Un jeu rythmique semble améliorer l'attention et le contrôle inhibiteur des enfants


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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Les enfants qui ont participé à un jeu rythmique sur une tablette ont amélioré leurs habiletés rythmiques ainsi que certaines fonctions exécutives, notamment l’attention et le contrôle inhibiteur, comparativement à un jeu témoin actif, a constaté un chercheur montréalais qui poursuit ses travaux dans une université californienne.
À une époque où on a parfois l’impression qu’une épidémie de TDAH déferle sur nos écoles et que les enfants qui ne prennent pas un petit comprimé le matin sont en minorité, les cours de musique pourraient donc représenter une piste intéressante à explorer pour aider les enfants à mieux fonctionner non seulement en classe, mais dans la société en général.
«Chez les enfants qui ont un TDAH ou des problèmes d'attention, c'est aussi lié à un problème de 'timing', c'est de ne pas pouvoir aligner son mouvement au bon moment, donc l'impulsivité c'est de faire quelque chose au mauvais moment», a expliqué le chercheur Kevin Jamey.
M. Jamey avait fait ses études doctorales à l'Université de Montréal. Il avait à ce moment constaté que l’étude de la musique avait un effet allant de modéré à important sur le contrôle de l’inhibition par les enfants. Cet impact positif a été observé peu importe l’âge de l’enfant, l’intensité de la formation ou la méthode d’enseignement utilisée.
M. Jamey poursuit ses études postdoctorales au Brain & Creativity Institute de l'université Southern California.
Lors de ses plus récents travaux, M. Jamey a évalué la faisabilité d'un programme d'entraînement rythmique chez les enfants souffrant d'un TDAH, puisque les troubles de l'attention sont liés à des déficits rythmiques ― un facteur de risque évoqué de manière plus large dans les troubles neurodéveloppementaux, qui peuvent à leur tour être associés à des déficits dans la fonction exécutive.
Trente et un enfants âgés de 7 à 13 ans et souffrant d'un TDAH ont participé à cette étude. L'expérience a été menée à travers le Canada entre octobre 2021 et mars 2022. Les capacités rythmiques et cognitives de chaque participant ont été évaluées avant et après le programme d'entraînement de deux semaines par le biais de quatre réunions vidéo.
Certains enfants ont participé au jeu rythmique, tandis que d'autres ont participé au jeu actif qui servait de contrôle.
«Nous présentons (...) des preuves que le fonctionnement exécutif s'est amélioré chez ceux qui ont joué (au jeu rythmique), mais pas chez les témoins, écrivent les auteurs. Le jeu (rythmique) s'avère efficace pour améliorer les aptitudes sensorimotrices chez les enfants souffrant de TDAH, ce qui peut être bénéfique pour leur fonctionnement exécutif.»
Une bonne performance lors du jeu rythmique, a dit M. Jamey, exige des enfants qui y participent une concentration importante et la capacité à contrôler leur impulsivité pour taper sur l'écran uniquement lorsque cela est approprié, en respect avec le rythme ou le tempo du jeu.
«La synchronisation des mouvements à des rythmes complexes nécessite d'inhiber les réponses prématurées, de filtrer les sons distrayants et de maintenir un alignement stable des mouvements sur le rythme au fil du temps», expliquent les auteurs.
Les enfants qui avaient participé au jeu rythmique ont ensuite mieux performé lors de tests pendant lesquels ils devaient cliquer uniquement lorsqu'ils voyaient un cercle d'une couleur donnée à l'écran. «Plus les jeunes jouaient au jeu rythmique, plus ils s'amélioraient, et plus ils étaient rapides à obtenir de bonnes réponses», a dit M. Jamey.
«Ils s'amélioraient en termes d'efficacité ou de traitement, surtout au niveau fondamental», a-t-il précisé.
Les chercheurs espèrent que cet «entraînement» au contrôle de l'impulsivité pourrait aider les enfants à mieux fonctionner à l'école et dans leur vie quotidienne, mais cela devra faire l'objet d'autres études.
M. Jamey croit toutefois qu'une telle intervention pourrait un jour être complémentaire à celles qui sont déjà mises en place pour les enfants ayant un TDAH.
Les chercheurs poursuivent actuellement ces travaux avec un volet en neuro-imagerie: le jeu est désormais compatible avec un contrôleur développé à l’Université de Montréal, ce qui permet d’enregistrer l’activité cérébrale pendant le jeu directement à l’intérieur du scanneur IRM. Ceci leur permettra de détecter si le jeu stimule et développe bien les réseaux neuronaux liés au contrôle inhibiteur.
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal «Behavior Research Methods».
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne