Plus d'une infirmière sur deux pense à quitter son poste, dit un sondage pancanadien


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Environ 65 % des professionnels de la santé au Canada ont envisagé de changer de poste au cours de la dernière année, apprend-on dans un récent sondage de Indeed. La proportion d'infirmières est particulièrement élevée, à 68 %: 50 % d'entre elles ont pensé partir, et 18 % ont entrepris des démarches en ce sens.
Les médecins étaient moins susceptibles (54 %) d’avoir songé à quitter leur poste. Quant au personnel de soutien — qui peut inclure des assistants médicaux, des préposés aux bénéficiaires, des agents de soutien administratif et des techniciens en entretien — la proportion de ceux qui ont pensé à partir s'élève à 62 %.
À contresens de ces constats, les données indiquent également que la majorité des travailleurs de la santé étaient satisfaits de leur travail, une proportion qui grimpe à 76 % chez les infirmières. Cela pourrait en partie expliquer que, parmi les personnes qui souhaitent quitter, 69 % désirent tout de même rester dans le domaine de la santé. Il s'agit d'une proportion supérieure à celle mesurée aux États-Unis, où 56 % des travailleurs de la santé ont exprimé le même désir.
Tout type de professionnels de la santé confondus, 41 % ont dit vouloir un nouveau poste dans le domaine de la santé; 28 % ont déclaré vouloir un poste similaire dans un autre établissement; 21 % des travailleurs souhaitaient un nouveau poste en dehors du secteur de la santé; et les autres ne se sont pas prononcés sur la question.
Pour améliorer la rétention de personnel infirmier, le président de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), Luc Mathieu, parle entre autres du manque de mesure de soutien pour les employés.
«La plupart des infirmières sont encore très motivées, dit-il. Elles ont encore à coeur la profession. Ça peut être une magnifique profession dans la mesure où on donne les conditions d'exercice, dans la mesure où elles sont soutenues aussi, pas seulement à leur entrée dans la profession, mais tout le long de leur pratique.»
M. Mathieu aimerait que soit mis en place une sorte de portfolio avec lequel on pourrait suivre le parcours de l'infirmière et l'accompagner. «Qu'on lui donne du ''feedback'' régulièrement. Les infirmières prennent soin des patients, mais il faudrait prendre soin de ceux qui prennent de soins des patients», souligne-t-il.
Vétusté des lieux et manque d'effectifs
Le président de l'OIIQ aborde aussi les enjeux de vétusté des établissements. «Il y a eu plusieurs articles concernant la décrépitude de bien des milieux de soins, celui dont on entend parler beaucoup, c'est Maisonneuve-Rosemont. Mais il y en a plein d'autres. Je vais visiter des établissements de santé, et puis on voit les lieux dans lesquels les infirmières travaillent, entre autres ce qu'on appelle les postes infirmiers. Des fois, c'est tout petit, il y a plein de monde là-dedans, les infirmières ne peuvent pas se concentrer pour faire leur plan de travail et rédiger leurs notes, déplore-t-il.
«Puis, quand elles ont à préparer des médicaments, des fois c'est des espaces contigus. Et quand tu veux préparer des médicaments, il faut que tu sois concentré pour ne pas faire d'erreurs», ajoute-t-il.
Il s'agit d'une «multitude de petites choses» qui font une différence, selon M. Mathieu. Il fait valoir que d'aller travailler dans un environnement de travail agréable, avec un nombre suffisant d'effectifs, sont des aspects de base pour prévenir l'épuisement et améliorer la rétention du personnel.
Dans le réseau de la santé, les absences sont courantes et les établissements n'arrivent pas à combler le manque de personnel, ce qui épuise ceux qui tiennent le fort qui doivent faire du temps supplémentaire obligatoire, indique M. Mathieu. «Que ça arrive une fois de temps en temps, c'est une chose, mais des fois on entend que c'est systémique», raconte-t-il.
Parmi les difficultés découlant des conditions de travail, la plus souvent rapportée par les participants était le manque de personnel, suivies des lourdes charges de travail, une rémunération inadéquate et l'épuisement professionnel.
Le sondage Indeed a été réalisé en ligne du 24 janvier au 3 février 2025 auprès de 1600 professionnels de la santé à travers le pays, dont un échantillon de 300 personnes au Québec. La marge d’erreur est estimée à plus ou moins 2,72 %.
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Katrine Desautels, La Presse Canadienne