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Billet 2 de 3: la drogue c'est mal (ou comment j'ai vécu la pire journée de ma vie!)

durée 10h27
21 décembre 2015
duréeTemps de lecture 4 minutes
Par
Julie DeBlois

NDLR: Julie DeBlois a appris en octobre dernier qu’elle était atteinte d’un cancer du col de l’utérus de type « Adénocarcinome », soit une forme agressive de la maladie. Puisque celle-ci a accepté de partager son expérience au quotidien face à cette maladie, EnBeauce.com diffuse l'intégralité de ses textes dans la section Blogues.

Le lendemain de l'opération [ le 11 décembre, tout s'est très bien déroulé après un bon déjeuner complet, incluant les 4 groupes alimentaires. La preuve sur la photo), j'ai fait quelques pas jusqu'au fauteuil et m'y suis installée quelques minutes. Il faut dire que ça prend des techniques pour se déplacer, s'asseoir et se lever étant donné que je n'ai plus vraiment de muscles d'abdomen inférieur et que j'ai une plaie fragile. Mais on trouve ses propres façons de faire!

Donc, ce vendredi-là, tout allait comme sur des roulettes. Je voyais les prochains jours à l'hôpital du bon oeil!

12 décembre

Cette journée-là, je vais m'en rappeler longtemps [même si, honnêtement, je préférerais l'oublier!!].

Je dois vous donner un peu de contexte. Lorsque je me suis éveillée à la suite de l'opération, on m'avait installé un cathéter pour m'injecter moi-même les antidouleurs au besoin à l'aide d'un bouton-poussoir. J'avais donc le contrôle sur la quantité et la fréquence des injections de médicaments.

Mauvaise idée.

TRÈS mauvaise idée.

Car je l'ai utilisé de façon, disons... un peu trop obsessive. Dès que je sentais une parcelle de douleur, je ne prenais pas de chance, le bouton se faisait aller! Je n'ai jamais attendu de voir quel genre de douleur que j'avais, ni de quelle intensité elle aurait été si je l'avais laissée se pointer. J'avais peur d'avoir mal et je me disais : bah. Pourquoi avoir le moindre mal? Une petite « shot » et c'est réglé, on n'y pense plus!

Ouin.... et bien j'ai frappé un mur le samedi matin. Je n'avais pas dormi de la nuit, car j'avais maintenant une nouvelle coloc qui elle, était branchée à un bruyant appareil pour l'aider à s'oxygéner. Oubliez les bras de Morphée, je ne m'y suis jamais retrouvée!

Je me suis mise à me sentir un peu nauséeuse et lorsque l'infirmière est venue à 7 h me donner mes 3 Tylénol, mon corps m'a littéralement défendu de les prendre. Le message était plus que clair : il n'y avait pas un iota de ma personne qui désirait un tant soit peu ces médicaments. C'était terminé. Je ne toucherais plus au bouton d'antidouleur, et je ne prendrais plus une seule Tylénol [d'ailleurs, je n'en ai toujours pas pris depuis et en effet, je n'ai jamais retouché au bouton!].

La journée a été cauchemardesque!!

Je levais à peine le dossier de mon lit, de quelques degrés seulement, et les nausées s'emparaient de moi.

C'était IN.SU.POR.TA.BLE.

Dès que je parlais, j'avais des haut-le-coeur [croyez-moi, je ne parlais pas fort!!]

Dès que quelqu'un me parlait, la concentration que cela me demandait me donnait le tournis!

Et ne me parlez pas de l'arrivée de mes plateaux de déjeuner, dîner et souper [car oui, cela a duré toute la journée!]. Beurk!!!

Je n'ai jamais vécu une expérience aussi épouvantable quant à mon état de santé.

JAMAIS.

C'était insoutenable, je n'arrivais même pas à visualiser quelque chose de positif, d'agréable [au diable les pensées positives, j'étais rendue bien trop bas dans mon esprit pour trouver quoi que ce soit!].

J'écris tout cela et j'ai l'impression de le revivre. J'en ai presque le tournis!

Je me suis retrouvée si dépourvue, si impuissante! En plus, j'avais un de ces maux de dos étant donné que ça faisait des jours que j'étais couchée. Je n'avais pas de position. Et je ne pouvais même pas m'asseoir étant donné les nausées. Et ma mère et mon beau-père qui étaient là, également impuissants, me mettant une débarbouillette d'eau froide sur le front [ce qui soulageait temporairement].

J'ai atteint le plus bas que j'ai vécu dans ma vie du côté de ma santé.

Je sais, il y a beaucoup de gens qui vivent bien pire, et sur une bien plus longue journée! Mais pour moi, c'était le summum. J'en ai pleuré d'impuissance. De découragement. Je ne voyais plus le bout de cette histoire. C'était la noirceur. Jamais je n'avais vécu ça.

On a fini par me donner des Gravols en intraveineux qui m'ont complètement assommé [oui, ça, mon corps était OK pour le prendre!]. J'ai dormi un bon 2 heures pour me réveiller en bien meilleure condition. Mon corps était encore très intoxiqué de tous ces médicaments, mais au moins, j'avais retrouvé mes esprits, je sentais la faim et bonne nouvelle : je pouvais m'asseoir dans mon lit [je suis même allée marcher dans le corridor!!].

Vous rappelez-vous de votre journée du 12 décembre? Il faisait un temps absolument magnifique. Le ciel était bleu mur à mur. Et je me souviens d'avoir pensé : « dire qu'il y a des gens dehors qui prennent une belle marche dans le Vieux, qui dégustent un repas dans un de ces petits restaurants de la rue St-Jean, qui sirotent un café, qui prennent du soleil.... »

Peu importe ce que vous faisiez, soyez-en reconnaissants. Dites-vous que chaque minute de santé qui vous est offerte est un cadeau de la vie. Et je dis bien « UN CADEAU ». Ce n'est PAS ACQUIS.

Je sais qu'on sait tout cela.

Mais cette journée-là, ça m'a frappé tellement fort.

Rien n'est acquis.

La vie n'est pas acquise.

Notre santé n'est pas acquise.

Et on ne sait pas quand le vent changera de direction.

Pour connaître la suite de l'histoire dans l'ordre chronologique, consultez les textes à partir du bas de page dans le blogue“Face au cancer: la vie selon Julie” (ici).

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