Stockwell Day soutient un référendum en Alberta, mais met en garde les conservateurs


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — Le mouvement séparatiste albertain représente un danger pour le Parti conservateur fédéral, a affirmé l'ancien député conservateur Stockwell Day.
«Je perdrai des amis en disant cela: cela ne fera que diviser le vote et renforcer la position libérale», a-t-il confié lors d'une entrevue à Edmonton.
Lors des dernières élections fédérales, plus de 1,4 million d'Albertains ont voté pour un candidat conservateur et élu 34 des 143 députés du parti.
M. Day croit qu'une Alberta indépendante et un parti séparatiste semblable au Bloc québécois risqueraient de fragmenter le soutien conservateur.
L'ancien chef de l'Alliance canadienne, qui a également été ministre au sein du cabinet de Stephen Harper de 2006 à 2011, s'est dit «aussi indigné et bouleversé» que les partisans du mouvement séparatiste albertain.
«J'appuie tout ce que les séparatistes disent en matière de droits provinciaux», a-t-il reconnu, ajoutant que la tenue d'un référendum pourrait aider les gens d'autres régions du pays à «comprendre à quel point nous sommes lésés». Le gouvernement de la première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, a présenté un projet de loi plus tôt ce mois-ci pour faciliter le lancement d'un référendum d'initiative citoyenne, y compris un vote sur la séparation du Canada.
Cette loi a suscité une vive opposition de la part des dirigeants autochtones, qui affirment qu'aucun référendum de ce type ne pourrait annuler les traités qui couvrent une grande partie de la province.
Les provinces ne peuvent se séparer unilatéralement du pays. Si un référendum réussissait, il déclencherait des négociations entre la province, le gouvernement fédéral et les groupes des Premières Nations, entre autres.
Des appuis à la souveraineté?
M. Day a soutenu qu'il ne pensait pas que les séparatistes albertains obtiendraient 50 % d'appui lors d'un référendum.
Les résultats d'un sondage publié cette semaine par la firme de sondage Léger lui donnent raison.
Plus de la moitié des Albertains interrogés se sont déclarés opposés à différents scénarios de séparation, s'opposant à 59 % à un pays indépendant composé de l'Alberta, de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan et du Manitoba, à 67 % à l'idée que l'Alberta devienne un pays indépendant.
Puis, 80 % ont rejeté l'idée de devenir un État américain.
Léger a sondé 1000 Albertains entre le 9 et le 12 mai. Aucune marge d'erreur ne peut être attribuée à ce sondage, car les sondages en ligne ne sont pas considérés comme des échantillons véritablement aléatoires.
L'appui à l'indépendance albertaine dans le sondage Léger était le plus faible à Calgary et à Edmonton. Il était plus fort chez les hommes que chez les femmes, suggère le sondage.
M. Day est d'avis que le gouvernement libéral fédéral doit encore écouter les Canadiens de l'Ouest qui estiment ne pas obtenir un accord équitable d'Ottawa.
Il a ajouté que le premier ministre Mark Carney aurait pu se rendre service en nommant davantage d'Albertains à son cabinet.
«Cela aurait pu être un geste si simple, de la part du premier ministre: “Je vous entends”», a-t-il suggéré.
La députée d'Edmonton-Centre, Eleanor Olszewski, a été nommée ministre de la Gestion des urgences et de la Résilience communautaire au sein du cabinet de 28 membres de Carney. Le seul autre député libéral albertain, Corey Hogan de Calgary Confederation, ne fait pas partie du cabinet.
Danielle Smith a répété à maintes reprises que les Albertains étaient frustrés par l'enclavement des ressources naturelles de la province et par le fait que ses exportations de pétrole et de gaz soient vendues presque exclusivement aux États-Unis à prix réduit.
Bien qu'elle ait déclaré ne pas soutenir la séparation du Canada, elle espère négocier avec M. Carney un nouvel accord pour la province.
«Je pense que la première ministre Smith fait ce qu'il faut. Elle est très claire sur les griefs», a souligné M .Day.
Tendre l'oreille à l'Alberta
Il a déclaré que l'Alberta devrait avoir davantage de contrôle sur ses ressources naturelles et ses domaines de compétence provinciale, notamment les soins de santé. Il a ajouté qu'il aimerait que l'industrie pétrolière et gazière obtienne la même reconnaissance du gouvernement fédéral que l'industrie automobile, moteur de l'économie ontarienne.
M. Carney n'est pas le seul à devoir aborder le débat sur le séparatisme avec prudence.
Le chef conservateur Pierre Poilievre, dont le mandat de 21 ans comme député de la région d'Ottawa a pris fin lors des élections du 28 avril, prévoit se présenter à une élection partielle dans une circonscription rurale de l'Alberta plus tard cet été.
M. Poilievre espère représenter la province où il a grandi lors de la session d'automne de la Chambre des communes.
M. Day hésitait à conseiller son ancien collaborateur sur la façon de gérer les préoccupations de ses futurs électeurs.
«C'est un homme très intelligent. C'est un travailleur acharné. Il aime le Canada et c'est son amour et sa ferveur pour le Canada qui, je pense, lui permettront de convaincre, que ce soit son propre gouvernement fédéral un jour ou les libéraux, qu'ils doivent s'attaquer à ces problèmes», a-t-il déclaré.
Il a ajouté qu'il ne voulait pas parier sur l'avenir de l'Alberta au sein du pays, soulignant à quel point le référendum québécois avait été proche d'un succès. Lors du vote de 1995, 50,58 % des Québécois ont voté contre la sortie du Canada.
«Je dis au gouvernement fédéral: ne prenez pas ce risque», a-t-il ajouté. Alors, écoutez-moi maintenant, alors que le séparatisme prend de l'ampleur. Écoutez-moi, car c'est grave. Et œuvrez pour une association plus autonome au sein du Canada.»
Interrogé sur son vote lors d'un référendum sur la séparation, M. Day s'est montré évasif.
«Il faudrait que je voie la question», a-t-il répondu, avant d'ajouter qu'une association plus autonome au sein du Canada «serait idéale».
Sarah Ritchie, La Presse Canadienne