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Les personnes handicapées au Québec peuvent elles aussi partir à l’aventure

durée 10h15
21 juin 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Se déplacer en fauteuil roulant n’empêche pas la pratique de plein air. Grâce à plusieurs initiatives, les personnes à mobilité réduite au Québec ont plusieurs options pour partir à l’aventure, que ce soit pour randonner, pagayer, nager ou voyager.

«Peu importe où vous allez, partout au Québec, vous allez trouver du plein air accessible. C'est sûr, sûr, sûr», promet Geneviève Bergeron, directrice générale de l’Association québécoise pour le loisir des personnes handicapées (AQLPH).

L’AQLPH milite pour que tout le monde puisse avoir accès à ces loisirs, mobilité réduite ou pas. L’association forme également des lieux de plein air ou des organismes sans but lucratif (OSBL) qui visent l'accessibilité universelle, en adaptant l’aménagement des sentiers, par exemple.

La plupart des équipements accessibles peuvent être empruntés directement sur les lieux de plein air, explique Geneviève Bergeron. Mais à quel genre d’équipement est-ce qu’on fait référence? «Il y en a vraiment beaucoup!» s’exclame Mme Bergeron.

Il y a la joëlette (un fauteuil à une roue qui nécessite d’être poussé et tiré par des accompagnateurs), plusieurs types de fauteuils comme le fauteuil tout terrain ou le fauteuil de baignade, le vélo à main (qui permet de pédaler avec les mains), la trottinette des neiges, les skis qui vont en dessous des fauteuils, le hippolib pour faire du cheval, etc.

Avec une simple recherche sur internet, ou en contactant les branches régionales de l’AQLPH, il est possible de voir où pratiquer le sport désiré. Sinon, il existe des réseaux de prêts d’équipement à l’échelle du Québec, comme Circonflexe.

Du côté de la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ), «ça fait partie de notre mission d’essayer de rendre le territoire accessible au plus grand nombre de personnes», dit Simon Boivin, responsable des relations avec les médias.

Et ce, malgré les défis que cela engendre. «On a des chalets qui ont été construits dans les années 1970. Ce ne sont pas toujours des équipements qui, à la base, sont nécessairement adaptés», précise M. Boivin.

Un groupe de travail s'assure donc de créer un plan d'action, chaque année, à l'égard des personnes handicapées. Celui pour 2025-2026 a été présenté au conseil d'administration de la SEPAQ vendredi.

Une douzaine des 22 parcs nationaux (excluant ceux du Nunavik) offrent un service de prêt d'équipement accessible. Un document répertorie l’accessibilité des centres de services, des blocs sanitaires, des sites de camping et des sentiers.

Par exemple, au parc national d’Oka, dans les Laurentides, il est possible d’emprunter des Ski-Vel (un fauteuil muni de skis pour glisser sur la neige), des fauteuils hippocampe (fauteuils tout terrain permettant d'aller dans l’eau et sur le sable), des tricycles Opaire (un vélo qui ressemble à un tandem, mais la personne en fauteuil ne pédale pas) et des fauteuils Kartus adaptés aux sentiers de randonnée.

Bien que la majorité des parcs de la SEPAQ soient équipés de fauteuils, seul le parc national de Frontenac, à cheval entre l’Estrie et Chaudière-Appalaches, offre la location de planche à pagaie adaptée.

L’emprunt de ces équipements spécialisés est gratuit dans tous les parcs.

La SEPAQ a plusieurs partenariats, avec l’AQLPH, entre autres, qui leur permet d'offrir à leurs employés des formations sur le service à la clientèle.

Geneviève Bergeron souligne que les équipements se sont beaucoup développés dans les dix dernières années. «Moi, je dis gentiment que c'est la saveur du mois. Depuis quelques années, les gens s'y sont intéressés, les gens ont réalisé qu'on pouvait faire du plein air même en fauteuil, même si on a une jambe qui marche moins bien», laisse-t-elle tomber, sur un ton qui sous-entend que ça aurait dû arriver bien avant.

Un manque d’aventure

En 2021, cinq passionnés de plein air, dont Mathieu Néron-Turpin, remarquent un manque «d’offres structurées» au Québec pour le plein air adapté.

Ils décident donc de fonder Bivouaq, une coopérative qui organise des excursions au Québec et à l’étranger pour les personnes en situation de handicap, qu’elles soient capables de marcher ou non.

«Il y existait des organismes qui proposaient une ou deux sorties par mois, mais dans leur région, pour les membres. C’était plein de petites choses ici et là. On a voulu créer une entité qui propose quelque chose de plus structurant», explique celui qui est maintenant directeur des opérations.

Cette offre plus globale, ouverte à tous et plus sécuritaire, s'étend dans plusieurs régions du Québec. À Bivouaq, les ambassadeurs et guides plein air sont tous formés pour s’assurer que les sorties soient sécuritaires.

«Ces activités-là, où il y a des personnes sans handicap et avec handicap qui participent ensemble, en ce moment, ça n'existe pas dans les livres de sécurité du plein air», explique-t-il, en prenant comme exemple le ratio du nombre de personnes handicapées et sans handicap. Une norme sur un ratio de la sorte n'existe pas encore au Québec.

Pour une courte excursion, un groupe est généralement composé de quatre personnes handicapées (deux qui se déplacent avec une joëlette, deux qui peuvent marcher) et huit bénévoles sans handicap.

Cet été, Bivouaq ira au parc national du Bic, au parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie et au parc national des Grands-Jardins, dans Charlevoix.

En plus des excursions, il existe des antennes régionales, qui organisent des activités d’une journée. «Ils viennent de la place, ils la connaissent, donc ils peuvent proposer des activités sur leur territoire», poursuit Mathieu Néron-Turpin.

Vraiment pour tous

Les expéditions ne sont pas réservées qu’aux personnes handicapées. Frédéric Plante, avec sa conjointe et son fils, a décidé de participer à une expédition de kayak de quatre jours au Parc régional Kiamika, dans les Laurentides.

Alors qu'il travaillait pour le réseau COOP, une fédération qui accompagne les coopératives au Québec, il a aidé à la création de Bivouaq, elle-même une coopérative. Frédéric Plante n'est pas en situation de handicap, tout comme les autres membres de sa famille. Mais, étant un passionné de plein air, il était très curieux de participer à une expédition de la sorte, sans trop savoir à quoi s'attendre.

Pour lui, la mixité du groupe est une grande richesse. «Tu réalises vraiment que ce sont des gens comme tout le monde, à part certaines limitations physiques. C’était vraiment magique.» Il décrit son expérience comme «mémorable et vivifiante» en raison de ces rencontres.

Le loisir est un déterminant sur la santé, les bienfaits sont multiples, explique Geneviève Bergeron. «Donc, le rendre accessible à tout le monde, pour moi, c'est juste le minimum.»

«C’est important de démocratiser ça, puis de faire en sorte que le handicap, ce ne soit pas un frein à la pratique de loisir, que ce soit juste un autre paramètre dans l'être humain», conclut-elle.

Aurélie Lachapelle, La Presse Canadienne

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