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Le pont de bois, arraché par la débâcle en 1896

durée 04h00
6 décembre 2020
duréeTemps de lecture 180 minutes
Par
Pierre Morin

LA SOCIÉTÉ HISTORIQUE SARTIGAN

La plupart savent qu'on a eu un pont de bois pendant 30 ans au-dessus de la rivière au centre-ville au tournant des années 1900, mais certains seront peut-être surpris d'apprendre que ce pont fut déjà emporté par les glaces. Construit en 1881, il était à l'origine un pont couvert. Au début, le vent très fort qui soufflait arrachait continuellement les planches le recouvrant. Après une couple d'années, son propriétaire David Roy s'est lassé de les remettre et a choisi de ne laisser que la structure sans autre recouvrement (comme on le voit à la 1re photo). Cela régla ce problème, mais ce beau pont de bois devait affronter à chaque année un autre adversaire, encore plus redoutable: la débâcle printanière. Celle de 1896 fut particulièrement violente, la pire de notre histoire. Le pont de bois fut arraché. Mais d'abord, examinons la 1re photo, nous montrant les lieux vers 1907 alors que le pont était en place, pour que les lecteurs puissent constater à quel endroit précis aboutissait ce fameux pont du côté Est. Puis le 2e photo (de 1896), où on voit le côté Ouest au pire moment de la débâcle, alors que les glaces sont à leur plus haut niveau et que le pont est disparu; la descente pour aller au pont passait juste à côté de la bâtisse carrée blanche à deux étages sur la rive ouest (elle avait en réalité quatre étages, mais les deux niveaux inférieurs sont immergés sous les glaces). Puis d'autres photos d'époque prises en 1896 nous montrant de quoi avait l'air le panorama dans l'Est sans l'image habituelle du pont. La photo 3 nous offre une vue d'ensemble sur toute la ville de l'Est dans les jours suivants la destruction du pont de David Roy. On y voit sur la rive de l'ouest, en avant-plan, des gens regardant, impuissants, la rivière encore gonflée au lendemain de cette catastrophe, se demandant probablement comment ils allaient désormais se rendre sur l'autre rive. Une situation désespérante, le pont n'étant plus là. La 4e photo nous fait voir une scène moins étendue des mêmes lieux. On peut y reconnaitre l'endroit exact où passait le pont de David Roy avant sa destruction, même site où il fut reconstruit l'année suivante. Le pont arrivait à droite de la grosse maison blanche à 4 lucarnes (qui appartenait au marchand Ephrem Poulin). Il aboutissait entre cette bâtisse et la maison carrée à sa droite, celle au toit plat, qui appartenait au propriétaire de pont David Roy (elle existe encore, appartenant au notaire Benoit Maheux) et où les utilisateurs du pont devaient payer le coût du passage à chaque fois: une cenne pour les piétons et 3 pour les voitures à cheval. Dans les jours suivant, le niveau de la rivière diminua considérablement, pour retrouver sa taille normale; on pouvait alors apercevoir les ruines de ce qui restait du pont (photo 5). Les géorgiens durent se passer de pont pendant tout le reste de l'année 1896 et une partie de l'année 1897. Une période de plus d'un an sans pont, les gens devant utiliser des chaloupes en été et traverser sur la glace en hiver. Malgré ces calamités, le pont fut reconstruit, les gens ont réparé les dégâts causés aux bâtiments de la 1re avenue et la vie a repris son cours normal. C'est la seule fois où ce pont de bois fut emporté par la débâcle. Incroyable que nos ancêtres aient dû endurer ces crues printanières à répétition avec tous les inconvénients que cela engendre, sans oublier qu'à l'époque, les sinistrés ne recevaient aucune aide gouvernementale. Heureusement, avec le pont en acier et béton actuel, il y a peu de risque qu'une telle catastrophe ne se reproduise un jour. Merci à tous les concitoyens qui ont conservé ces photos extraordinaires, qui ont abouti à la Société Historique Sartigan, c'est grâce à eux que nous pouvons aujourd'hui visualiser ces événements marquants de notre histoire.

Photos 1, 2 et 3 du fonds Claude Loubier. Photo 4 du fonds Réjean Giasson. Texte et recherches de Pierre Morin.


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