Cogeco et Bell sont déboutés par le CRTC qui autorise le 99,5 à diffuser QUB

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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Québecor aura finalement gagné son pari et pourra continuer de diffuser QUB radio sur les ondes de CJPX-FM, le 99,5 FM.
Après près d’un an de délibérations, le CRTC a finalement rejeté la plainte de Cogeco Média et de Bell Média qui cherchaient à faire interdire la diffusion de QUB sur les ondes de CJPX-FM, propriété de Leclerc Communication.
L’arrivée de QUB sur les ondes de la radio conventionnelle, en août 2024, était venue chambarder le monde de la radio dont la porte avait jusque-là été fermée à Québecor par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. L’entreprise de Pierre Karl Péladeau avait tenté dans le passé d’acquérir des stations de radio, mais le CRTC le lui avait toujours interdit en invoquant sa politique sur la diversité des voix selon laquelle «une seule et même personne ne peut pas détenir ou contrôler simultanément une station de radio locale, une station de télévision locale et un journal local desservant le même marché».
La lettre ou l'esprit de la loi
Or, bien que le 99,5 héberge la programmation de QUB radio durant le jour, sur semaine, Québecor ne s’en est jamais porté acquéreur, note le CRTC.
Cogeco Média et Bell Média soutenaient toutefois que cette façon de faire contrevenait à l’esprit de la politique puisque, dans les faits, Québecor se trouve à occuper les trois médias et que ce dernier a un contrôle éditorial et journalistique du contenu d’affaires publiques et d’opinion de la station durant les heures de grande écoute.
Mais le CRTC s’en est plutôt tenu à la lettre de la politique en se basant sur l’entente entre Québecor et Leclerc, entente qui démontre que Québecor n’est ni propriétaire, ni actionnaire et ne siège pas au conseil d’administration de Leclerc. Dans sa décision rendue vendredi, le CRTC précise que «l’acquisition de programmation auprès d’un tiers constitue une pratique établie dans les secteurs de la diffusion télévisuelle et radiophonique. (…) Ce type d’entente ne confère généralement pas le contrôle effectif d’une entreprise de radiodiffusion à un fournisseur de contenu.»
Quant à la question de la propriété mixte, le CRTC note que «Leclerc continue d’exercer le contrôle effectif de la station. Ainsi, Québecor ne détient ni ne contrôle une station de radio locale et ne contrevient pas à la lettre de la politique sur la propriété mixte des médias.» Plus encore, puisque Leclerc produit lui-même ses bulletins de nouvelles et poursuit sa programmation musicale en dehors des heures de grande écoute, le Conseil conclut qu’il contribue à la diversité des voix.
Le CRTC a ouvert «la porte arrière» à Québecor
Cogeco accueille très mal la décision, estimant qu’elle «révèle une incapacité sidérante (du CRTC) à remplir son rôle». En entrevue avec La Presse Canadienne, la présidente de Cogeco Média, Caroline Jamet, s’est dite «consternée par cette décision du CRTC, qui porte vraiment atteinte à l'ensemble de l'écosystème médiatique canadien. On considère que le CRTC a abdiqué son rôle de protecteur de la diversité des voix en permettant une violation flagrante de la réglementation.»
«Québecor, par cette entente-là, passe par la porte arrière pour diffuser son contenu. Et c'est ce que nous dénonçons parce que c'est une entreprise qui n'a pas de licence pour diffuser son contenu et qui le fait par le biais de son entente avec Leclerc.»
Mme Jamet fait valoir qu’il est indispensable de maintenir «un écosystème médiatique sain et diversifié pour faire face à la désinformation croissante». Selon elle, cette décision pourrait permettre à des diffuseurs de prendre n’importe quel contenu. «C'est l'encadrement du contenu qui est en cause aujourd'hui et c'était un précédent qui ouvre une porte qui est dangereuse.»
Cogeco n’a pas encore décidé si cette décision sera portée en appel devant la Cour fédérale, l’instance supérieure qui a autorité sur les décisions du CRTC, mais les propos de sa présidente laissent peu de doutes quant aux intentions de l’entreprise: «C'est sûr que ça ne va pas s'arrêter là. On est en train de prendre connaissance attentivement de cette décision et on pourra vous revenir là-dessus très prochainement.»
Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne