Terre-Neuve-et-Labrador a l'un des taux de faim infantile les plus élevés au pays


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Par La Presse Canadienne, 2024
ST. JOHN'S — L'été approche et les enseignants de Terre-Neuve-et-Labrador craignent que nombre de leurs élèves passent leurs vacances le ventre vide sans programme de repas scolaire.
En 2024, la province était à égalité avec le Nouveau-Brunswick pour le taux le plus élevé d'enfants vivant dans des ménages en situation d'insécurité alimentaire parmi les provinces.
Trent Langdon, président de l'Association des enseignants de Terre-Neuve-et-Labrador, affirme que ses membres en sont les témoins directs.
«Si un jeune arrive à l'école alors qu'il a faim, cela nuit à son moral, cela lui fait perdre son énergie et cela réduit ses chances de se lever, a expliqué M. Langdon en entrevue vendredi. C'est un poids énorme.»
M. Langdon entend parler de plus en plus d'enseignants qui apportent des sandwichs supplémentaires aux élèves qui en ont besoin.
Près de 40 % des enfants de moins de 18 ans à Terre-Neuve-et-Labrador et au Nouveau-Brunswick vivaient dans des ménages en situation d'insécurité alimentaire en 2024, selon un rapport publié ce mois-ci par Proof, un groupe de recherche de l'Université de Toronto. Les chiffres proviennent de données de Statistique Canada et incluent toutes les provinces canadiennes, mais pas les territoires.
Plus d'un quart des Canadiens vivaient dans des ménages en situation d'insécurité alimentaire en 2024, un niveau record, selon le rapport. Terre-Neuve-et-Labrador affichait le troisième taux d'insécurité alimentaire globale le plus élevé parmi les provinces, derrière l'Alberta et la Saskatchewan.
Plus de la moitié des familles monoparentales de la province (56,8 %) étaient en situation d'insécurité alimentaire l'an dernier, selon les données de Statistique Canada utilisées par Proof.
Le groupe définit l'insécurité alimentaire comme «l'accès inadéquat ou précaire à la nourriture en raison de contraintes financières».
«Il s'agit d'un grave problème de santé publique, d'un indicateur de privation matérielle généralisée et d'une question de politique publique», indique le site web de Proof.
Le rapport du groupe a incité Food First Newfoundland and Labrador, un organisme sans but lucratif de lutte contre la pauvreté, à demander au gouvernement provincial de réexaminer ses stratégies de réduction de la pauvreté.
«Ces statistiques ne sont pas surprenantes, mais elles ne sont pas non plus inévitables, a déclaré Josh Smee, directeur général du groupe, dans un communiqué de presse publié plus tôt cette semaine. Les habitants de cette province subissent actuellement une pression énorme pour se procurer la nourriture dont ils ont besoin, et il existe de nombreuses façons d'alléger cette pression.»
Danielle Seward convient qu'il faut agir. La directrice générale de la Single Parent Association of Newfoundland and Labrador a souligné que bon nombre des personnes qui ont recours à la banque alimentaire de son organisme cherchent de l'aide pour la première fois. Nombre d'entre elles sont des professionnels qualifiés occupant de bons emplois, mais dont les loyers et les factures d'électricité ont augmenté, ce qui les prive de beaucoup d'argent pour payer l'épicerie.
«Je pense que beaucoup seraient surpris de constater la grande diversité de nos clients et de constater combien d'entre eux occupent des emplois très prospères, a mentionné Mme Seward en entrevue. Le coût de tout a augmenté de façon exponentielle, contrairement aux revenus de ces professions.»
Une augmentation des taux de soutien du revenu aiderait certains de ses clients, mais pas tous, a-t-elle ajouté.
Le gouvernement provincial doit prendre l'insécurité alimentaire au sérieux et constituer une équipe pour trouver des solutions, a soutenu Mme Seward. Elle a suggéré de commencer par chercher des moyens de réduire le coût de l'épicerie, par exemple en offrant de l'argent pour compenser les frais d'expédition élevés vers l'île de Terre-Neuve et les communautés plus éloignées du Labrador.
Mme Seward s'inquiète également des mois d'été, où les parents n'ont pas de programme de déjeuner ou de dîner sur lequel compter. Il s'agit de l'une des périodes les plus achalandées de l'année à la banque alimentaire de l'association.
«Pour les familles monoparentales, l'été est la période la plus critique en matière d'insécurité alimentaire», a-t-elle indiqué.
Sarah Smellie, La Presse Canadienne