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Le Canada et le Mexique signeront un accord de partenariat stratégique

durée 04h00
18 septembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

OTTAWA — Le premier ministre Mark Carney devrait signer un accord de partenariat stratégique avec la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum lors de sa visite au Mexique, qui commence jeudi.

L'accord portera sur les infrastructures, le commerce, la santé, l'agriculture, la préparation aux situations d'urgence et la sécurité, selon de hauts responsables gouvernementaux.

La visite de deux jours de M. Carney à Mexico intervient alors qu'Ottawa cherche à accroître ses échanges commerciaux avec le Mexique en réponse à la guerre commerciale menée par les États-Unis, et que les deux pays se préparent à la renégociation de l'accord commercial continental liant les trois économies.

Elle fait suite à un voyage effectué en août au Mexique par la ministre des Affaires étrangères, Anita Anand, et le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, pour discuter de croissance économique, de sécurité et de commerce. Ils étaient accompagnés d'une délégation de chefs d'entreprise canadiens et mexicains.

De hauts responsables gouvernementaux ont indiqué que M. Carney et Mme Sheinbaum participeront jeudi à une rencontre individuelle, suivie d'un dîner de travail avec Mme Anand, le ministre du Commerce canado-américain, Dominic LeBlanc, et la secrétaire parlementaire de M. Carney, Rachel Bendayan.

Cette réunion portera sur la collaboration entre le Canada et le Mexique pour lutter contre le trafic de drogue et d'armes à feu, ainsi que d'autres activités liées au crime organisé.

M. Carney et Mme Sheinbaum devraient également discuter de la coopération en matière de sécurité, dans le but d'établir une communication et une collaboration régulières entre les deux pays.

Concurrents ou amis?

Solange Márquez, experte en diplomatie et en gouvernance mondiale, est professeure à l'Université nationale autonome du Mexique et à l'Université de Toronto. Elle a avancé que le Mexique et le Canada étaient désireux de reconstruire leurs relations avec les États-Unis et qu'ils avaient récemment manifesté peu d'intérêt pour leur relation bilatérale.

«Nous nous considérons davantage comme des concurrents que comme des amis. Les deux pays cherchent à pénétrer le marché américain et à nouer des relations plus amicales avec la Maison-Blanche», a-t-elle indiqué.

Cela est particulièrement vrai pour le secteur automobile, qui joue un rôle important dans l'économie des deux pays, a-t-elle ajouté. L'administration du président américain Donald Trump tente d'attirer davantage de production automobile aux États-Unis en imposant des droits de douane sur le Canada et le Mexique.

Le Mexique a également pris note des propos virulents tenus par le Canada après que Donald Trump a accusé les deux pays d'avoir fermé les yeux sur le trafic de fentanyl l'année dernière.

Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, avait affirmé en novembre dernier que «nous comparer au Mexique est la chose la plus insultante que j'aie jamais entendue», tandis que le premier ministre de l'époque, Justin Trudeau, avait exprimé ses inquiétudes concernant les investissements chinois dans les chaînes d'approvisionnement mexicaines.

Mme Sheinbaum avait répliqué quelques jours plus tard, affirmant que son pays «doit être respecté, en particulier par ses partenaires commerciaux» et que le Canada «ne pourrait que souhaiter avoir la richesse culturelle du Mexique».

Selon Mme Márquez, le Mexique avait initialement été contrarié par ces déclarations, mais «c'est du passé». Elle a ajouté que M. Carney est perçu au Mexique comme un facteur de renforcement des relations et de respect du gouvernement de Mme Sheinbaum.

«Pour Mme Sheinbaum, la relation est complètement différente de celle qu'elle entretenait avec M. Trudeau, a souligné Mme Márquez. Ils se comprennent très bien.»

De hauts fonctionnaires du gouvernement ont acquiescé, affirmant que la relation est «positive» depuis l'arrivée de M. Carney au pouvoir. Ils ont également souligné l'objectif commun des deux chefs d'État : accroître la production nationale et renforcer la résilience de leurs économies.

Des objectifs clairs à définir

D'après Mme Márquez, les deux dirigeants doivent encore s'asseoir à la table des négociations avec des objectifs clairs, notamment garantir l'unité du Mexique et du Canada à l'approche de la renégociation de l'accord commercial Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM).

Donald Trump pourrait tenter de les diviser afin d'obtenir un meilleur accord pour son pays, a-t-elle rappelé.

Le chef conservateur Pierre Poilievre a accusé le mois dernier les libéraux de ne pas avoir réussi à conclure un accord commercial bilatéral avec le Mexique. Or, le gouvernement Carney affirme n'avoir jamais cherché à conclure un accord bilatéral avec le Mexique excluant les États-Unis.

Interrogé sur l'origine de l'idée de M. Poilievre, son cabinet a expliqué que Mme Sheinbaum avait été interrogée par les médias locaux sur sa volonté de conclure un accord bilatéral avec le Canada.

Lorsqu'on lui a demandé la semaine dernière si elle et M. Carney discuteraient de la renégociation imminente de l'accord commercial Canada-États-Unis-Mexique, Mme Sheinbaum a souligné que le Mexique et le Canada s'engagent dans de nombreux échanges commerciaux et investissements bilatéraux.

Elle a déclaré mercredi, lors d'une conférence de presse, que la visite de M. Carney ne visait pas à affaiblir l'alliance continentale.

«Les trois pays souhaitent maintenir (l'accord commercial), mais nous souhaitons renforcer les échanges commerciaux avec le Canada», a-t-elle expliqué. Elle a ajouté que le Mexique souhaite également que les sociétés minières canadiennes se conforment davantage à la réglementation environnementale mexicaine.

Ottawa affirme que les relations commerciales bilatérales se développent, évoquant près de 56 milliards $ d'échanges bilatéraux de marchandises en 2024 et 46,4 milliards $ d'investissements directs au Mexique.

Mme Márquez a indiqué que le premier ministre passerait beaucoup de temps au Palais national, ce qui laisse entendre qu'il prend le temps nécessaire pour négocier et comprendre la position du Mexique.

Mme Sheinbaum a fait savoir qu'elle comptait travailler avec M. Carney sur «divers thèmes», notamment «le renforcement des échanges commerciaux maritimes et portuaires».

Bien qu'ils aient tous deux une expérience en politique climatique — Mme Sheinbaum en tant que climatologue et M. Carney en tant qu'ancien envoyé spécial pour le climat auprès des Nations unies —, Mme Márquez ne s'attend pas à ce que le changement climatique soit un sujet majeur de leurs rencontres.

L'énergie pourrait être à l'ordre du jour, a estimé Mme Márquez, soulignant que le Mexique comprend l'importance des énergies renouvelables et de l'exploitation minière.

Mme Sheinbaum tente également de gérer ses relations avec la Chine après avoir récemment annoncé des droits de douane sur les voitures et autres biens chinois en réponse aux pressions américaines. Des analystes ont noté que le Mexique n'avait pas immédiatement obtenu gain de cause auprès de Washington après l'annonce de cette mesure.

Le Canada, le Mexique et les États-Unis n'ont pas organisé de sommet des dirigeants nord-américains depuis celui de janvier 2023 à Mexico.

Ottawa devait accueillir l'événement — communément appelé le sommet des Trois Amigos — en 2024, mais il a été mis de côté par les élections aux États-Unis et au Mexique, ainsi que par les troubles politiques auxquels Justin Trudeau était confronté à l'époque.

De hauts fonctionnaires du gouvernement ont déclaré mercredi qu'ils ne prévoyaient pas d'organiser un autre sommet pour le moment, invoquant un manque d'intérêt de la part des trois pays.

Alessia Passafiume et Dylan Robertson, La Presse Canadienne

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