide et de mortalité infantile, mais qu’il se classe toujours relativement bas: 33e sur 42 pays pour le suicide et 25e sur 43 pays pour la mortalité infantile.
Depuis 2018, le taux de suicide chez les adolescents est passé de 10,1 à 8,4 pour 100 000, mais il est resté bien supérieur à la moyenne de 6,2 pour 100 000, le suicide demeurant l’une des principales causes de décès chez les adolescents.
Le taux de mortalité chez les enfants de 5 à 14 ans est passé de 0,94 à 0,88 pour 1000, mais cette amélioration est inférieure aux gains enregistrés dans la plupart des autres pays. Par ailleurs, peu de progrès ont été réalisés dans la lutte contre le surpoids chez les enfants (plus d’un sur quatre).
Le seul classement du Canada parmi les 12 premiers concerne les compétences scolaires, où il se classe sixième sur 42 pays.
Le rapport complémentaire, «L’enfance interrompue: Comment le bien-être des enfants au Canada se compare-t-il à celui qui prévaut dans d’autres pays riches», exhorte tous les ordres de gouvernement à prendre des mesures, notamment en doublant la Prestation pour enfants handicapés, en facilitant l’accès aux prestations de revenu et aux congés parentaux pour la garde des nourrissons et en renforçant la protection contre les dangers du marketing et du numérique.
Le rapport appelle également à une meilleure application du principe de Jordan, établi par le Tribunal canadien des droits de la personne, afin de garantir que les enfants des Premières Nations ne subissent ni retards ni refus d'accès aux services gouvernementaux.
Cassandra Szklarski, La Presse Canadienne