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LETTRE OUVERTE | « L’austérité : une fausse bonne idée »

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30 avril 2015
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Julio Trepanier
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Par Julio Trepanier, Journaliste multimédia

Le 9 avril dernier, à la suite d’un un vote de grève au Cégep Beauce-Appalaches pour dénoncer les politiques d’austérité du gouvernement libéral, s’étant conclu à 53 % contre et 45 % pour (2 % abstention), plusieurs enseignant (e)s ont mis en place un comité de mobilisation contre l’austérité.

L’objectif d’un tel regroupement, qui demeure respectueux du choix de l’assemblée syndicale, est d’informer la population quant à ces politiques de rigueur budgétaires, tout en sensibilisant celle-ci aux impacts de ces choix politiques.

À ce titre, Philippe Racette, enseignant d’Histoire au Cégep Beauce-Appalaches, a rédigé cette lettre ouverte intitulée « L’austérité : une fausse bonne idée ». Celle-ci est cosignée par 42 enseignants (voir liste en fin de texte). Voici la lettre intégrale :

« L’austérité : une fausse bonne idée »

Le gouvernement libéral, de manière paternaliste et démagogique, nous dit que l’austérité est nécessaire pour la prospérité du Québec. On nous bombarde toujours des mêmes arguments : l’affreuse dette accumulée par les gouvernements successifs, l’omniprésence de l’État « gouvernemaman », les fonctionnaires trop nombreux qui ne servent à rien, les impôts trop lourds, le manque de productivité des Québécois. De manière lente, patiente, une partie de la classe politique a convaincu la population qu’elle vivait au-dessus de ses moyens « Pensez donc aux enfants! » nous disent ces politiciens. Le raisonnement est simpliste et insultant.

L’État n’est pas parfait; il est sain de réévaluer la pertinence des programmes et de s’assurer de leur efficacité, mais les mesures d’austérité prises par le gouvernement libéral mettent en danger la capacité de l’État de défendre les intérêts des Québécois. Contrairement à la saine gestion, l’austérité est une mesure radicale de réduction des dépenses publiques et de hausse de tarifs dans un contexte de crise. Or, le Québec n’est pas en crise. Le déficit représente 1,08 % du PIB (2014-2015), et bien qu’il soit important de le résorber, rien ne justifie la vitesse à laquelle le gouvernement s’y attaque ni les coupes aveugles qu’il pratique. Si la question de la dette est préoccupante, et sa gestion doit être surveillée de près, elle est toutefois stable depuis près de 20 ans (ratio de 57,7 % du PIB en 2000-2001 / 54,9 % du PIB en 2014-2015) selon le ministère des Finances du Québec. Par ailleurs, il est à noter que 85 % de la dette québécoise est détenue par… les Québécois (à travers les fonds de pension, les banques, les compagnies d’assurance, la Caisse de dépôt). Nous devons donc cet argent à nous-mêmes!

L’austérité n’a rien d’une idée neuve (elle fut appliquée de manière catastrophique dès la crise économique des années 1930) et a maintes fois prouvé son inefficacité. En fait, toutes les recherches sérieuses sont claires : l’austérité ne fonctionne pas (même le Fonds monétaire international appelle les pays à modérer les politiques de rigueur budgétaire). Pire, elle aggrave la situation des pays qui l’appliquent en ralentissant la reprise économique et, ce faisant, augmente le chômage, diminue les revenus fiscaux des gouvernements et accroit les inégalités. Les exemples sont nombreux et sans équivoque. Pourtant, malgré ses insuccès, elle s’impose en Occident depuis la révolution conservatrice de Reagan aux États-Unis, de Thatcher au Royaume-Uni et de Mulroney au Canada durant les années 1980. Devant les déficits et l’endettement, « There is no alternative! » disait la dame de fer. Il faut couper. Comme un zombie, cette fausse bonne idée ne veut pas mourir. Pourquoi? C’est que l’austérité est plus qu’une mesure économique, c’est un projet politique qui vise à restructurer de manière profonde et durable les institutions collectives issues de la Révolution tranquille. Essentiellement, elle vise à réduire la place de l’État, sa capacité d’action comme moteur économique, politique et social, par la dérèglementation, la réduction des services et les baisses d’impôts pour soulager les « créateurs d’emplois ». Le privé prendra ainsi la relève et par le miracle de la théorie du ruissellement (« Trickle Down Economics »), l’enrichissement des riches profitera à l’ensemble par le réinvestissement productif. Vraiment?

Le projet néolibéral dont l’austérité fait partie, et dans lequel l’État joue un rôle minimal, n’est profitable qu’à ceux qui se situent tout en haut de l’échelle socioéconomique. Depuis 1982, le revenu après impôts du 1 % des plus riches a augmenté de 86 % au Québec alors que celui de 99 % des Québécois a monté de 12 %. Si on ne tient pas compte des impôts et des transferts, la situation est catastrophique : augmentation de 271 % pour le 1 % et diminution de 2 % pour le 99 % selon les données de Statistique Canada compilées par l’IRIS. Le rôle essentiel que joue l’État en matière de redistribution de la richesse collective est sans équivoque. Dans ce contexte, atteindre le déficit zéro coûte que coûte n’est pas un projet de société, mais de l’aveuglement volontaire de la part de politiciens déconnectés qui ne seront jamais touchés par les conséquences de ce qu’ils mettent en place. Les plus riches s’en sortent toujours bien (ils ont de bons abris fiscaux), les politiciens aussi. Ils ne payent jamais la facture.

L’accessibilité aux services publics, sans parler de leur qualité, est en danger. Les hausses de tarifs (hydroélectricité, immatriculation, impôts fonciers, garderies, etc.) appauvrissent tout le monde. La classe moyenne, que le gouvernement dit vouloir défendre, paye le prix fort de l’austérité. Les plus démunis, qu’en tant que société avancée nous sommes censés protéger, sont dans une situation tout aussi précaire. Les politiques d’austérité engendrent un recul pour les femmes. Elles occupent majoritairement des emplois dans les services publics, qui sont particulièrement touchés par les compressions. La fermeture des CLD, des CRÉ, les coupures dans les CJE et la remise en question des commissions scolaires sont autant de façons inefficaces et arbitraires de « rationaliser » les dépenses qui auront des conséquences néfastes sur les régions : les décisions centralisées à Québec et à Montréal peuvent difficilement répondre aux besoins concrets de la population éloignée des grands centres.

L’austérité ne touche pas seulement les autres. Elle touche notre mère, notre enseignante, notre cousin, notre infirmière, notre éducatrice, notre plombier, notre contremaître, notre soudeur. Il existe des solutions qui visent le retour à l’équilibre budgétaire et le maintien du rôle social de l’État. Elles sont connues et concrètes, mais le gouvernement refuse de les appliquer, trop occupé à mettre en place son idéologie visant à transformer l’État : par exemple, revoir la fiscalité des grandes entreprises qui bénéficient de larges subventions, ajouter des paliers d’impôt pour les riches particuliers, imposer une taxe sur le capital des banques et des grandes entreprises (si elles peuvent se permettre de verser des bonis, primes et salaires exorbitants à leurs dirigeants, elles peuvent contribuer davantage aux coffres de l’État), investir dans les PME, véritable moteur du développement économique régional. Il faut expliquer aux politiciens que nous voulons un Québec prospère, bien administré et qui recherche l’équilibre budgétaire dans le respect de tous les citoyens et non au profit d’une minorité qui s’en sort déjà très bien. Ça, c’est une vraie bonne idée!

Signataires :

Philippe Racette, enseignant en Sciences humaines

Caroline Desjardins, enseignante en Arts et lettres

Myriam Dulude, enseignante en Langues

Sarah Bernard, enseignante en Arts et lettres

Denis Poulin, enseignant en Langues

Jean-Marc Labbé, enseignant en Techniques de l’informatique

Marie-Hélène Lebel, enseignante en Arts et lettres

Annie Champagne, enseignante en Techniques d’éducation à l’enfance

Steeve Gagné, enseignant en Éducation physique

Lisa Blais, enseignante en Langues

Marcelle Fontaine, enseignante en Arts et lettres

Marie-Claude Bolduc, enseignante en Arts et lettres

Robert Arcand, enseignant en Sciences humaines

Brigit Bourque, enseignante en Sciences humaines

Maddy Lacroix, enseignant en Arts et lettres

Marie-Esther Poulin, enseignante en Arts et lettres

Thérèse Morin, enseignante en Techniques d’éducation spécialisée

Linda Deblois, enseignante en Arts et lettres

Geneviève Guérin, enseignante en Arts et lettres

Vicky Vallerand, enseignante en Sciences humaines

Ida Rivard, enseignante en Techniques d’éducation spécialisée

Véronique Pouliot, enseignante en Éducation physique

Paul-André Bernard, enseignant en Arts et lettres

Yves Bizier, enseignant en Arts et lettres

Isabelle Cadoret, enseignante en Arts et lettres

Suzanne Houde, enseignante en Techniques d’éducation spécialisée

Jean-Sébastien Garceau, enseignant en Philosophie

Simon Poulin, enseignant en Arts et lettres

Michel Huot, enseignant en Sciences humaines

Renée-Claude Bilodeau, enseignante en Techniques d’éducation à l’enfance

Paul Rheault, enseignant en Philosophie

Étienne Groleau, enseignant en Philosophie

Julie Labonté, enseignante en Techniques d’éducation à l’enfance

Marie-Claude Poirier, enseignante en Techniques d’éducation à l’enfance

Alain Gilbert, enseignant en Langues

Jean-François Bossé, enseignant en Sciences humaines

Christine Hamel, enseignante en Arts et lettres

Mariane Demers, enseignante en Arts et lettres

Jacinthe Duchesne, enseignante en Arts et lettres

Marcel Cloutier, enseignant en Sciences humaines

Denis Tanguay, enseignant en Sciences de la nature

Nancy Lagueux, enseignante en Langues

Claire Blouin, enseignante en Mathématique

 

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