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La bravoure des lâches

durée 18h00
2 décembre 2019
duréeTemps de lecture 4 minutes
Par
Pier Dutil

 

LA BRAVOURE DES LÂCHES

 

La semaine dernière, la députée de Sherbrooke à l’Assemblée nationale, Christine Labrie, a donné un échantillon de commentaires haineux reçus par elle et d’autres députées via les réseaux sociaux disponibles sur Internet.

 

Je vous préviens à l’avance, les messages haineux qui suivent n’ont rien d’édifiant pour la race humaine. Je n’aurais jamais cru utiliser de tels citations dans l’une de mes chroniques, mais en parler sans donner des exemples précis ne reflète pas la réalité.

 

Voici donc quelques échantillons de messages haineux reçus par des députées québécoises : « Si j’étais ton fils ou ta fille, j’aurais honte de ma mère.» «Osti de plotte sale criminelle et corrompue.» «Minable prostituée du crime organisé, va te faire enculer crisse de salope.» «Heille la nunuche, allez-vous rhabiller ou suicidez-vous.»

 

La liste pourrait s’allonger, mais je crois que ces quelques exemples devraient suffire à démontrer jusqu’à quel point des gens peuvent faire preuve de bassesse.

 

Sous le sceau de l’anonymat

Évidemment, ces braves gens n’osent pas signer leurs noms au bas de ces insultes. Tapi dans leur sous-sol ou ailleurs dans leur logement, ils lancent leurs insultes en prenant bien soin de n’être pas identifiés. Quelle bravoure ! Quel courage !

 

Cette bande de machos misogynes se permettent ainsi d’attaquer des femmes qui ont choisi de faire de la politique. Ces lâches, qui n’ont pas le courage de s’impliquer en politique ou de se présenter eux-mêmes, préfèrent s’en prendre à des femmes uniquement parce que ce sont des femmes.

 

Ils semblent oublier que s’ils sont sur la terre présentement, ils le doivent à une femme, leur mère dont ils sont issus. Si cette mère était en mesure de lire de tels propos et apprenait qu’ils ont été émis par son fils, j’imagine qu’elle ne serait pas très fière de son rejeton.

 

Les femmes représentent 52 % de la population mondiale. N’est-ce pas normal que certaines d’entre elles aient le goût de s’impliquer en politique pour faire valoir leurs points de vue, apporter une vision différente de celles des hommes qui dominent la classe politique depuis des siècles ? Au lieu de leur faire la vie dure, on devrait leur ouvrir les portes et se réjouir de leur venue en politique.

 

Mais, quand on est soi-même faible et que l’on manque de courage pour afficher à visage découvert ses opinions, il n’est pas surprenant de voir ces «braves» se cacher pour se livrer à de la cyberintimidation.

 

Il y a 30 ans

Le vendredi 6 décembre prochain marquera le 30e anniversaire de la tuerie survenue à l’école Polytechnique de Montréal, là où on forme des ingénieurs.

 

Il y a effectivement 30 ans, Marc Lépine, un frustré qui en voulait aux femmes, s’est présenté à la Polytechnique solidement armé et a choisi de tirer sur des femmes. Il en a tué 14, en plus d’en blesser plusieurs autres.

 

Ces femmes, Lépine n’en connaissait aucune et aucune d’entre elles ne lui avait causé un tort quelconque, ne s’était attaqué à lui d’une façon ou d’une autre. En fait, elles ne le connaissaient ni d’Adam, ni d’Ève.

 

Leur seul tort était d’être des femmes. Pensez-y une seconde, 14 brillantes femmes dans la vingtaine qui se préparaient à devenir ingénieure et à faire bénéficier notre société de leurs talents et de leur intelligence ont perdu la vie parce qu’un malade en voulait aux femmes.

 

Ces innocentes victimes, ça aurait pu être votre sœur, votre blonde, votre fille, une amie. Que l’on choisisse de se remémorer ce drame au moins une fois par année, c’est un devoir de souvenir comme nous le faisons le 11 novembre de chaque année pour se souvenir des soldats tombés lors des conflits armés.

 

Ce n’est pas nouveau 

Malheureusement, ce non-respect à l’égard des femmes n’est pas un phénomène nouveau. Dans toutes les civilisations, les femmes n’ont jamais eu droit au respect qu’elles méritent.

 

Dans la plupart des sociétés, les femmes ont presque toujours été considérées comme des êtres inférieurs. Les religions ne nous ont pas donné de très bons exemples dans ce domaine, traitant généralement les femmes comme de simples servantes, réduites à des rôles effacés.

 

Rappelons que la religion catholique refuse toujours d’accueillir des femmes à la prêtrise, même si l’on fait face à un important manque de relève. Dans les mosquées islamiques, les femmes ne peuvent prendre place dans la même salle que les hommes ; elles sont cachées du regard des hommes.

 

À un moment donné, et cela plus tôt que tard, les hommes vont devoir reconnaître que les femmes sont nos égales et qu’elles sont à même de prendre leur place au sein de notre société. Se priver de cet apport revient à se priver d’importants talents.

 

Aujourd’hui, dans plusieurs facultés universitaires, les femmes sont aussi nombreuses, voire parfois plus nombreuses que les hommes. C’est notamment le cas en médecine au Québec. Est-ce que les machos refuseront de se faire soigner par une femme médecin ?

 

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