Pier Dutil
Ce qui devait arriver...arriva

Par Pier Dutil
Dans ma toute première chronique de 2025, en parlant de Donald Trump et d’Elon Musk, j’écrivais : «Il y a rarement suffisamment de place pour deux requins dans un même aquarium.»
Il aura suffi d’à peine six mois pour que les deux énergumènes aux ego surdimensionnés me donnent raison en se querellant sur la place publique via leurs réseaux sociaux respectifs comme des ados intimidateurs dans une cour d’école.
La goutte qui a fait déborder le vase
Alors que, pas plus tard que la semaine précédente, Donald Trump et Elon Musk se retrouvaient dans le Bureau ovale et s’échangeaient les compliments à savoir lequel était meilleur que l’autre, Donald Trump est même allé jusqu’à offrir à son grand ami une clé en or symbolique de la Maison-Blanche, le remerciant pour ses services. À peine une semaine plus tard, voilà les deux mêmes individus en train de s’invectiver.
Que s’est-il passé? Tout simplement une intervention d’Elon Musk qui a critiqué une loi budgétaire de Donald Trump qui prévoit de fortes dépenses supplémentaires en défense, des coupes dans l’aide sociale affectant des dizaines de millions d’Américains parmi les plus vulnérables et d’importantes baisses d’impôts pour les mieux nantis pour ne mentionner que ces points.
Donald Trump qualifie ce projet de loi de : «One Big Beautiful Bill Act» (le beau et grand projet de loi). Elon Musk parle plutôt «… d’abomination répugnante» et demande aux membres du Sénat américain : «Tuez ce projet de loi.» On est loin de la belle harmonie qui régnait entre les deux hommes au cours des 135 premiers jours de l’arrivée au pouvoir de Donald Trump.
Ce qi a choqué Musk dans ce projet de loi, c’est que, si le projet est finalement adopté, cela aura pour effet d’accroître la dette du Gouvernement américain de 2 400 milliards de dollars
(2 400 G US$) au cours des 10 prochaines années. Cela alors que Trump avait confié à Musk le mandat de couper dans les dépenses de l’État pour réduire les déficits annuels et la dette.
Les couteaux volent bas
À partir de ce désaccord, les deux adversaires se sont mis à s’invectiver sur leurs réseaux sociaux respectifs «Truth Social» pour Trump et «X» pour Musk.
Trump affirme que Musk est «devenu fou», Musk prétend que le nom de Trump figure sur la liste des dossiers de Jeffrey Epstein, l’accusé de crimes sexuels qui se serait suicidé dans sa cellule de prison en 2021.
Aux accusations suivent les menaces. Trump avance qu’il pourrait mettre fin à tous les contrats que le Gouvernement américain et la NASA ont confié aux entreprises de Musk, même si seulement les vaisseaux spatiaux de SpaceX sont capables de transporter des astronautes et des approvisionnements entre la terre et la Station spatiale internationale.
De son côté, Musk menace les élus républicains de les faire battre lors des élections de mi-mandat en novembre 2026, avançant même l’idée de créer un nouveau parti qui diviserait le vote et nuirait aux Républicains au point de leur faire perdre leurs majorités au Congrès. Rappelons que Musk a dépensé plus de 250 M US$ lors de la dernière campagne électorale à la Présidence américaine, ce qui lui a permis d’affirmer : «Sans moi, Trump aurait perdu.»
Trump y est même allé de propos grossiers à l’égard de Musk lors de la visite du Chancelier allemand, Friedrich Merz dans le Bureau ovale. Pas très joli de se quereller ainsi devant un visiteur étranger.
Je pourrais continuer à énumérer encore longtemps les propos déplacés que continuent de s’échanger Trump et Musk, mais cela n’ajouterait rien à la situation.
Une réconciliation improbable
Une réconciliation entre ces deux grands anciens amis paraît improbable. Dans les deux cas, on est allé très loin. Une bataille de rue entre l’homme le plus puissant au monde, Donald Trump, et l’homme le plus riche au monde, Elon Musk, ne peut que laisser des blessures difficiles à cicatriser.
Mais, rien ne pourrait plus me surprendre quand il est question de Donald Trump. Ce dernier n’est intéressé que par le pouvoir et l’argent. Alors, advenant une trêve dans la guerre de mots entre les deux belligérants, trêve susceptible de rapporter à Trump de la gloire et des dollars, ce dernier pourrait facilement renier tous ses propos à l’égard de Musk.
N’oublions pas qu’il y a seulement quelques semaines, Trump qualifiait Musk de «Super Génie» et Musk déclarait : «J’aime Donald Trump autant qu’un homme hétérosexuel peut en aimer un autre.» C’est pas beau ça?
Des dommages collatéraux
Si cette bataille de coqs entre deux puissants se limitaient à des échanges de bêtises dans un bureau fermé, cela serait déplorable, mais les impacts seraient limités.
Or, présentement, cette querelle sur la place publique, face au monde entier, ne contribue pas à redorer le blason des deux hommes.
On se demande ce qui se passe au Gouvernement américain pendant que le Président est occupé à s’engueuler avec son ancien ami. Et, d’autre part, les actionnaires des entreprises d’Elon Musk, qui ont vu la valeur de leurs actions chuter dangereusement, s’inquiètent à savoir si leur dirigeant a encore suffisamment de temps à consacrer à la gestion de ses entreprises.
D’un côté comme de l’autre, cette stupide chicane ne fait que des perdants.
Courage
Il ne reste que 1 330 jours au mandat de Donald Trump.
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Pensée de la semaine
Cette semaine, je choisis de dédier à Trump et Musk deux pensées pour le prix d’une :
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