Tsahal tire des coups de semonce près de diplomates canadiens en Cisjordanie


Temps de lecture :
4 minutes
Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — L'armée israélienne a déclaré mercredi regretter la gêne occasionnée par les coups de semonce tirés lors de la visite de diplomates à Jénine, en Cisjordanie.
La ministre des Affaires étrangères du Canada, Anita Anand, a confirmé que quatre Canadiens faisaient partie de cette délégation, qui effectuait une visite dans la ville de Jénine quand l'armée israélienne a ouvert le feu près d'eux.
Une vidéo de l'incident circulant en ligne montre des membres de la délégation en visite s'adressant à des caméras près d'un grand portail jaune. Des coups de feu sont entendus alors que le groupe s'éloigne précipitamment du portail et contourne un coin de rue. Dans une vidéo, on voit deux soldats pointer leurs armes en direction du groupe.
Dans son communiqué, Tsahal a indiqué que le groupe avait dévié de son itinéraire et que les soldats avaient tiré des coups de semonce pour l'obliger à s'éloigner d'une zone qu'ils n'étaient pas autorisés à visiter. Tsahal affirme que personne n'a été blessé lors de l'incident. Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, a tonné sur les réseaux sociaux que la situation était inacceptable et que l'ambassadeur d'Israël en France avait été convoqué pour s'expliquer.
Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a également demandé à l'ambassadeur d'Israël en Italie de s'expliquer sur l'incident.
L'armée israélienne a dit avoir ouvert une enquête sur les faits et s'entretiendra avec les diplomates concernés pour les informer de ses conclusions.
L'ancien diplomate canadien Colin Robertson a rappelé que, lorsque des diplomates se rendent sur une zone de combat pour observer, leur sécurité n'est pas garantie.
«Il se produit des choses qui ne sont certainement pas intentionnelles de la part du gouvernement israélien, mais ce sont des choses qui se sont déjà produites par le passé. Des observateurs canadiens ont été tués, par exemple, lors de nos missions de surveillance de la paix au Vietnam et dans d'autres situations», a-t-il commenté.
M. Robertson a indiqué que, bien qu'il s'agisse d'«incidents graves», il attribue les tirs de mercredi aux conditions de guerre en Cisjordanie.
Israël critiqué par ses alliés
Dans une déclaration commune publiée plus tôt cette semaine, le premier ministre canadien, Mark Carney, son homologue britannique, Keir Starmer, et le président français, Emmanuel Macron, ont menacé d'imposer des «sanctions ciblées» à Israël en réponse à la nouvelle offensive militaire de l'État hébreu dans la bande de Gaza et à la quantité «tout à fait insuffisante» d'aide alimentaire autorisée dans l'enclave.
La lettre affirmait également l'opposition des dirigeants à «toute tentative» d'expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie.
Mardi, le Royaume-Uni a imposé des sanctions contre deux «avant-postes de colons illégaux» et deux organisations «soutenant la violence contre les communautés palestiniennes» en Cisjordanie.
Alors que la Grande-Bretagne a également suspendu les négociations avec Israël sur un nouvel accord commercial, les marchandises continuent de circuler entre les deux pays.
Colin Robertson a dit s'attendre à ce que le Canada publie davantage de déclarations aux côtés de ses alliés européens à l'avenir.
Le premier ministre Carney a déclaré que le Canada devait faire preuve d'autonomie, maintenant que les relations avec les États-Unis se sont détériorées en raison des droits de douane du président américain et des appels à l'annexion du Canada.
Le Canada a déjà sanctionné des personnes et des individus pour des violences commises par des colons extrémistes contre des Palestiniens en Cisjordanie. La dernière vague de sanctions a été annoncée en septembre dernier.
Mercredi, les médias ont demandé au président Trump s'il prévoyait de s'entretenir avec le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, au sujet des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza et de la pression internationale croissante en faveur d'un cessez-le-feu. Il n'a pas répondu à la question.
M. Robertson a confié qu'il serait surpris que les États-Unis n'aient pas été informés à l'avance de la publication de cette lettre conjointe du Canada, du Royaume-Uni et de la France.
«Une grande partie de la politique étrangère, en particulier avec les États-Unis, repose sur le principe de l'absence de surprises, et c'est ce que l'on fait avec ses alliés. On les informe de ce que l'on fait», a expliqué l'ancien diplomate.
«Je pense que le Canada adoptera de plus en plus une approche stratégique et pragmatique en matière de politique étrangère, et ne suivra plus complètement les traces de ce qui a été notre plus proche allié et partenaire, les États-Unis», a-t-il ajouté.
Dans une publication sur les réseaux sociaux publiée tard lundi soir, M. Nétanyahou a accusé les dirigeants du Canada, de la France et du Royaume-Uni d'«offrir [au Hamas] une énorme récompense pour l'attaque génocidaire contre Israël du 7 octobre, tout en incitant à de nouvelles atrocités de ce type».
Le Hamas, classé comme entité terroriste au Canada, a salué la lettre dans un communiqué publié en ligne mardi, soutenant qu'il s'agit d'un «pas important dans la bonne direction».
— Avec des informations de Kelly Geraldine Malone, à Washington
David Baxter, La Presse Canadienne