Des baigneurs demandent un accès à la plage de Verdun en hiver

MONTRÉAL — Le matin de la veille du Nouvel An, Mark Nikiforov scie un trou dans l'épaisse couche de glace recouvrant le fleuve Saint-Laurent à Montréal. Il se prépare à y plonger.

Avec des températures avoisinant les -13 °C (et une température ressentie inférieure à -20 °C en raison du refroidissement éolien), M. Nikiforov et une douzaine d'autres personnes se sont déshabillés pour ne garder que leur maillot de bain, leur bonnet et leurs gants, avant de se jeter à l'eau.

«Plus vous le faites, moins vous avez froid», a raconté M. Nikiforov, qui portait un grand chapeau en fourrure et qui est entré dans l'eau en dernier, après avoir supervisé les débutants.

«Pour moi, c'est une activité hivernale qui m'aide à supporter le froid et à me sentir mieux.»

Les plongeons dans la glace sont devenus une tradition hebdomadaire pour lui et les autres membres du Montreal's Polar Bear Club. Cependant, les membres se disent inquiets de se voir interdire l'accès hivernal à la plage de Verdun, où ils se baignent depuis sept ans.

M. Nikiforov affirme que cette plage est l'endroit le plus sûr pour les plongeons, car le courant y est plus lent qu'à d'autres endroits le long du fleuve et le fond est sablonneux avec une descente progressive. Mais l'arrondissement de Verdun a récemment publié un avis rappelant aux citoyens que la plage est fermée à la baignade en hiver et encourageant les gens à signaler les infractions à la police.

«Le fleuve l'hiver, c'est non!», pouvait-on lire dans un message publié le 16 décembre sur la page Facebook de l'arrondissement, soulignant que le courant sous la surface de la glace peut créer des trous invisibles et que l'immersion dans l'eau froide peut entraîner un choc thermique.

«On vous rappelle que la plage est fermée pour la saison hivernale, sans surveillance, et que la baignade y est formellement interdite», peut-on lire dans le message.

Le club de baignade a lancé une pétition demandant à la ville et à l'arrondissement de les rencontrer pour discuter d'un ensemble de règles visant à officialiser leurs plongeons, avec plus de 180 signatures mercredi.

M. Nikiforov précise que le groupe ne demande pas de financement et que ses membres sont prêts à discuter de l'ajout de mesures de sécurité, telles que davantage d'équipements ou à suivre une formation en réanimation cardio-pulmonaire.

Il a soutenu qu'une interdiction d'accès à la plage n'empêcherait pas les gens de se baigner. Il craint plutôt qu'ils le fassent dans d'autres endroits moins sûrs et moins fréquentés.

«Interdire l'accès ne rend pas les choses plus sûres», a-t-il expliqué, soulignant qu'il n'y avait eu aucun incident depuis la création du club.

L'arrondissement de Verdun et la Ville de Montréal n'ont pas répondu à une demande de commentaires, indiquant que les questions des médias ne recevraient de réponse qu'après les fêtes.

Rituel de fin d'année

Les personnes qui se sont présentées mercredi pour se baigner dans le fleuve ont insisté sur le fait que plonger dans l'eau froide leur apportait des bienfaits physiques et mentaux, en plus d'être amusant.

Au son de la musique de Noël diffusée par un haut-parleur, ils se sont tenus debout sur des tapis de yoga pour se déshabiller et ont fait quelques sauts pour s'échauffer. Puis, coiffés de bonnets et gantés, ils se sont glissés dans l'eau, juste à l'extérieur de la zone officielle de la plage de Verdun. Certains ont poussé des cris de joie, d'autres ont fermé les yeux et semblaient méditer.

Claudine Turnbull a raconté que le plongeon du Nouvel An était devenu une sorte de tradition et lui rappelait qu'elle «peut accomplir des choses difficiles».

«C'est supporter quelques minutes d'inconfort pour se préparer au reste de l'année».

Après avoir passé quelques minutes dans l'eau glacée, elle s'est dite «revigorée».

«C'était incroyable, vraiment génial, a-t-elle déclaré. J'ai froid, j'ai un peu mal aux pieds, mais ce n'est pas si pire. Bonne année!»

Ben Kamino a raconté avoir déjà fait un plongeon, mais jamais lorsque la température ressentie était inférieure à -20 °C. Il a décidé de se joindre au groupe après avoir essayé de se baigner seul et constaté que la glace était trop épaisse pour être sciée.

Pour lui, le plongeon du Nouvel An est chargé de symbolisme. «C'est la dernière baignade de l'année, a-t-il expliqué. C'est un peu comme si on lavait l'année écoulée pour commencer la nouvelle année avec fraîcheur et renouveau.»

Morgan Lowrie, La Presse Canadienne