Litiges du tabac: des groupes plaident pour un investissement en prévention


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Des groupes qui militent pour la lutte contre le tabac veulent qu'une partie de l'argent que Québec obtiendra de l'entente mettant fin aux litiges face aux trois plus grands cigarettiers soit investi dans la prévention.
«Avec l'entente avec les fabricants de tabac, il y a une opportunité historique de réduire les maladies et morts causées par le tabac», a plaidé Robert Cunningham, analyste principal des politiques avec la Société canadienne du cancer.
Cinq groupes issus des milieux de la santé ont donc interpellé le premier ministre, François Legault, le ministre de la Santé, Christian Dubé, et le ministre des Finances, Eric Girard, dans une lettre.
Ils demandent à Québec de profiter des retombées financières de l'entente pour investir une somme supplémentaire de 30 millions $ par année pendant cinq ans pour accélérer la lutte contre le tabagisme et le vapotage, ce qui représente 2,7 % de l'enveloppe de la province.
«Québec va recevoir 6,6 milliards $ avec cette entente et c'est essentiel qu'une proportion importante de cet argent soit investi dans les programmes antitabac», a avancé M. Cunningham.
Pour Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, il s'agit surtout d'une «obligation morale du gouvernement de consacrer une partie de ce montant à la prévention».
L'argent que les provinces obtiendront ne proviendra pas de sommes qui existent déjà, a-t-elle rappelé. «Ce sont les fumeurs d'aujourd'hui et de demain qui paieront les montants qui seront encaissés.»
Jugeant l'entente «mauvaise», elle reproche le manque de mesures pour réduire le tabagisme et pour forcer les compagnies à changer leur modèle d'affaires.
Mme Doucas estime qu'utiliser une partie de l'argent de l'entente permettrait de combler ce manque en investissant dans de nouveaux programmes ou d'autres existants.
Selon elle, la Loi concernant la lutte contre le tabagisme devrait également être modernisée avec une meilleure vigie de l'industrie, alors que les cigarettiers ont mis de l'avant de nouvelles stratégies.
«Par la suite, on pense que c'est l'industrie elle-même qui devrait payer pour le financement de la lutte. C'est notamment ce qui va se faire au niveau fédéral», a-t-elle expliqué.
Un problème de santé publique
Le tabac demeure la première cause de maladies et de décès évitables au Québec, tuant 36 fumeurs de la province chaque jour.
Si les victimes québécoises du tabac se partageront 4,1 milliards $ provenant des cigarettiers, M. Cunningham a insisté sur l'importance de prévenir aussi l'apparition de nouvelles victimes.
«Si on réduit l'usage du tabac, on va réduire le cancer et les autres maladies et on va réduire les coûts de santé dans le futur. C'est une stratégie gagnant-gagnant pour Québec», a-t-il souligné.
Le gouvernement provincial a déjà créé des programmes pour la lutte contre le tabac, mais il faut en «faire beaucoup plus», selon M. Cunningham.
Les groupes ont également pointé du doigt le fait que les provinces et territoires se sont opposés au financement d'interventions en prévention ou en cessation tabagique par l'intermédiaire de la fondation Cy-près pour des raisons de compétences provinciales.
«Comme résultat, c'est leur responsabilité d'avoir des programmes et initiatives pour réduire le tabac», a fait valoir M. Cunningham, qui a rappelé que 1 milliard $ doit provenir de l'entente pour cette fondation indépendante.
Interrogé au sujet de la lettre, le cabinet du ministre de la Santé a indiqué qu'il a mandaté la Santé publique afin d'élaborer la première Stratégie nationale de prévention.
Audrey Sanikopoulos, La Presse Canadienne