Coupable de contacts sexuels
Mathieu Doyon-Boucher connaîtra sa sentence le 11 décembre
Reconnu coupable de contacts sexuels sur deux jeunes enfants, Mathieu Doyon-Boucher était de retour en cour ce jeudi pour l’audience sur la détermination de la peine qu’il connaîtra le 11 décembre prochain.
L’homme qui a aujourd’hui 20 ans avait été arrêté le 7 mai 2021, puis reconnu coupable le 2 mars dernier de deux chefs d’accusation de contacts sexuels avec deux garçons de moins de seize ans.
Ainsi, l’accusation et la défense avaient à présenter leurs recommandations respectives au juge Thomas Jacques.
La procureure Me Veilleux a commencé en expliquant que les garçons qui ont été victime de Mathieu Doyon-Boucher ont encore aujourd’hui, deux ans plus tard, des séquelles importantes. Elle précise entre autres que l’un d’eux a maintenant des comportements sexualisés, il commet des gestes qu’il ne faisait pas avant et il est devenu très pudique en dehors de ses parents. Elle a également souligné que les parents sont des victimes collatérales qui se posent beaucoup de questions quant à l’avenir de leur enfant, qu’ils ressentent de la colère, de la tristesse et de la frustration. En ce sens, elle a appelé le père de l’une des victimes à témoigner à la barre.
Le témoignage poignant d’un père
Il a alors lu une longue lettre écrite lors d’une insomnie il y a deux ou trois semaines. « Les victimes sont plus nombreuses. Il y a celles dont les témoignages n'ont pas été retenus pour le procès, ainsi que les parents de tous ces enfants-là. »
L’homme, avec la gorge nouée par les émotions, raconte qu’il avait l’habitude de prendre son fils dans ses bras et de lui dire qu’il était alors coincé dans la machine à câlins. Dans ses souvenirs, l’enfant riait et c’était un moment privilégié entre père et fils. Aujourd’hui, ce moment à une toute autre saveur alors que le petit garçon cherche à se débattre et montre des signes de peur.
La peur s’est justement emparée de cette famille. La mère, quant à elle, a très peur qu’un homme, parfois même de confiance, s’approche de son jeune fils. Elle n’a plus confiance en aucun homme, selon ce qu’explique le père dans sa lettre.
Le juge a alors remercié le témoin pour avoir fait preuve de courage en venant s’exprimer devant la cour.
L’accusé à la barre
Pour la suite de la procédure, Mathieu Doyon-Boucher est venu témoigner à son tour. Le résident de Saint-Georges, a émis des regrets et a mentionné qu’il souhaitait se faire aider. « Je sais que nombreux sont ceux qui ont dû vous le dire avant moi, monsieur le juge, mais si je pouvais revenir en arrière et effacer ce qu’il s’est passé, je le ferais! » Il a présenté ses excuses aux familles, cependant son visage ne traduisait aucune émotion.
Il a aussi expliqué à la cour qu’il a suivi quelques thérapies à Québec et entrepris des démarches qu’il a finalement arrêtées faute d’argent. C’était en 2021.
Enfin, les expertises indiquent qu’il a lui-même été victime d’abus sexuels lorsqu’il était plus jeune. Ce qu’il a confirmé devant le juge.
La procureure Me Veilleux a ensuite pris la relève. Elle a rappelé quelques informations du témoignage de l’accusé, notamment le fait que ce dernier a arrêté les thérapies pour faute d’argent en 2021, que cela fait deux ans et qu’il ne s’est rien passé en ce sens depuis lors et qu’il a mentionné avoir acheté une voiture neuve récemment.
Elle repart alors du rapport présentenciel et de l’évaluation spécialisée en délinquance sexuelle qui ont été rédigés sur ce dossier. Elle soupçonne que l'accusé nie l’intention sexuelle et minimise les conséquences de ses actes. « - Comment vous vous sentiez au moment de poser ces gestes-là ? - Bizarre. - Pourquoi vous avez fait ça? - C’étaient des pulsions », ont-ils échangé.
Me Veilleux aborde ensuite une première accusation qui avait été réglée en interne à la garderie où se sont déroulés les faits et où travaillait monsieur Doyon-Boucher à cette période. « Pourquoi rester à la garderie ? » s’interroge la procureure puisque l’accusé savait qu’il ressentait des pulsions et il est pourtant resté dans ce milieu à risque pour lui. « J’avais peur de décevoir mes parents », a répondu Mathieu qui est le fils de la propriétaire de la garderie concernée.
Après une courte pause, Me Veilleux a conclu avec deux questions :
« - Est-ce qu'il y en a eu d'autres (des victimes) ?
Non.
Si on vous place avec des enfants maintenant, est-ce qu’il y a un risque ?
Oui. »
Plaidoiries de l’accusation
Subséquemment, l’avocate de Mathieu Doyon-Boucher, Me Perron, a suggéré au juge Thomas Jacques, une peine d’emprisonnement d’environ trois ans, une inscription au registre des délinquants sexuels pour 20 ans et un allègement de l’interdiction de se tenir en présence de personnes de moins de 16 ans s’il est accompagné d’une personne qui a connaissance des présentes accusations.
Pour sa défense, elle a soulevé l’immaturité de l’accusé qui avait tout juste 18 ans au moment des faits, son honnêteté puisqu’il a toujours avoué sa culpabilité, sa volonté à se faire aider ainsi que l’absence d’antécédents judiciaires. Elle rappelle aussi que lui-même a été victime lorsqu’il était jeune et comme il n’en avait pas parlé, il n’a pas pu obtenir l’aide nécessaire.
« Je pense qu'il est temps que monsieur se voit tenu de régler sa situation pour ne plus que ça se présente devant vous », a-t-elle indiqué au juge.
Plaidoiries de la défense
Quant à elle, Me Veilleux demande à ce que le juge impose une peine de 4 à 5 ans d’emprisonnement, que l’accusé soit inscrit au registre des délinquants sexuels à perpétuité et estime qu'aucun arrangement ne doit être fait concernant l’interdiction d’être en présence de personnes de moins de 16 ans.
« Je me questionne sur les réelles motivations de monsieur parce qu’entre ce qu’il nous dit et ce qu’il fait c’est différent. Il aurait dû le faire avant s'il voulait vraiment faire quelque chose. »
Dans sa présentation, la procureure met en avant le pouvoir d’autorité qu’avait l’accusé alors qu’il était éducateur dans la garderie où se sont produits les faits, ainsi que la figure de confiance qu’il représentait alors pour les enfants. Selon elle, les crimes sexuels contre les enfants doivent être considérés plus graves que sur les adultes.
Me Veilleux aborde ensuite le comportement de l’accusé après les faits, son manque de volonté pour aller mieux, le risque de récidive important dont Mathieu à lui-même fait l’aveu, ainsi que l’âge des enfants qui rend l’entière responsabilité morale de la situation à l’accusé.
En réponse à l’argumentation de Me Perron, la procureure estime que les 18 ans de Mathieu ne sont pas un facteur atténuant, au contraire. En effet, il travaillait déjà à la garderie depuis quelque temps et c’est son passage à la majorité qui lui a permis d’obtenir le poste d’éducateur et d’être avec les enfants.
En conclusion, les facteurs aggravants qu’elle mentionne sont notamment que les faits ont eu lieu à plusieurs reprises, qu’il avait une position d’autorité, l’âge des enfants, les conséquences de ces actes et l’important risque de récidive.
Aussi, dans l’un des rapports, la sexologue indique que Mathieu Doyon-Boucher a un trouble pédophile exclusif avec les garçons.
Le juge Thomas Jacques prendra donc le temps de la réflexion et il rendra sa décision le 11 décembre prochain, au palais de justice de Saint-Joseph-de-Beauce.
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