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Démolition du château Beauce : un sursis d'au moins 90 jours

durée 17h02
22 octobre 2018
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Alexandre Poulin
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Par Alexandre Poulin, Journaliste

La vie du château Beauce sera prolongée temporairement. Menacé de destruction depuis plusieurs mois, l'édifice construit en 1903, et qui est situé au 102, rue Notre-Dame Sud, à Sainte-Marie, a attiré l'attention de la nouvelle ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy.

À peine nommée le 18 octobre dernier, la nouvelle ministre a signé, la journée même de sa nomination, un avis d'intention de classement pour que le bâtiment figure dans les catégories  « immeuble patrimonial » et « site patrimonial ». C'est le propriétaire de l'immeuble, la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches, qui a reçu cet avis.

« L'avis d'intention qui a été transmis par la ministre de la Culture et des Communications, c'est le premier pas vers le classement. Lorsqu'on vérifie dans la Loi sur le patrimoine culturel, l'avis d'intention est obligatoire pour débuter une démarche de classement en bonne et due forme », raconte à EnBeauce.com Charles Breton-Demeule, avocat. Il est un des deux hommes qui ont demandé au ministère d'annuler la décision prise par le conseil municipal de Sainte-Marie, soit celle qui a autorisé la démolition de l'immeuble centenaire.

En vertu de la Loi sur le patrimoine culturel, le ministre a le pouvoir de « classer en tout ou en partie tout bien patrimonial dont la connaissance, la protection, la mise en valeur ou la transmission présente un intérêt public ».

« Pour nous, c'est très positif, parce que c'est un pas dans la bonne direction. Ce qu'on pense, c'est que le Château Beauce est un bien patrimonial qui a une valeur nationale et qu'à ce titre, il doit être classé par l'avis », poursuit Breton-Demeule, qui est également candidat à la maîtrise en droit à l'Université Laval.

« On va faire avec l'avis », indique le propriétaire

Si Charles Breton-Demeule se réjouit de la signature de l'avis d'intention de classement, la réaction n'est pas la même pour la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches, qui acquis l'immeuble en avril 2015. Au bout du fil, la directrice générale, Sonia Nadeau, n'affiche pas le même enthousiasme que les défenseurs du patrimoine.

Les Oblates de Béthanie, qui ont quitté Sainte-Marie en 2014, ont donné le château Beauce à la Société l'année suivante. Lorsque celle-ci a mis la main sur le joyau architectural, elle avait l'intention de le convertir en résidence pour personnes ayant des troubles cognitifs. Pour effectuer les travaux nécessaires au projet de conversion du bâtiment, la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches a lancé une campagne de financement, mais qui n'a pas porté ses fruits. 

« Nos rêves n'ont pas pu devenir réalité, mentionne Mme Nadeau. On aurait voulu préserver l'immeuble, mais à un moment donné il a fallu se rendre à l'évidence. »

Selon la directrice générale, il en coûterait un peu plus de quatre millions de dollars pour que l'immeuble soit conforme aux différentes normes. Des sorties de secours et des gicleurs devaient être ajoutés, notamment, pour la mise en oeuvre du projet de conversion. En matière de consommation d'électricité, Mme Nadeau indique que les frais de chauffage s'élèvent à 77 000 $ par année. N'ayant pas reçu les fonds nécessaires, la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches n'a eu d'autre choix que de se résigner à vendre l'immeuble. À l'heure actuelle, elle en est toujours le propriétaire.

« On va faire avec l'avis, conclut-elle. Je ne suis pas certaine que d'autres voudront se porter acquéreurs. »

Effacer l'histoire par des logements de haut de gamme

Conçue à l'origine pour l'homme d'affaires Georges-Siméon Théberge et le notaire Ernest Larue, son associé, cette résidence est sérieusement menacée de disparaître depuis que le conseil municipal de Sainte-Marie a adopté à l'unanimité une résolution autorisant sa démolition. Avant que les élus municipaux aient à se prononcer, il fallait que le projet de démolition soit étudié par le Comité consultatif d'urbanisme. Le 27 août dernier, ce comité a recommandé la démolition du château Beauce.

Dans la résolution, il est écrit que c'est la firme Gestion TRI inc. « qui souhaite démolir le bâtiment actuel pour y implanter la construction d'une habitation multifamiliale ». En effet, le promoteur du projet, Yvan Roy, souhaite la destruction de cet édifice afin d'y construire deux immeubles contenant chacun 24 logements. En tout, 48 logements haut de gamme remplaceraient ce qui fut la demeure des Soeurs missionnaires de l'Immaculée-Conception et des Oblates de Béthanie. Ce projet de 10 millions de dollars prévoit aussi l'accès à un stationnement intérieur pour les futurs locataires. Précisons que le projet de Gestion TRI inc. est complètement distinct de celui de la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches.

Fait à noter, le promoteur de ce projet, Yvan Roy, est également l'un des deux hommes d'affaires qui ont acquis les maisons de la 1re Avenue Est, à Saint-Georges, qui seront détruites afin d'ériger un ou deux édifices à vocation commerciale et résidentielle. Ces maisons, situées en face de Place Centre-Ville, ont été construites entre 1895 et 1940. La première a été réduite en poussière il y a moins d'un mois.

Bien qu'il se soit montré déçu à l'idée de voir disparaître l'oeuvre de Jean-Omer Marchand, le maire de Sainte-Marie, Gaétan Vachon, qui est également préfet de la MRC de La Nouvelle-Beauce, avait déclaré au Devoir : « Ça a de l’histoire. Mais un moment donné, faut avancer. »

Pour mettre en contexte l'importance architecturale du Château Beauce sur le plan national, il faut dire que son concepteur, J.-O. Marchand, a été le premier architecte québécois à recevoir un diplôme de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris. Les Québécois lui doivent la prison de Bordeaux, la Cour municipale de Montréal, l'actuel consulat de Russie (anciennement la résidence de Rodolphe Forget) et la chapelle du Grand Séminaire de Montréal. Au Canada, il a eu son mot à dire dans la conception du Parlement.

De vives oppositions

Dès les jours suivant cette décision du conseil municipal, les oppositions se sont manifestées à l'échelle du Québec. Charles Breton-Demeule et Guillaume Saint-Jean, dont le premier est avocat et le deuxième urbaniste, ont écrit à l'ex-ministre de la Culture et des Communications, Marie Monpetit, afin que la décision du conseil municipal de Sainte-Marie soit annulée. Dans les eaux du 20 septembre, le ministère avait signé un avis pour que les travaux soient suspendus durant 30 jours. Cette période devait servir à faire une « analyse de la valeur patrimoniale » du bâtiment. 

Durant cette période, tant les médias régionaux que ceux qui ont une vocation nationale, dont Le Devoir et Radio-Canada, ont fait éclore cette histoire au grand jour. Dans nos pages, le petit-fils de l'architecte du Château Beauce faisait paraître une lettre d'opinion dans laquelle il s'adressait directement au maire de Sainte-Marie. Entre autres choses, il lui avait posé cette question : « Votre patrimoine est-il si riche que vous puissiez sacrifier une oeuvre de cette importance ?  Permettez-moi d'en douter. »

La destruction mise à l'écart pour un certain temps

Ceux qui s'opposent à la destruction du château Beauce connaîtront un début de satisfaction. À tout le moins, leur indignation sera amoindrie. En raison de l'avis d'intention de classement qui a été signé le 18 octobre, la procédure mentionne qu'en pareille circonstance « le bien doit être traité comme s'il était déjà classé ».

Pour l'heure, la balle est dans le camp du Conseil du patrimoine culturel, qui doit donner sa recommandation à la ministre. Dans l'éventualité d'une réponse positive, la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy, pourra classer le bien dans un délai de 90 jours à un an suivant la transmission de l'avis d'intention. Il s'agit d'une histoire qui, si on se on fie aux délais prescrits, aura un dénouement entre le 15 janvier et le 18 octobre 2019.

Joint par EnBeauce.com, le bureau du maire de Sainte-Marie, Gaétan Vachon, a indiqué que celui-ci ne souhaite pas faire de commentaires.

 

 

 

 

 

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  • AP
    Anita Poulin
    temps Il y a 5 ans
    J'ai assisté cet après-midi à une conférence sur le patrimoine dans le cadre du salon des sociétés d'histoires de la ville de Québec. Il a été beaucoup question de ce très bel édifice. Étant native de la Beauce et ma grand-mère étant originaire de Sainte-Marie, je me suis sentie particulièrement concernée. D'autant plus que j'ai souvent pensé à m'installer dans cette municipalité. Je crois que les Beaucerons, toujours débrouillards, réussiront à conserver ce joyau de notre patrimoine. Ce serait tellement triste et un peu humiliant autrement.

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