Ottawa condamne fermement les restrictions imposées par Israël à l'aide alimentaire


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Ottawa condamne plus fermement les restrictions imposées par Israël à l'aide alimentaire dans la bande de Gaza, alors que l'ambassadeur du pays continue de rejeter les allégations selon lesquelles Israël violerait le droit humanitaire.
Cette nouvelle critique a été formulée mardi soir dans un message publié sur X par la direction du développement d'Affaires mondiales Canada. Dans ce message, le ministère demande à nouveau à Israël d'autoriser les Nations unies à reprendre leur travail humanitaire dans la bande de Gaza, après des jours d'incidents au cours desquels des coups de feu ont été tirés sur les sites de distribution de l'aide à la suite d'un blocus de près de trois mois.
«Le Canada est vivement préoccupé par les rapports faisant état de nombreuses personnes palestiniennes décédées ou blessées, ainsi que par les scènes de chaos et les conditions épouvantables qui règnent actuellement à Gaza, où la population tente d’accéder à une aide limitée», peut-on lire dans le communiqué.
Le ton de la déclaration est beaucoup plus tranché que les messages d'Ottawa sur Israël au cours des derniers mois. Elle émane de la direction de l'aide humanitaire du ministère et non de son compte de médias sociaux sur les affaires diplomatiques, qui a partagé le message.
Dans cette déclaration, le ministère critique un ordre d'évacuation de ce qu'Ottawa appelle «le dernier centre médical opérationnel dans le nord de Gaza», l'hôpital Al-Awda. Le ministère des Affaires internationales s'est dit «préoccupé» par cette décision.
«L'absence de soins médicaux est inacceptable. Le Canada exhorte Israël à protéger les hôpitaux et à assurer la continuité des services médicaux aux civils», peut-on lire dans la déclaration.
L'Associated Press a rapporté mercredi que l'hôpital avait été encerclé par les troupes israéliennes et avait essuyé des tirs ces derniers jours. L'AP a indiqué que le personnel médical a évacué les patients, mais que l'armée israélienne n'a pas encore ordonné au personnel d'évacuer les lieux.
L'ambassadeur israélien Iddo Moed a réagi à la déclaration de mardi en réitérant l'affirmation d'Israël selon laquelle le Hamas a volé de grandes quantités d'aide de l'ONU.
«Israël s'engage pleinement à faire en sorte que l'aide humanitaire parvienne à ceux qui en ont besoin», a-t-il assuré, défendant le travail de distribution de l'aide de la Fondation humanitaire de Gaza, qui est soutenue par Israël et les États-Unis.
M. Moed a déclaré que l'organisation «assure la distribution directe de l'aide à la population de Gaza» et que «les terroristes du Hamas sont responsables de la mise en danger des civils, qu'ils soient israéliens ou palestiniens».
Dans sa déclaration, Affaires mondiales Canada a appelé le Hamas à libérer les 58 derniers otages de l'attaque brutale d'octobre 2023. Le Canada a déclaré que le Hamas ne devrait pas être autorisé à jouer un rôle dans la gestion de la bande de Gaza, mais il n'a pas cité le groupe nommément dans sa déclaration de mardi.
Un système de distribution dangereux
Le gouvernement israélien a créé la Fondation humanitaire de Gaza pour distribuer de l'aide dans quatre endroits de la bande de Gaza, fermant ainsi des centaines de sites gérés par des agences internationales sur l'ensemble du territoire.
Israël affirme qu'il a dû prendre cette mesure pour empêcher l'aide d'atteindre le Hamas. Les Nations unies et des organisations humanitaires ont déclaré que le détournement de l'aide n'avait pas lieu de manière significative.
Pratiquement tous les grands groupes humanitaires affirment que le système actuel ne permet pas d'acheminer suffisamment d'aide et qu'il crée un dangereux précédent en permettant à une partie belligérante de contrôler la distribution de l'aide.
La Fondation humanitaire de Gaza insiste sur le fait qu'elle a distribué l'aide avec succès et conteste les rapports faisant état de fusillades quasi quotidiennes sur les sites de distribution ou à proximité de ceux-ci.
Le ministère de l'Intérieur, dirigé par le Hamas, a exhorté les Palestiniens à ne pas «coopérer» avec le système de distribution de l'aide et les a menacés de conséquences non précisées.
Des organisations humanitaires ont décrit des scènes de violence chaotiques, des foules de Palestiniens désespérés se ruant sur les centres de distribution d'aide, tandis que les soldats israéliens tirent des coups de feu à proximité. L'organisation Human Concern International, basée à Ottawa, a mis sur pause l’envoi de 17 camions d'aide la semaine dernière et a accusé Israël d'imposer un système de distribution dangereux.
La Fondation humanitaire pour Gaza a refusé de révéler si elle recevait des fonds publics ou privés du Canada.
Les commentaires de mardi d’Affaires mondiales Canada font suite à un message publié lundi par le député Randeep Sarai, secrétaire d'État au Développement international, qui a déclaré que Gaza est «frappé» par la faim de façon «profondément troublante» et que les civils «doivent être protégés et traités avec dignité».
Les libéraux fédéraux se sont attiré les foudres des groupes de défense des droits de la personne pour n'avoir pas donné suite à leur menace, le mois dernier, d'imposer des sanctions ciblées à Israël si la situation s'aggravait dans les territoires palestiniens.
Depuis, des organisations internationales ont à plusieurs reprises mis en garde contre le risque de famine dans la bande de Gaza, tandis que le gouvernement israélien a déclaré qu'il étendrait les colonies en Cisjordanie.
Plus tôt cette semaine, M. Moed a accusé le Hamas de diffuser des informations erronées sur ce qui se passe dans la bande de Gaza et a déclaré que cela contribuait à la montée de la violence antisémite.
Israël interdit aux journalistes étrangers d'entrer dans la bande de Gaza sans être accompagnés de soldats israéliens.
Dylan Robertson, La Presse Canadienne