Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

Les assureurs ne couvrent pas les glissements de terrain

durée 17h15
22 mai 2025
La Presse Canadienne, 2024
durée

Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Le propriétaire de la maison qui a été emportée par un important glissement de terrain mercredi à Sainte-Monique, dans le Centre-du-Québec, ne pourra pas être indemnisé par une compagnie d’assurance. Les assureurs ne couvrent pas ce genre de risque, qui sera de plus en plus fréquent.

Quelques heures après le glissement de terrain qui a englouti la maison de Fernand Therrien mercredi à Sainte-Monique, sa nièce, Audrey-Anne Gervais, a lancé une campagne de financement sur le site GoFundMe.

«J'ai tout perdu, ma maison, mon garage, la rivière a même repris mon terrain! Ma famille veut m'aider, grâce à vous, à me reloger, m'habiller et à nourrir mes chiens qui ont survécu», peut-on lire dans un message attribué à Fernand Therrien.

L’objectif de la campagne est d’amasser la somme de 50 000 $ pour celui qui a été victime d’un sinistre qui n’est pas couvert par les assurances habitation au Canada.

«Lorsqu'un assureur va couvrir un risque ou l'inclure, par exemple, dans une police d'assurance habitation de base, il doit être en mesure d'évaluer ce risque-là, d'évaluer la probabilité qu'il se réalise», explique Pierre Babinsky, du Bureau d’assurance du Canada (BAC).

«En absence d'une méthode d'évaluer ce risque-là, d'en mesurer la probabilité, ça rend impossible l'offre d'assurance pour un aléa comme ça», ajoute le directeur des communications et des affaires publiques au BAC.

Le professeur à la retraite Jacques Joncat, cofondateur du Laboratoire d'études sur les risques naturels (LERN), associé à l’Université Laval, souligne «qu’on peut prévoir les conditions propices au déclenchement d'un glissement de terrain, mais qu’on ne peut pas prévoir quand ces conditions seront réunies pour que cela se produise».

Le gouvernement procure une aide financière

À défaut de pouvoir compter sur les polices d'assurance habitation, les sinistrés peuvent se tourner vers le gouvernement du Québec, qui assume en partie les pertes encourues par les dommages provoqués par les mouvements de sol.

Les victimes de glissement de terrain ont la possibilité de s’inscrire au Programme général d’assistance financière lors de sinistres (PGAF), qui est, selon le site web du ministère de la Sécurité publique, «une aide de dernier recours aux propriétaires et aux locataires».

Ce programme permet à un sinistré de recevoir jusqu’à 385 000 $ pour «les dommages à la résidence et au chemin d’accès».

Aucun porte-parole du ministère n'était disponible jeudi pour expliquer en détail l'aide financière qui peut être accordée aux victimes de glissements de terrain.

Dans un échange de courriels, une relationniste a toutefois indiqué à La Presse Canadienne, qu'en plus des dommages à la résidence principale, le PGAF peut couvrir «des frais d'hébergements», des «biens meubles admissibles» et «des frais de déménagement et d'entreposage».

Des centaines d'enquêtes par année

Il est pratiquement impossible de connaître la fréquence des glissements de terrain au Québec, car «il faudrait vraiment faire un suivi de milliers de kilomètres de rives», a expliqué Jacques Joncat.

«Mais au ministère de la Sécurité publique, à la section des mouvements de terrain, je pense qu'ils doivent faire entre 150 et 300 enquêtes par année pour des glissements de terrain».

La plupart de ces phénomènes se produisent dans des sols argileux, sur les berges des cours d'eau.

Au Québec, les sols argileux se trouvent dans les parties les plus habitées du territoire, comme dans la vallée du Saint-Laurent, la vallée de l’Outaouais et la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

Le professeur à la retraite a ajouté que «les grands glissements de terrain, comme celui qui s’est produit à Sainte-Monique, il y en a un par année».

La cause du glissement de terrain de mercredi n’a pas encore été confirmée, mais la Sécurité publique a indiqué que les fortes pluies de la dernière semaine pourraient avoir contribué au phénomène.

La quantité de glissements de terrain devrait augmenter

Les changements climatiques, qui engendrent des précipitations plus intenses, peuvent accentuer la quantité de glissements de terrain.

«Des études prévoient que, dans la Vallée du Saint-Laurent, on pourrait avoir peut-être 15 % de plus de précipitation» et «les fortes pluies vont avoir une incidence réelle sur les glissements de terrain superficiels», qui sont caractérisés par une profondeur inférieure à 1,5 mètre sous le terrain naturel.

Le glissement de terrain de Sainte-Monique a provoqué un cratère d’une profondeur estimée de 25 mètres à certains endroits.

«C’est un glissement profond qui est directement associé à l’érosion», qui, elle, «est aussi associée aux changements climatiques», mentionne le professeur émérite Jacques Joncat.

Jeudi après-midi, le directeur régional de la sécurité civile, Sylvain Gallant, a indiqué que «les expertises se poursuivent» à Sainte-Monique et que les autorités sont «en attente d’un rapport préliminaire».

Stéphane Blais, La Presse Canadienne

app-store-badge google-play-badge