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La tarification du carbone industriel serait au cœur du plan climatique de Carney

durée 19h59
28 octobre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

OTTAWA — Des défenseurs de l'environnement affirment que les consultations du gouvernement fédéral en vue de la publication de sa stratégie de compétitivité climatique la semaine prochaine ont notamment porté sur l'intégration de la tarification du carbone industriel au cœur du nouveau plan.

Deux hauts placés de groupes nationaux de défense de l'environnement, qui ont rencontré les ministres fédéraux chargés de l'élaboration du plan ces dernières semaines, affirment que cette consultation et l'engagement environnemental du premier ministre Mark Carney pendant la campagne électorale les confortent dans l'idée que le gouvernement prévoit des changements majeurs à la politique.

Ils ont requis l'anonymat en raison du caractère privé des rencontres avec le gouvernement. Tous deux ont déclaré à La Presse Canadienne que M. Carney avait accordé une attention particulière à la stratégie.

Le premier ministre promet une stratégie de compétitivité climatique depuis des semaines. Dans un discours prononcé le 22 octobre, il a annoncé que cette politique serait intégrée au budget fédéral du 4 novembre.

S'adressant à La Presse Canadienne mardi, la ministre de l'Environnement, Julie Dabrusin, a refusé de divulguer les détails de la stratégie climatique du gouvernement, puisqu'elle fait partie du budget fédéral.

Mme Dabrusin a affirmé que ses consultations auprès de groupes environnementaux et de dirigeants de l'industrie avaient mis en évidence l'importance d'une politique sur le carbone industriel qui offre aux investisseurs une certaine sécurité tout en réduisant les émissions.

«Je peux affirmer que la tarification du carbone industriel est un élément clé de la lutte contre les changements climatiques et, parallèlement, de la construction de l'économie de demain», a-t-elle déclaré.

Changer de cap

La stratégie de compétitivité climatique devrait marquer un tournant dans l'approche canadienne en matière de politique climatique.

M. Carney a dit que son approche privilégie les résultats aux objectifs d'émissions et met l'accent sur l'économie. Lui et ses ministres ont récemment évité les questions concernant le maintien de l'engagement du gouvernement à l'égard de ses objectifs de réduction des émissions.

Plusieurs rapports récents indiquent que le Canada est loin d'être en voie d'atteindre son objectif de 2030 dans le cadre de l'Accord de Paris sur le climat, qui engage le Canada à réduire ses émissions d'au moins 40 % par rapport aux niveaux de 2005. Cet objectif n'est pas juridiquement contraignant.

Lors de la course à la direction du Parti libéral, M. Carney a fait campagne sur la promesse d'éliminer la tarification du carbone pour les consommateurs tout en renforçant et en élargissant la taxe payée par les grands émetteurs industriels, comme les producteurs de sables bitumineux, les compagnies générant de l'électricité à partir de combustibles fossiles et les usines.

Sa première action officielle en tant que premier ministre, en mars, a été de mettre fin à la taxe sur le carbone des consommateurs. Il n'a toujours rien fait concernant la tarification industrielle.

Le gouvernement libéral a instauré les deux volets il y a six ans: les consommateurs, les petites entreprises et les organismes sans but lucratif paient le coût par tonne sur tous les achats de combustibles fossiles, et les grands émetteurs le paient sur une partie de leurs émissions réelles.

Un rapport de l'Institut canadien du climat publié en 2024 a révélé que la tarification du carbone à la consommation avait un impact moindre sur les émissions en comparaison à la tarification appliquée aux grands émetteurs industriels. Le système de tarification pour les industries représentait environ 80 % des réductions totales d'émissions attribuables à la tarification du carbone.

Une des sources interrogées par La Presse Canadienne a affirmé que le gouvernement s'inquiétait de la perception qu'aura le public de la tarification du carbone industriel dans le cadre d'une nouvelle stratégie climatique, compte tenu du manque d'appui de la population à l'égard de la tarification du carbone à la consommation.

Mme Dabrusin n'a pas voulu dire si elle s'inquiétait à ce sujet.

«Les Canadiens constatent que les changements climatiques et les phénomènes météorologiques extrêmes ont des répercussions en temps réel sur leurs collectivités, a-t-elle déclaré. Je pense donc que mon rôle consiste à trouver une voie à suivre qui rassemble les Canadiens. Et c'est ce qu'ils souhaitent. J'ai donc bon espoir.»

L'autre source a affirmé qu'il était difficile d'imaginer le gouvernement mettre en œuvre une stratégie visant à vendre de l'énergie aux pays appliquant des politiques de tarification du carbone sans prendre de mesures concrètes concernant sa politique de tarification du carbone industriel. M. Carney a déclaré vouloir doubler le volume des exportations vers des pays autres que les États-Unis au cours de la prochaine décennie.

Approche des provinces

La plupart des provinces et territoires ont leurs propres systèmes de tarification du carbone industriel, qui nécessitent l'approbation du gouvernement fédéral, conformément à la norme d'Ottawa. Si une province ou un territoire ne respecte pas les exigences minimales d'Ottawa, le gouvernement fédéral peut imposer son propre système.

L'Alberta et la Saskatchewan ont toutes deux contesté le gouvernement fédéral sur cette question.

Le mois dernier, l'Alberta a proposé des modifications à son programme de tarification du carbone industriel. Ces modifications permettraient aux entreprises d'éviter de payer les frais provinciaux sur les émissions en investissant dans leurs propres projets climatiques.

Elle a également proposé de permettre aux petites entreprises n'atteignant pas le seuil minimal d'émissions du programme de se retirer du système de tarification du carbone pour 2025.

La Saskatchewan a suspendu complètement son programme de tarification du carbone industriel le 1er avril. Le gouvernement fédéral n'a pas indiqué son intention d'activer le filet de sécurité fédéral pour l'une ou l'autre des provinces.

La première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, a déclaré il y a trois semaines qu'elle était ouverte à l'ajustement de certains aspects du programme de tarification du carbone industriel de l'Alberta, alors que la province discute avec Ottawa de la construction d'un nouvel oléoduc vers la côte de la Colombie-Britannique.

Interrogée sur la question de savoir si Ottawa retardait son implication dans le projet en raison de changements à venir à sa propre politique, Mme Dabrusin s'est contentée de dire que le gouvernement discute avec toutes les provinces.

«Nous menons de nombreuses discussions actives avec toutes les provinces sur la manière d'atteindre nos objectifs, a-t-elle soutenu. Pour l'instant, il s'agit avant tout de dialoguer. Si nous voulons tracer une voie commune, il est essentiel de veiller à dialoguer et à collaborer avec les provinces et les territoires sur toutes nos politiques.»

Nick Murray, La Presse Canadienne

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