S'afficher comme un allié des personnes LGBTQ+ pour contrer l'intolérance

MONTRÉAL — Face à une montée des discours haineux à l'égard de la diversité sexuelle, la Fondation Émergence lance une campagne pour mobiliser les alliés des communautés LGBTQ+ en vue de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie.

S'intitulant «L'effet allié», la campagne cherche à créer un mouvement «où les alliés deviennent plus visibles» devant un recul des droits des personnes LGBTQ+, observé ici comme ailleurs, explique le directeur général de la Fondation Émergence, Laurent Breault.

L'initiative vise à rappeler que «chaque geste compte, chaque voix peut faire la différence» pour tenter de renverser la tendance.

«C'est de prendre conscience qu'il n'y a pas de petits gestes anodins quand on est un allié. Ça peut être de réagir à des propos homophobes, s'informer, participer à des événements, faire un don. Il y a toutes sortes de choses qu'une personne alliée peut faire», soutient M. Breault en entrevue.

Dans les luttes pour reconnaître les droits des personnes LGBTQ+, les alliés ont joué un rôle crucial, souligne M. Breault.

D’après des sondages menés par Léger pour le compte de la Fondation Émergence, il y a 58 % des Canadiens «qui se disent plutôt sympathiques, mais discrets ou indifférents» pour défendre les communautés LGBTQ+, relate M. Breault.

C’est ce dernier bassin de l’opinion publique que l’organisme souhaite mobiliser par l’entremise de sa campagne. «Parce qu'on sait que, plus l'on parle des réalités LGBT et qu'on explique notre situation, (plus) les gens développent de l'empathie et comprennent au final nos enjeux», mentionne-t-il.

Selon la Fondation Émergence, celles qui ont des personnes LGBTQ+ dans leur entourage adoptent aussi une perception plus positive de leur réalité et se montrent davantage prêtes à intervenir face à des propos ou gestes irrespectueux.

Un allié peut être une personne hétérosexuelle et cisgenre, tout comme des gens issus des communautés LGBTQ+. Il peut aussi s'agir d'entreprises qui font de la formation sur les réalités LGBTQ+ ou qui mettent en place des politiques favorisant un environnement sain pour leurs employés de ces communautés, décrit M. Breault.

«Être allié n'est pas un état de fait. On ne reçoit pas un certificat à la fin d'une longue formation, précise-t-il. C'est un processus quotidien. C'est le cumul des petits gestes au quotidien qui font qu'on est allié.»

La campagne de la Fondation Émergence se déploie notamment à travers le site effetallie.ca, où les gens peuvent contribuer au compteur qui montre le nombre de personnes se déclarant alliées. On y explique aussi les actions que l'on peut poser pour soutenir les communautés LGBTQ+.

Différents articles portant le symbole officiel de la campagne seront également mis en vente.

Une hausse de l'intolérance

L'organisme souligne qu'il y a une hausse de l'intolérance à l'égard des personnes LGBTQ+ un peu partout dans le monde, dont au Canada.

M. Breault cite que le nombre de crimes haineux liés à l'orientation sexuelle au pays a quadruplé entre 2018 et 2023. La Fondation évoque également le rapport du GRIS Montréal, publié en janvier dernier, qui a révélé que le niveau d'inconfort des jeunes Québécois face à l’homosexualité de leur meilleur ami a doublé au cours des dernières années.

Dans ce contexte, est-ce que plusieurs peuvent hésiter à se porter à la défense des personnes LGBTQ+ par peur d'être, à leur tour, la cible de commentaires désobligeants?

«Les alliés peuvent vivre de l'homophobie, de la transphobie et de la lesbophobie par association», reconnaît le directeur général de l'organisme.

«Par contre, je pense que la force du nombre ici est importante, d'où l'idée de notre message où chaque allié compte. Plus les gens vont se manifester, plus je pense qu'ils vont vouloir le faire. Il y a un effet d'entraînement, un effet boule de neige», poursuit-il.

La Fondation entend dévoiler la semaine prochaine une vidéo pour promouvoir la campagne à laquelle ont pris part différentes personnalités publiques.

«Je l'espère fort qu'il y aura un effet d'entraînement», affirme M. Breault.

Une marche citoyenne le 17 mai

La Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie, qui a lieu le 17 mai depuis 2003, aura «une connotation vraiment particulière cette année parce que les reculs sont visibles», estime M. Breault.

«J'ai l'impression que cette année, c'est une édition qui va être particulièrement importante, atypique, parce que là les gens voient déjà les reculs. Puis, je pense que la nécessité est assez évidente de soutenir les droits des personnes LGBTQ+», analyse-t-il.

La Fondation Émergence invite la population à une grande marche citoyenne de solidarité le samedi 17 mai, à Montréal. Le départ est prévu à 14 h au Quartier des spectacles. Les participants doivent parcourir la rue Sainte-Catherine Est sur une distance de 2 km jusque dans le Village.

M. Breault rappelle que cette journée est un «moment de convergence» afin de sensibiliser et informer le grand public sur les réalités des personnes LGBTQ+.

Frédéric Lacroix-Couture, La Presse Canadienne