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LE PONT FERROVIAIRE DE LA RIVIÈRE ALLAGASH EN 1926

durée 06h00
15 mars 2020
duréeTemps de lecture 155 minutes
Par
Pierre Morin

LA SOCIÉTÉ HISTORIQUE SARTIGAN

Dans les années '20, '30 et '40 au siècle dernier, Édouard Lacroix fut le plus grand entrepreneur forestier non seulement du Québec mais aussi de tout le nord-est des États-Unis. Il a laissé une marque indélébile au chapitre du travail forestier dans l'histoire du Québec et de la Nouvelle-Angleterre. Il fut surnommé par les américains du Maine le «King» Lacroix. En 1925, il décrocha l'un des plus importants contrats de sa carrière: fournir annuellement à la compagnie Great Northern pendant cinq ans 125,000 cordes de bois de pulpe pour alimenter leur moulin de Millinocket. Le problème: Ces billots devaient être pris dans l'immense forêt des Allagash, territoire éloigné, isolé et pratiquement inaccessible, dans l'une des pires régions du Maine. En plus, il devait notamment traverser des rivières dans un terrain hostile et accidenté. Les proches d'Édouard étaient fortement en désaccord avec ce marché, le qualifiant de véritable casse-cou. Imperturbable dans sa décision, Lacroix entreprit la construction d'une route de 44 miles dans ce territoire hostile. À l'automne 1925, la coupe du bois en vue de frayer un chemin pour la voie ferrée est amorcée. 125 hommes y travaillèrent. On doit passer à travers les cours d'eau et contourner les montagnes. Le plus gros défi: la construction d'un tréteau permettant la traversée du lac Chamberlain dans le secteur de la rivière Allagash. En réalité, c'était un pont ferroviaire sur chevalets qui devait être assez solide pour permettre le passage d'un train chargé de billots. Dix pieds au-dessus de l'eau, il s'allongeait sur une longueur de 1800 pieds, appuyé sur cinq digues de 20 pieds de portée, dont la structure se terminait par une inclinaison de 10 pieds. Ce sont les ruines, alors qu'elles étaient encore debout, que l'on voit à la 1re photo, prise quelques années plus tard. Il en restait encore quelques vestiges en 2014, comme on le voit à la 2e photo. On le considère encore aujourd'hui comme un chef d'oeuvre de création technique dans les forêts inaccessibles du Maine. Ce chemin comprenait entre autres une voie ferrée d'une longueur de 13 miles (on augmenta à 500 le nombre d'hommes ayant travaillé à sa construction) à travers forêts et marécages, entre les lacs Eagle et Umbazooskus, sur laquelle circulèrent jour et nuit pendant 6 ans des trains de 12 wagons chargés de bois, tirés par deux locomotives qui, à la fin de ce chantier gigantesque, furent simplement abandonnées non loin du lac Eagle, étant rendues obsolètes et trop usagées pour être démantelées. Cette aventure extraordinaire fut un succès sur toute la ligne: des millions de pieds de bois en billots et de bois de pulpe furent récoltés et transportés à destination entre 1927 et 1933. Cet exploit permit de devancer de quatorze ans l'échéancier prévu pour la coupe de bois dans cette région. Il ne reste hélas plus grand chose de ce pont historique qui est devenu inopérant après 1933, mais heureusement, les deux locomotives utilisées sont encore là, de véritables fantômes abandonnés dans un coin reculé des forêts du Maine (photo 3). Et on peut voir dans trois musées du Maine (Augusta, Bradley et Patten) de lourds Log Haulers rénovés qui ont été utilisés par les ouvriers d'Édouard Lacroix dans les chantiers de cette époque (photo 4 et 5). Une histoire surprenante mais vraie.


Photos 1 et 4 du fonds Édouard Lacroix. Photo 2 et 5 de Jean Lacroix. Texte, recherches et photo 3 de Pierre Morin.


 Fondée en 1992, la Société Historique Sartigan est un organisme à but non-lucratif,
financé par les dons, dont la mission est la protection, l'interprétation, la valorisation
et la diffusion du patrimoine de Saint-Georges et de ses environs.

 


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commentairesCommentaires

1

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  • JPD
    Jean-Pierre Drouin
    temps Il y a 4 ans
    J’ai eut la chance de visiter ce lieu très impressionnant c’est une belle page de l’histoire d’un grand entrepreneur Beauceron