Des notes étaient prêtes pour Trudeau si Kamala Harris était devenue présidente


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Par La Presse Canadienne, 2025
OTTAWA — L'ex-premier ministre Justin Trudeau avait reçu des directives claires sur ce qu'il devait dire s'il avait eu à appeler Kamala Harris pour la féliciter d'être devenue présidente des États-Unis, l'an dernier.
Ses conseillers lui ont suggéré de rappeler à Mme Harris leur dernière rencontre, lors d'une conférence en Pennsylvanie quelques mois plus tôt.
«Lorsque nous nous sommes rencontrés à Philadelphie, vous avez dit que la campagne serait "extrêmement difficile", mais que vous gagneriez – vous aviez tellement raison! Vous avez mené une campagne remarquable!», aurait mentionné M. Trudeau à Mme Harris si elle était devenue la première femme à diriger les États-Unis.
Les notes préparées en prévision de l'appel suggéraient également à M. Trudeau de dire à Mme Harris qu'il était heureux de travailler sur «toutes les priorités que nous partageons, notamment les droits des femmes, le droit à l'avortement, les changements climatiques et l'environnement».
«Nous attendons avec impatience de vous accueillir au Canada dès que possible!»
Ces notes n'ont bien sûr pas été nécessaires, car Donald Trump a remporté l'élection présidentielle américaine de 2024, obtenant ainsi un second mandat — il avait aussi été président de 2016 à 2020.
Cependant, les notes et les documents connexes obtenus par La Presse Canadienne grâce à la Loi sur l'accès à l'information montrent que les responsables fédéraux étaient prêts à accueillir la victoire de l'un ou l'autre des candidats.
Ils donnent également un aperçu d'un scénario politique alternatif qui ne s'est jamais concrétisé pour le Canada et les États-Unis.
Similitudes et différences
Un communiqué de presse rédigé par le cabinet du premier ministre en prévision d'une éventuelle victoire de Mme Harris, candidate démocrate d'origine afro-américaine et sud-asiatique, qualifiait cette victoire d'«historique, qui encouragera davantage de femmes – y compris les femmes racialisées – à se présenter aux élections et qui fera tomber les barrières bien au-delà des urnes».
Les notes de discours rédigées pour un appel téléphonique de M. Trudeau à M. Trump couvraient certains des mêmes points que ceux d'une conversation avec Mme Harris, notamment les efforts pour parvenir à la paix au Moyen-Orient et l'alignement d'Ottawa sur Washington concernant l'accord commercial entre le Canada, les États-Unis et le Mexique.
Toutefois, les notes destinées à la conversation avec M. Trump décrivaient le pacte commercial continental comme «un héritage remarquable de votre dernière présidence».
Elles suggéraient également à M. Trudeau d'exprimer son désir de travailler avec le président élu sur les pipelines et les lignes de transport transfrontaliers, ainsi que sur le renforcement des chaînes d'approvisionnement afin de réduire la dépendance vis-à-vis des États hostiles.
Les points de discussion ne faisaient aucune mention des droits des femmes ou de l'environnement, et rien ne suggérait que M. Trudeau et M. Trump devraient se rencontrer en personne.
Sécurité économique
Quelques semaines seulement après l'élection, M. Trudeau s'est rendu à un dîner à la résidence Mar-a-Lago de M. Trump en Floride, après que le président élu a menacé d'imposer des droits de douane sur les marchandises en provenance du Canada et du Mexique. M. Trump a soutenu que ces pays pouvaient éviter ces droits de douane s'ils prenaient des mesures pour empêcher les migrants et les drogues illicites, telles que le fentanyl, d'entrer aux États-Unis.
Lors du dîner, M. Trump a proposé que le Canada devienne le 51e État, une provocation qu'il répétera à plusieurs reprises au cours des mois suivants.
Peu après sa visite en Floride, M. Trudeau a fait valoir que la défaite de Mme Harris illustrait que les droits et les progrès des femmes sont menacés.
Une fois en poste comme 47e président des États-Unis, Donald Trump a frappé le Canada d'une avalanche de droits de douane, notamment sur les produits en acier et en aluminium et les automobiles.
Une section consacrée à l'économie et au commerce dans les notes pour un éventuel appel entre M. Trudeau et M. Trump prédisait avec justesse que la sécurité économique serait une question prioritaire pour l'administration Trump.
«Le Canada doit s'attendre à une administration plus repliée sur elle-même, protectionniste, transactionnelle et moins attachée aux structures fondées sur des règles», peut-on lire dans les notes.
«Cela présente à la fois des risques et des opportunités pour le Canada. En réponse, nous devrons démontrer que nous sommes un partenaire prêt à prendre des décisions difficiles pour protéger le marché intégré nord-américain et défendre nos intérêts.»
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Les documents obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information étaient à l'origine en anglais et ont été traduits par La Presse Canadienne.
Jim Bronskill, La Presse Canadienne