La santé mentale du personnel doit être au cœur de l’entreprise du 21e siècle
D’après le psychologue Jean Rochette, directeur du centre d’intégration de la personne à Saint-Georges, la santé mentale est le nouveau défi du monde des affaires du 21e siècle. « L’avenir des entreprises au Québec et partout à travers le monde devra être orienté de plus en plus sur la santé mentale. Il va falloir s’en préoccuper puisque les chiffres sont accablants », croit l’invité du dernier déjeuner Méta-Beauce tenu le 24 janvier à l’Auberge Benedict Arnold.
Avec quelques chiffres à l’appui, M. Rochette a démontré l’urgence d’agir. Selon Statistique Canada, le nombre de journées de maladies prises au Canada chaque semaine est de 500 000. Encore plus alarmant, à Saint-Georges seulement, il estime que 1500 nouveaux cas de burn-out ou de dépression sévère d’ici le 31 décembre prochain. « Je ne fais pas de sensationnalisme, je suis membre de l’ordre. Il faut que j’utilise les chiffres reconnus scientifiquement, c’est environ 5 % de la population », estime M. Rochette.
Au Québec, les problèmes psychologiques sont en croissance. Les indemnisations salariales allouées par la Commission de santé et sécurité au travail (CSST) pour des problèmes psychologiques en 1995 étaient de 4,4 millions $. Dix ans plus tard, elles s’élèvent à 12 millions $. Près de 82 % des absences de courtes durées sont dues pour des raisons de stress et santé mentale et 72 % pour des absences prolongées.
Dans l’ensemble du Canada pour les entreprises de 250 employés et plus, en terme de productivité, 5,4 % de la masse salariale. « Quand on pense que les entreprises du Québec qui font plus d’un million de dollars de chiffre d’affaires doivent investir 1 % en formation. Il pourrait investir 1 % en santé mentale et il en sauverait 4,4 %. Ça peut être payant d’investir en santé mentale », pense M. Rochette.
« Inscrire la santé psychologique du personnel au cœur du plan d’affaires sera le défi de demain pour demeurer compétitif », cite M. Rochette.
Employés trop stressés
Le psychologue se base sur une étude de la firme, Watson et Wyatt pour indiquer que même les employés toujours en poste dans les entreprises ne produisent pas à leur plein rendement. Cette étude démontre que 25 % des employés d’une grande entreprise ne produisent pas comme ils devraient au travail parce qu’ils sont trop épuisés, au bout du rouleau et trop stressés.
Le stress et le manque d’équilibre travail-vie sont les deux raisons pour lesquelles un employé pourrait démissionner alors que les employeurs croient encore que c’est le salaire et sous-estiment ces deux facteurs. « C’est très dommage. Il va falloir y arriver un jour », pense le psychologue.
Parmi les sources de stress au travail, on trouve la surcharge au travail, le manque d’autonomie, le manque de conciliation travail-vie, les conflits et le manque de reconnaissance.
Les employeurs devront ainsi reconnaître qu’il deviendra de plus en plus difficile de recruter le personnel qualifié sans de bonnes conditions de travail. « Ce sera les employés qui feront passer l’entrevue aux employeurs. Le tout se jouera sur les conditions de travail », pense M. Rochette.
Trois erreurs de la civilisation
Selon M. Rochette, l’être humain a commis trois erreurs de civilisation. La première, il a oublié comment fonctionnait l’être humain; la deuxième, on ne peut pas faire plus avec moins puis la troisième, le mythe de la qualité totale. « Il n’y a aucun être humain de parfait. D’ailleurs, faire des erreurs est dans la définition de l’être humain. C’est correct d’en faire », croit M. Rochette.
Ces trois erreurs dites de civilisations poussent bien des gens à la dépression et même parfois au suicide s’ils ne vont pas chercher de l’aide auprès de professionnels. Près de 80 % des hommes passent à l’acte. De plus, la région est troisième à ce niveau en province, un fait toujours très inquiétant selon lui. Il a donc prié les personnes présentes surtout les hommes qui hésitent trop longtemps avant d’appeler à l’aide.
Votre vie à un compte bancaire
Il a comparé l’énergie humaine à un compte bancaire. Plus on puise dans la marge de crédit plus on a de chance de faire faillite. Les gens doivent vivre avec l’argent qu’il a. toutefois, le même constat se fait avec l’énergie humaine. Elle est peut-être renouvelable aux 24 heures, mais si l’on puise toute la marge de crédit, ce sera la dépression à coup sûr selon le psychologue. « On peut tenir le coup longtemps et autrement : mais quand la marge de crédit est épuisée, quand la machine ne suit plus, quand quelque chose ne va plus. Il faut aller chercher de l’aide », pense-t-il.
Quête d’un sens et l’équilibre
D’après M. Rochette, les gens doivent comprendre les rôles et l’être afin d’atteindre un équilibre et avoir un sens à leur vie. L’être a parfois le rôle du travail, partenaire, conjoint, père ou mère, bénévole ou autre rôle. Il ne peut pas passer le plus clair de son temps au travail puisqu’il oublie l’être et tous ses autres rôles.
Le plaisir infini!
Si ces personnes n’arrivent pas à trouver un sens ou sont épuisées. Celles-ci iront consulter, et M. Rochette souligne que le psy dira : «Félicitations, vous faites une dépression! Pourquoi félicitations, parce que désormais et enfin, il faudra vous occuper de vous, vous faire plaisir et vous centrer sur votre être. Et pour la première fois, de votre vie, vous allez vivre le plaisir infini.»
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