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Contrairement aux autres usines de l'époque qui conservaient toutes leur nom anglais, on a toujours nommé celle-ci «la manufacture de talons». On fonda d'abord la manufacture «St-George Shoe Co Ltd» en 1932 (photo 1), mais on réalisa rapidement que c'était un problème de se procurer les multiples genres de talons pour les souliers des dames, difficultés d'approvisionnement et de modèles, changements fréquents de mode, délais de livraisons etc. On démarra donc la même année un atelier de fabrication de talons qui a connu des débuts modestes, à l'étage inférieur d'un grand garage situé au coin de la 118e rue et de la 2e avenue, qu'on voit à la 2e photo.
Souvenez-vous que ces deux usines, quoique complémentaires, n'étaient pas situées dans le même immeuble. La manufacture de souliers St-Georges Shoe était située dans un édifice de trois étages au coin de la 120e rue et de la 2e avenue, celle qu'on voit à la première photo, dont le nom est écrit sur le toit de l'immeuble.
L'usine de talons, dont le nom anglais était Beauce Heels Co Ltd, s'est développée assez rapidement. C'était un domaine tout-à-fait nouveau et on dut apprendre à la dure la façon de s'y prendre pour fabriquer ces pièces si petites mais en même temps si importantes. Mais les ingénieux artisans et ouvriers y arrivèrent vite. La production s'accrut rapidement, si bien qu'on dut ériger en 1938 un édifice pour loger la quarantaine de personnes (hommes et quelques femmes) y travaillant, au coin de la 118e rue et du boulevard Lacroix (photo 3, en 1943). Même usine et même année pour la 4e photo, mais vue de l'arrière, pour montrer les cages de bois devant être utilisé pour confectionner les talons. Cette industrie constituait un excellent débouché pour les cultivateurs car elle consommait de quatre à cinq mille pieds de bois par année.
La fabrication d'un seul talon pour les souliers de dames nécessitait une quinzaine d'opérations. C'était un travail méticuleux et seuls les bottiers compétents pouvaient s'y livrer avec succès. Au cours des années '40, la manufacture de talons de Saint-Georges a réalisé des performances exceptionnelles, alimentant d'autres fabricants de chaussures ailleurs au Québec et même des autres provinces. Elle fabriquait alors deux millions de paires de talons par année.
Au cours des années '50, l'importation de talons de plastique entraina une importante diminution des affaires de notre usine de talons, si bien qu'on abandonna finalement ce domaine. Un incendie a lourdement endommagé l'édifice vers 1958, voyez une photo à la même époque (photo 5). Cet immeuble a donc été d'abord la manufacture de talons (de 1938 à 1958). On l'a agrandie et le transformée en 1959 pour y loger la manufacture de chaussures (photo 6).
J'ai réussi à trouver une photo de 1951 nous montrant les ouvriers et ouvrières au travail, tant pour les talons que pour les chaussures (photo 7).
Aujourd'hui, il n'existe plus beaucoup de fabricants de chaussures dans notre pays. Bizarre qu'après avoir connu tant de succès, cette industrie soit tombée en désuétude, c'est ce qu'on appelle la mondialisation, les compagnies sont mobiles et vont s'établir là où la main d'oeuvre leur coûte le moins cher, souvent dans les pays asiatiques. Heureusement, il y aurait encore neuf fabricants au Québec, des firmes très spécialisées.
Photos 1, 2, 3, 4, 5 et 6 du fonds Claude Loubier. Recherches de Pierre Morin et Paulin Poirier. Texte de Pierre Morin.
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