Une étude relie alimentation, microbiome et santé cardiovasculaire


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Par La Presse Canadienne, 2024
MONTRÉAL — Une alimentation non industrialisée modifie le microbiome intestinal d'une manière qui semble favoriser la santé cardiovasculaire, indique une étude internationale à laquelle ont participé des chercheurs canadiens.
À l'inverse, précisent les auteurs de l'étude, l'alimentation industrialisée riche en aliments transformés et pauvre en fibres ne fournit pas au microbiome intestinal le soutien dont il a besoin, ce qui ouvre la porte à des maladies chroniques.
«L'alimentation moderne est l'un des mécanismes par lequel notre microbiome perd de la diversité, a dit le professeur Jens Walter, qui a pris part à cette étude à l'époque où il était affilié à l'Université de l'Alberta. La composition du microbiome change d'un point de vue fonctionnel, et il devient beaucoup plus malsain.»
Les auteurs de l'étude se sont inspirés de l'alimentation des peuples de Papouasie-Nouvelle-Guinée pour favoriser le développement, dans le microbiome intestinal, de la bactérie bénéfique Limosilactobacillus reuteri.
Des travaux précédents avaient démontré, a dit le professeur Walter, que ces peuples ont un microbiome intestinal beaucoup plus diversifié, riche en bactéries qui se nourrissent de fibres alimentaires et pauvre en bactéries inflammatoires associées à l'alimentation occidentale.
Le régime alimentaire utilisé lors de cette étude (baptisé NiMe) comprenait notamment des fèves, des patates douces, du riz, des concombres, du chou, des pois et des oignons. Il comprenait aussi une petite portion quotidienne de poisson, de poulet ou de porc, mais aucun bœuf, aucun blé et aucun produit laitier.
Trente adultes canadiens en bonne santé ont accepté d'adopter le régime NiMe pendant trois semaines.
Au terme de l'étude, les chercheurs ont constaté une réduction de la quantité de bactéries inflammatoires dans le microbiome intestinal de leurs sujets. Le nouveau régime a aussi été associé à une réduction moyenne de 17 % du taux de «mauvais cholestérol»; à un déclin d'environ 7 % de la glycémie à jeun; et à une chute de 14 % des niveaux de protéine C réactive, un marqueur pour l'inflammation et la maladie cardiovasculaire.
Les participants ont aussi perdu du poids, même s'ils ne consommaient pas moins de calories chaque jour.
«L'étude a duré seulement trois semaines, mais nous avons quand même pu mesurer des améliorations importantes, a dit le professeur Walter. J'ai vraiment été surpris par l'ampleur des effets cliniques et par la perte de poids.»
Il attire aussi l'attention sur l'augmentation d'un métabolite appelé «acide 3-(3 indolyl)-propionique», un antioxydant qui pourrait avoir des propriétés neuroprotectrices. «Ça fournit une explication potentielle aux associations qu'on voit entre l'alimentation, un vieillissement en santé et des maladies comme l'alzheimer et le parkinson», a dit le professeur Walter.
Pris ensemble, estiment les auteurs de l'étude, ces changements réduisent probablement le risque de souffrir de maladies chroniques comme le diabète et les troubles cardiovasculaires.
«Les maladies non transmissibles (MNT) atteignent des proportions épidémiques dans les sociétés industrialisées, une évolution qui s'est produite parallèlement à l'appauvrissement et à l'altération du microbiome intestinal, écrivent-ils. Le mode de vie industrialisé et l'occidentalisation du régime alimentaire prédisposent clairement les humains aux MNT, qui se développent lentement tout au long de la vie.»
Une solution «logique, mais non triviale», poursuivent-ils, consisterait à restaurer le microbiome intestinal pendant que les individus sont encore en bonne santé, «dans le but de réduire les risques de maladies non transmissibles».
«De mon point de vue, a conclu le professeur Walter, ça explique pourquoi l'alimentation non industrialisée est nettement meilleure pour la santé que les aliments industrialisés. Je pense qu'on doit s'intéresser à la manière dont l'alimentation moderne perturbe le microbiome et la santé.»
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical Cell.
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Sur internet:
https://era.library.ualberta.ca/items/54f2849f-fb67-4374-ad00-83f8787b0e2c
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne