Nous joindre
X
Rechercher
Publicité

Les droits de douane américains pèsent sur le budget de l'Ontario

durée 17h33
15 mai 2025
La Presse Canadienne, 2024
durée

Temps de lecture   :  

5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

TORONTO — Les droits de douane imposés par le président américain Donald Trump ont assombri le budget de l'Ontario jeudi, freinant la croissance du PIB et éloignant la province de son objectif d'équilibre budgétaire, avec un déficit prévu de 14,6 milliards $ cette année.

Il est temps d'investir dans les infrastructures et la création d'emplois en Ontario afin que la province puisse en sortir renforcée, a affirmé le ministre des Finances, Peter Bethlenfalvy.

«L'Ontario et l'ensemble du Canada sont au bord du gouffre et nous devons prendre des mesures sérieuses pour nous assurer de ne pas nous retrouver au fond du gouffre», a déclaré M. Bethlenfalvy lors du dépôt de son budget de 232,5 milliards $.

«Qu'il s'agisse de notre avantage concurrentiel dans les minéraux critiques, l'énergie, la technologie, les talents, nos travailleurs ou tout autre domaine, nous devrons stimuler notre économie en investissant dans nos industries puissantes et prometteuses, en construisant davantage et plus rapidement, et en protégeant les emplois et les créateurs d'emplois.»

La province visait auparavant un budget équilibré pour 2026-2027, mais ce résultat était antérieur à l'élection de Donald Trump et à la mise en place des droits de douane. L'Ontario devrait maintenant retrouver l'équilibre budgétaire en 2027-2028 grâce à un léger excédent.

Par ailleurs, le budget de M. Bethlenfalvy prévoit un déficit de 14,6 milliards $ pour cet exercice financier — en hausse par rapport à 4,6 milliards $ prévus l'an dernier — et un déficit de 7,8 milliards $ l'an prochain.

Une grande partie de cette pression accrue provient des quelque 30 milliards $ de dépenses visant à stimuler l'économie face aux droits de douane, notamment un fonds de 5 milliards $ pour soulager les entreprises, l'ajout de 5 milliards $ à un fonds de financement des infrastructures et la mise en place d'un nouveau Fonds pour le traitement des minéraux critiques de 500 millions $.

De plus, le gouvernement prévoit ajouter 1 milliard $ à son Fonds de développement des compétences pour la reconversion des travailleurs, 600 millions $ à un fonds d'aide à l'implantation ou à l'expansion des entreprises en Ontario, 200 millions $ à un programme de subventions à la construction navale et la création d'un fonds de 50 millions $ pour aider les entreprises à créer de nouvelles chaînes d'approvisionnement et stimuler le commerce interprovincial.

Les oppositions sceptiques

Malgré tous les fonds destinés aux entreprises, les chefs de l'opposition ont toutefois soutenu que le budget prévoyait très peu de mesures pour les gens et leurs besoins les plus urgents, comme le logement et les soins de santé.

«Ce budget parle beaucoup des voitures et des infrastructures, a expliqué le chef du Parti vert, Mike Schreiner. Il ne parle pas beaucoup d'investissements concrets dans les gens.»

La cheffe du NPD, Marit Stiles, l'a qualifié de «budget de fortune».

«C'est une occasion manquée de renforcer l'Ontario, a-t-elle indiqué. Le gouvernement aurait pu bâtir un avenir à l'abri des droits de douane, avec de bonnes écoles, des logements abordables, des soins de santé publics de calibre mondial et des services publics fiables. Au lieu de cela, le gouvernement Ford a opté pour davantage de coupes, moins d'aide et aucun soutien réel aux familles qui ont besoin d'aide immédiatement.»

Le directeur de la responsabilité financière a indiqué qu'une «légère» récession pourrait survenir en 2025. M. Bethlenfalvy a ajouté qu'il ne spéculerait pas sur l'entrée en récession de l'Ontario, mais que tous les investissements annoncés dans le budget visent à soutenir l'économie de la province à un moment critique.

«Nous essayons de renforcer et d'immuniser l'Ontario du mieux possible, a-t-il dit. Je pense que nous avons le bon plan et la bonne vision pour non seulement gérer la situation actuelle, mais aussi préparer le terrain pour l'avenir.»

Le PIB réel devrait augmenter de seulement 0,8 % l'an prochain, en forte baisse par rapport à la projection de 1,9 % du budget de 2024 pour cette année. La création d'emplois devrait également ralentir considérablement et le taux de chômage devrait s'établir à 7,6 % en 2025, contre 6,6 % précédemment.

L'Ontario est l'une des provinces les plus exposées à la politique commerciale des États-Unis, indique le gouvernement dans son budget. Environ 285 000 emplois dans la province dépendent des exportations de biens vers les États-Unis, ce qui représente près de 3,5 % de l’emploi total, selon le rapport.

Les États-Unis sont le principal partenaire commercial de l’Ontario, avec 194,9 milliards $ d’exportations de marchandises vers ce pays en 2024.

Les recettes devraient atteindre près de 220 milliards $ pour cet exercice, en baisse par rapport aux 221,6 milliards $ de l’an dernier, en partie en raison de la baisse des recettes provenant de l’impôt sur les sociétés. L’Ontario devrait consacrer 216,3 milliards $ à des programmes cette année et 16,2 milliards $ aux intérêts et autres frais de service de la dette.

La réserve, quant à elle, est fixée au montant exceptionnellement élevé de 2 milliards $ pour cette année et les années suivantes. Le fonds de prévoyance, destiné à servir de tampon supplémentaire pour atténuer les risques, est fixé à 3 milliards $ pour 2025-2026.

Le document budgétaire indique que ce fonds «augmentera encore pendant le reste de la période de prévision à moyen terme», mais ne précise pas les montants.

Les partis d'opposition et le directeur de la responsabilité financière de la province ont critiqué par le passé les sommes importantes non affectées que le gouvernement progressiste-conservateur a mises de côté dans les fonds de prévoyance, une pratique qu'ils jugent opaque.

La porte-parole libérale en matière de finances, Stephanie Bowman, a qualifié cette comptabilité de «bizarre».

«Ils ajoutent de l'argent aux fonds de prévoyance, ce qui crée un déficit plus important. Ainsi, s'ils n'en ont pas besoin, ils ont l'impression d'avoir dépassé le budget et d'avoir un déficit plus faible», a-t-elle expliqué.

La dette nette de l'Ontario s'élève cette année à plus de 460 milliards $. Le ratio dette nette/PIB de la province devrait grimper cette année à 37,9 %, après avoir atteint son plus bas niveau en 13 ans, et devrait encore augmenter pour atteindre 38,9 % en 2026-2027.

Allison Jones, La Presse Canadienne

app-store-badge google-play-badge