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La liste des nouveaux grands projets bénéficie d'un certain soutien des Autochtones

durée 08h38
14 novembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Par La Presse Canadienne, 2025

OTTAWA — Après une première série de dossiers soumis au nouveau Bureau des grands projets, au cours de laquelle aucun projet dirigé par des Autochtones n'a été retenu, la deuxième liste comprend des projets bénéficiant du soutien, de la propriété ou du financement des Autochtones, notamment un projet de gaz naturel liquéfié (GNL).

Parmi les projets visés par une procédure d'approbation accélérée figurent la mine de nickel de Crawford en Ontario, le projet de GNL de Ksi Lisims sur la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique, ainsi que la ligne de transport d’électricité de la côte nord, qui alimentera des projets dans la région, dont l'usine de GNL de Ksi Lisims.

Un projet hydroélectrique à Iqaluit, la mine Nouveau Monde Gaphite à Matawinie, au Québec, et la mine de tungstène de Sisson, au Nouveau-Brunswick, sont également en lice pour une procédure d'approbation accélérée.

S'exprimant à Terrace, en Colombie-Britannique, jeudi, le premier ministre Mark Carney a indiqué que ces nouveaux projets représentent 56 milliards $ d'investissements.

La loi fédérale sur les grands projets, adoptée cet été, permet au cabinet d'accorder rapidement les approbations fédérales pour les grands projets industriels qu'il juge d'intérêt national, notamment en contournant les lois existantes.

La loi a mené à la création du Bureau des grands projets, auquel les projets peuvent être soumis pour approbation, et d'un conseil consultatif autochtone chargé de conseiller le Bureau et d'intégrer la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones à son processus décisionnel.

Ce conseil était une promesse faite par le gouvernement aux dirigeants autochtones en réponse aux protestations suscitées par la loi. De nombreuses communautés autochtones avaient averti que la loi pourrait porter atteinte à leurs droits et autoriser des projets sans consultation équitable.

L'annonce de jeudi présente la liste des premiers projets soumis au Bureau depuis la création de ce conseil.

Des réactions divisées sur les projets

Le projet de GNL Ksi Lisims, une installation flottante d'exportation et un gazoduc traversant le nord de la province, sera construit sur le territoire de la Première Nation Nisga'a, en Colombie-Britannique, et bénéficie du soutien de cette dernière.

Selon M. Carney, ce projet sera l'un des plus propres au monde, avec des émissions inférieures de 94 % à la moyenne mondiale, et contribuera de 4 milliards $ par année au PIB du pays.

Les promoteurs américains Rockies LNG et Western LNG affirment que le projet aura une capacité de production de 12 millions de tonnes de GNL par an, destinées à l'exportation vers l'Asie.

Deux Premières Nations de la Colombie-Britannique ont déjà intenté une action en justice pour s'opposer au projet Ksi Lisims. M. Carney a déclaré que le gouvernement fédéral mettait sur la table un «financement important» afin d'encourager la participation des Autochtones au capital des projets.

«Le fait de mentionner le Bureau des grands projets (BGP) ne signifie pas que le projet est approuvé. Cela signifie que le gouvernement fédéral déploie tous les efforts nécessaires pour créer les conditions propices à son avancement. Mais ces décisions sont prises par de nombreuses parties, notamment par les Premières Nations», a affirmé M. Carney, lorsqu'on lui a demandé pourquoi il poursuivait le projet malgré cette opposition.

Na’Moks, chef héréditaire Wet’suwet’en, était présent à l'extérieur lors de l'annonce de M. Carney jeudi, disant être venu soutenir ses «proches» qui luttent contre le projet Ksi Lisims et la ligne de transport d'électricité.

Le chef Na’Moks a joué un rôle clé dans les manifestations contre le gazoduc Coastal GasLink dans le nord de la Colombie-Britannique. Ces manifestations ont mené à des blocages ferroviaires par des Autochtones à l’échelle nationale juste avant la pandémie.

Le projet de sulfure de nickel de Crawford, en Ontario, soutenu par la Canadian Nickel Company, a établi des partenariats avec trois Premières Nations de la région, offrant ainsi des possibilités d’affaires et d’emploi à leurs membres.

L’entente signée plus tôt cette année par l’entreprise avec les Premières Nations de Matachewan, de Mattagami et de Flying Post offre à ces communautés des possibilités de contrats, notamment pour la construction d’une ligne de chemin de fer.

«Cet accord démontre la force de la collaboration et notre capacité à négocier des opportunités concrètes lorsque les droits des Premières Nations sont respectés», a soutenu Jason Batise, directeur général et négociateur en chef du Conseil tribal Wabun, lors de la signature de l’entente.

Série d'ententes avec les Premières Nations

La Nunavut Nukkiksautiit Corporation, une entreprise énergétique inuite, a vu son projet hydroélectrique d’Iqaluit Nukkiksautiit ajouté à la liste.

Cette centrale, qui serait construite près d'Iqaluit, au Nunavut, serait une centrale hydroélectrique d'une puissance de 15 à 30 mégawatts et viserait à réduire la dépendance de la région à l'égard de l'électricité produite par des centrales diesel.

Harry Flaherty, président et chef de la direction de la Nunavut Nukkiksautiit Corporation, a déclaré dans un communiqué de presse que le renvoi du projet «démontre que les Nunavummiut sont essentiels à l'économie canadienne et que les Inuits, unis, peuvent prendre leur avenir en main».

La mine Sisson, proposée par Northcliff Resources au Nouveau-Brunswick, vise à extraire des métaux critiques destinés aux marchés nord-américain, européen et asiatique.

En 2017, le gouvernement provincial a signé des ententes de partage des revenus et des profits générés par la mine avec six Premières Nations Wolastoqey.

L'accord prévoyait que les Premières Nations recevraient une part des recettes provinciales générées par la taxe sur les minéraux métalliques: 3 millions $ après l'approbation environnementale fédérale, 35 % des 2 premiers millions $ de redevances perçues par le gouvernement chaque année, et 3,5 % une fois cet objectif atteint.

Au Québec, Nouveau Monde Graphite a signé une entente sur les répercussions et les avantages avec la Première Nation Atikamekw pour une mine située dans la région de Lanaudière, dont la production prévue est de 106 000 tonnes par année.

En septembre, le gouvernement a annoncé la première série de renvois de projets au Bureau des grands projets.

Jusqu'à présent, aucun projet n'a reçu la désignation d'«intérêt national», ce qui lui conférerait un traitement spécial, comme des exemptions à certaines lois environnementales, afin de faciliter son avancement. Ces lois comprennent la Loi sur les pêches, la Loi sur les espèces en péril et la Loi sur l'évaluation d'impact.

Une fois renvoyé au Bureau des grands projets, un projet y est examiné et des recommandations sont soumises au gouvernement, qui a le dernier mot quant à l'octroi ou non de la désignation d'intérêt national.

Tout au long de l'été, le premier ministre Carney a rencontré des chefs des Premières Nations, des Métis et des Inuits après que ceux-ci l'eurent accusé de ne pas les avoir consultés lors de l'élaboration du projet de loi sur les grands projets.

Bien que les réactions des chefs à ces rencontres aient été mitigées, elles ont néanmoins permis d'apaiser les tensions qui menaçaient de s'exacerber après l'adoption du projet de loi. Les chefs avaient mis en garde contre d'importantes manifestations et occupations en raison de la réalisation de projets sans leur consentement.

Cindy Woodhouse Nepinak, cheffe nationale de l'Assemblée des Premières Nations, s'était initialement opposée avec véhémence au projet de loi, mais elle insiste désormais sur la nécessité de consulter adéquatement les Premières Nations avant la mise en œuvre de tout projet.

La Fédération des Métis du Manitoba, représentant les Métis de la rivière Rouge, a appuyé le projet de loi dès le départ, mais a déploré le manque de consultation avant son dépôt.

Natan Obed, qui dirige l'organisation nationale inuite Inuit Tapiriit Kanatami, a reproché au gouvernement de ne pas respecter les droits des peuples autochtones lors des débats sur le projet de loi et a également souligné l'importance de la consultation ainsi que de la participation des Inuits à tout grand projet sur leurs territoires.

— Avec des informations de Nick Murray et de Nono Shen

Alessia Passafiume, La Presse Canadienne

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