Les producteurs de lait se mobilisent contre le lait diafiltré
Les Producteurs de lait de Chaudière-Appalaches ont réclamé au gouvernement fédéral qu’il règle rapidement et définitivement le problème des importations de lait diafiltré lors d’un point de presse hier à la fromagerie la Pépite d’or.
Cette problématique vient du fait que le lait diafiltré provenant des États-Unis est considéré comme un ingrédient laitier lorsqu’il traverse la frontière, ce qui fait en sorte qu’aucun tarif n’est demandé à la compagnie exportatrice tandis que l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) le considère comme du lait. Ce faisant, son utilisation pour remplacer le lait dans la fabrication de fromage n’est pas contrôlée.
Le gouvernement a formellement reconnu l’existence du problème. En effet, La Terre de chez nous rapportait le 5 février dernier le contenu d’un courriel du bureau du ministre de l’Agriculture Lawrence MacAulay : « Nous sommes conscients des préoccupations de l’industrie concernant l’utilisation du lait diafiltré dans la fabrication du fromage. Selon les normes compositionnelles du fromage, il n’a jamais été dans les intentions que le lait diafiltré soit utilisé au lieu du lait. Nous travaillons afin d’assurer que les règles sont claires pour tous. Le Canada reconnaît l’importance de mesures de contrôle efficaces des importations et gère ses importations conformément à ses obligations en matière de commerce international. » Cette même déclaration avait été faite deux jours plus tôt lors d’une allocution du ministre devant les délégués des Producteurs laitiers du Canada. Malgré ces engagements répétés, aucune mesure concrète n’a encore été annoncée par le gouvernement deux mois plus tard.
« Cette brèche, si elle n’est pas colmatée, menace clairement la pérennité de notre politique agricole canadienne pour le secteur laitier. Le problème est connu des autorités gouvernementales depuis au moins deux ans, mais n’est toujours pas réglé. La solution au problème des importations de lait diafiltré est politique. Le gouvernement libéral a montré, dans plusieurs dossiers, qu’il est capable d’agir rapidement. Il faut qu’il règle ce problème rapidement et une fois pour toutes », a affirmé le président des Producteurs de lait de Chaudière-Appalaches-Sud, Bruno Cyr.
De son côté, le copropriétaire de la fromagerie la Pépite d'or, Bertrand Boutin, explique que son entreprise ne peut être compétitive comparativement aux autres transformateurs de produits laitiers. « L'arrivée du lait diafiltré nous a beaucoup nui. Il a fait baisser les coûts de production, mais pas ceux à l'achat », a-t-il mentionné en ajoutant qu'il y a une différence de prix d'environ 15 à 18 % entre ses produits et les autres. « Nous voulons offrir des produits authentiques faits avec du lait entier provenant uniquement de la région et c'est ce que nous faisons depuis plus de 20 ans », a-t-il renchéri.
Puis, le producteur de lait Renaud Lachance a pris la parole afin d'illustrer les conséquences de l'importation du lait diafiltré. « Je possède une ferme de 225 vaches et je produis en moyenne 7 500 litres de lait par jour. En ce moment, je perds des milliers de dollars par mois, soit entre 70 000 et 75 000 $. Je n'ai jamais vu des pertes comme ça. C'est pire que l'époque où il n'y avait pas de gestion de l'offre. Le gouvernement doit avoir un meilleur contrôle de ses importations de protéines laitières. On jette celles que les producteurs canadiens font, mais on importe celles des Américains », dénonce M. Lachance.
En effet, l’importation des produits laitiers au Canada est limitée par des tarifs douaniers, un contrôle essentiel au bon fonctionnement de la gestion de l’offre, le moyen par lequel les producteurs de lait établissent le meilleur équilibre possible entre l’offre et la demande de leurs produits et qui leur permet de tirer leur revenu entièrement du marché, sans subventions.
Or, depuis la fin des années 90, des ingrédients laitiers entrent au pays sans tarifs en utilisant des failles du classement tarifaire pour contourner les limites d’importation. Le cas actuel le plus grave est celui des isolats de protéines laitières (IPL) et du lait diafiltré, des concentrés de protéines laitières qui remplacent de plus en plus la protéine du lait frais canadien dans la fabrication de certains produits laitiers. L’Union des producteurs agricoles (UPA) estime que les importations d’IPL ont atteint 32 000 tonnes en 2015, causant un manque à gagner de plus de 200 millions de dollars aux producteurs.
« Ces produits sont choisis pour l’importation puisqu’ils permettent à la fois d’éviter les tarifs douaniers et, par manque de cohérence entre l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et l’ACIA, ils permettent aussi d’éviter la limite d’utilisation prévue par les normes de composition des fromages au Canada », a insisté M. Cyr.
Rappelons qu’en 2007, afin de limiter les dommages liés à l’importation de concentrés de protéines laitières et à la suite d’une grande mobilisation des producteurs laitiers, le gouvernement a mis en place des normes de composition des fromages. Ces normes établissent un pourcentage minimum de protéines (caséines) qui doivent provenir du lait dans le fromage et limitent l’ajout d’ingrédients laitiers tels que les IPL pour compléter la recette de fabrication. Le problème semblait ainsi réglé jusqu’à l’arrivée du lait diafiltré, en 2013.
4 commentaires
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Dernière opinion
Aurevoir, Pierre et surtout si tu n'aime pas les Américains et, ou leurs produits ne te sers pas de leurs langue écrites ou parlé. Comme plusieurs peuvent le constater lorsque l'on émet une opinion sur l'agriculture ,vous finissez toujours avec votre fameuse histoire de marde. De ce que l'on sache de la marde Américaine ,elle est et sera manger par plusieurs agriculteurs ,lorsque venu la vente de leurs fermes et l'achat d'un beau condo en Floride .Donc Pierre bonne retraite et surtout bonne santé.
Par ailleurs, ces programmes existent tout simplement pour assurer que l'agriculture québécoise, qui représente des dizaines de milliers d'emplois, ne tombe pas par terre en raison d'une mauvaise année de récoltes.