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Le marché de l'emploi est moins accessible pour les jeunes, selon Desjardins

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4 septembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2025

OTTAWA — Un nouveau rapport soutient que l'essor du travail à la tâche, l'intelligence artificielle et la croissance démographique rapide assombrissent les perspectives d'emploi des jeunes travailleurs canadiens.

Le rapport de Desjardins, publié jeudi, survient alors que le chef conservateur Pierre Poilievre invoque des taux de chômage particulièrement élevés chez les jeunes pour critiquer un programme d'immigration de travailleurs étrangers temporaires.

La dernière enquête sur la population active de Statistique Canada indique que le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans a atteint 14,6 % en juillet, un sommet de près de 15 ans hors pandémie de COVID-19.

Le rapport de Desjardins indique que la récente hausse du chômage chez les jeunes est plus typique des récessions.

En examinant de plus près la cohorte des jeunes, Statistique Canada a indiqué que les élèves de 15 et 16 ans de retour à l'école étaient confrontés à un taux de chômage de 31,4 % en juillet, soit le pic du marché des emplois d'été.

Kari Norman, économiste et auteure du rapport chez Desjardins, a dit constater le stress causé par la difficulté du marché du travail d'été dans son entourage.

«J'ai vu mes propres enfants et les enfants de mes amis avoir du mal à trouver un emploi d'été, un stage coopératif ou autre», a-t-elle déclaré.

Mercredi, M. Poilievre a qualifié les jeunes Canadiens de «génération fauchée» en raison de leur manque de possibilités d'emploi. Il a reproché au Programme des travailleurs étrangers temporaires d'Ottawa de concurrencer les jeunes pour les rares postes disponibles et a appelé les libéraux à l'abolir.

Le premier ministre Mark Carney a affirmé mercredi qu'il était déterminé à réduire l'immigration, mais qu'il n'abolirait pas les programmes des travailleurs étrangers temporaires, citant le soutien des provinces à cette initiative. Il a ouvert la porte à de nouveaux ajustements au plan d'immigration global du Canada.

LJ Valencia, autre auteur du rapport Desjardins, a indiqué qu'une grande partie de la situation actuelle remonte à la reprise post-pandémie de COVID-19, lorsque les entreprises étaient avides de main-d'œuvre et qu'Ottawa avait accéléré l'afflux de travailleurs étrangers et assoupli les restrictions imposées aux étudiants internationaux pour répondre à la demande.

«Les possibilités d'emploi diminuent parce que l'économie ne peut pas suivre la croissance démographique observée ces dernières années», a-t-il expliqué. Mais Desjardins constate également que ce sont ces jeunes étudiants internationaux, ou les enfants de travailleurs récemment arrivés et désormais en âge d'intégrer le marché du travail, qui peinent davantage à trouver un emploi aujourd'hui que ceux nés au Canada.

Le gouvernement libéral a mis en place des plans pour ralentir la croissance démographique et limiter le nombre de résidents non permanents dans les années à venir.

Les économistes de Desjardins affirment que ces objectifs, s'ils sont atteints, contribueraient à rééquilibrer l'offre et la demande sur le marché du travail des jeunes.

«Réduire le nombre de jeunes en resserrant l'immigration, tant pour les étudiants internationaux que pour les autres nouveaux arrivants, devrait atténuer quelque peu le choc et aider les jeunes encore ici à trouver les emplois disponibles pour cette tranche d'âge», a suggéré Mme Norman.

Mais d'autres aspects de l'économie moderne concourent également à exercer une pression sur les jeunes travailleurs.

L'essor de l'économie à la demande – un travail basé sur des applications et souvent précaire – s'accompagne d'obstacles visant les plus jeunes travailleurs, souligne Desjardins dans le rapport.

L'IA, un obstacle aux emplois de premier échelon

Les restrictions d'âge sur ces applications peuvent limiter la participation aux personnes de 18 ans et plus. Par conséquent, explique Mme Norman, les jeunes qui étaient auparavant rémunérés pour des tâches ménagères, comme promener les chiens dans leur quartier, pourraient être de plus en plus exclus de cette première expérience professionnelle en raison de la transition numérique.

«Ma plus jeune, en particulier, adorerait trouver un emploi comme promeneuse de chiens, gardienne de chats, ce genre de choses, mais à 16 ans, elle n'y a tout simplement pas droit», raconte-t-elle.

L'essor de l'intelligence artificielle et des applications d'IA générative pourrait également créer un obstacle.

Desjardins cite une étude de l'Université Stanford publiée la semaine dernière, qui révèle que, si les travailleurs américains en âge de travailler ont jusqu'à présent subi peu de perturbations liées à l'IA, les jeunes commencent à subir des pertes d'emploi. M. Valencia soutient que cela pourrait être dû à une diminution des opportunités d'emploi pour les débutants.

Mme Norman donne l'exemple d'un outil d'IA performant pour trouver des études de cas juridiques pour un cabinet d'avocats. Si un cabinet externalise ce type de travail, qu'il confierait normalement à un jeune clerc, cela peut contrecarrer les efforts des futurs avocats pour se faire une place.

La reprise du chômage des jeunes pourrait dépendre de l'évolution future de l'économie, a ajouté M. Valencia.

Alors que l'économie continue de souffrir du poids des droits de douane américains et de l'incertitude commerciale générale, les enquêtes de la Banque du Canada montrent que les entreprises limitent leurs intentions d'embauche.

M. Valencia a indiqué que ces changements ont tendance à avoir un effet marqué sur les jeunes, qui sont souvent les premiers à ressentir une contraction économique de leurs perspectives d'emploi.

Il a ajouté que, si le Canada conclut un nouvel accord commercial avec les États-Unis dans les prochains mois, ou si Ottawa trouve d'autres moyens de rétablir la confiance et d'encourager l'investissement des entreprises, cela pourrait ouvrir de nouvelles perspectives aux jeunes.

Mme Norman a ajouté que, si les jeunes ne parviennent pas à acquérir une expérience professionnelle à l'adolescence, ils pourraient être contraints de financer leurs études postsecondaires uniquement par l'endettement, ce qui compromettrait leurs perspectives financières futures.

Elle a appelé à une réponse coordonnée des gouvernements provinciaux et fédéral pour soutenir la transition des jeunes du secondaire vers le marché du travail, les métiers ou les études supérieures.

«C'est l'avenir de notre main-d'œuvre ici même, a déclaré Mme Valencia. Et si le manque d'opportunités d'emploi et d'évolution de carrière les empêche, ou les freine, cela aura des répercussions structurelles importantes sur l'économie à l'avenir.»

Craig Lord, La Presse Canadienne

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