Qu'adviendra-t-il de nos églises?
Pier Dutil
QU’ADVIENDRA-T-IL DE NOS ÉGLISES?
À quelques jours de la célébration de Noël, j’ai ressenti un petit regain de ferveur religieuse et j’ai décidé d’y consacrer une chronique. Et pour bien m’y préparer, j’ai eu une très intéressante rencontre avec le Curé des paroisses St-Georges-de-Sartigan et St-Jean-Paul II, l’abbé Alain Pouliot.
Depuis des années, je suis bien conscient que, dans l’esprit des humains, la fête de Noël a perdu quelque peu son sens religieux pour devenir une grande foire commerciale. Mais, malgré cela, si cette belle histoire dure depuis plus de 2 000 ans, il y a sans aucun doute un certain fondement remontant aux origines de cette fête qui continue de nous animer.
LA STRUCTURE ORGANISATIONNELLE
Les célébrations de Noël 2021 dans notre région doivent s’accommoder de la structure organisationnelle de nos paroisses. Certains me diront que je suis peut-être un peu trop terre à terre, mais il y a des réalités que nous ne pouvons ignorer.
À cause du manque de prêtres, qui se fait de plus en plus criant, on a dû revoir l’organisation des paroisses. Dans notre région immédiate, à compter de l’automne 2022, l’équipe pastorale actuelle sera en service pour trois grandes paroisses qui regroupent 27 communautés.
La paroisse St-Georges-de-Sartigan compte 12 communautés : St-Georges, l’Assomption, St-Jean-de-la-Lande, Notre-Dame-des-Pins, St-Simon-les-Mines, St-Philibert, St-Côme Linière, St-Benjamin, St-Prosper, Ste-Aurélie, St-Zacharie et St-René.
Une deuxième paroisse, St-Jean-Paul II, regroupe les cinq communautés de St-Théophile, St-Gédéon, St-Martin, St-Robert-Bellarmin et St-Ludger.
Enfin, au sein de la paroisse Notre-Dame-des Amériques, on retrouve dix communautés : St-Benoît-Labre, St-Éphrem, St-Honoré-de-Shenley, St-Hilaire-de-Dorset, La Guadeloupe, St-Évariste-de-Forsyth, Courcelles, St-Samuel du Lac Drolet, St-Vital de Lambton et St-Sébastien.
UNE TOUTE PETITE ÉQUIPE
Pour offrir les services religieux et de pastorale à la population de ces paroisses, on compte sur une équipe de quatre prêtres (un curé, deux vicaires et un prêtre collaborateur régulier), un diacre permanent missionnaire en provenance d’Amérique du Sud, un stagiaire (un prêtre en devenir), un autre diacre permanent, deux agents de pastorale laïcs et cinq personnes intervenantes, personnel autour duquel se greffent des bénévoles.
On comprend rapidement pourquoi il n’y a pas de messes tous les samedis et tous les dimanches dans chaque communauté. On n’a pas encore trouvé le moyen de cloner des prêtres et, à mesure que les prêtres vieillissants prennent leur retraite, la relève ne suffit pas à combler les postes vacants. La pénurie de personnel ne frappe pas que les entreprises.
DES FINANCES FRAGILES
Avec un taux de pratique autour de 7 à 8 %, les entrées d’argent se font de plus en plus rares. Il peut paraître déplacé de parler argent en même temps que religion, mais il faut tout de même payer le personnel et voir à l’entretien, au chauffage et à l’éclairage des églises et des presbytères.
La grande majorité des revenus provient encore de la CVA, soit les deux-tiers. Le reste provient des messes et des célébrations, des locations de locaux, etc. D’année en année, les états financiers des paroisses se soldent par des déficits, lesquels sont comblés par certains fonds de réserve. Mais ces fonds de réserve ne sont pas des puits sans fond dans lequel on pourra piger éternellement.
Pour vous donner une idée de l’ampleur des montants concernés, le budget 2021 de la paroisse St-Georges-de-Sartigan prévoyait des revenus de 1 161 780 $ et des dépenses de 1 255 141, ce qui laisserait un déficit de 93 361 $.
LA RESPONSABILITÉ DES COMMUNAUTÉS
Après avoir tracé brièvement l’état de la situation, je me suis dit que cela ne pourrait durer durant des décennies et cela m’a amené à poser la question fatidique à l’abbé Pouliot : «Qu’adviendra-t-il de nos églises?»
Le Curé des paroisses concernées n’a pas tenté d’éviter la question et m’a répondu tout de go : «Je ne suis pas là pour fermer les églises. Je suis là pour garder les communautés vivantes et actives.»
Et l’abbé Pouliot de m’expliquer que la décision de fermer une église ou de vendre un presbytère ne relève pas du diocèse, mais bel et bien de la communauté chrétienne concernée.
Évidemment, si une communauté est en déficit année après année et que l’on ne parvient pas à amasser des revenus suffisants pour assurer le maintien des services et l’entretien des bâtiments, il faudra un jour ou l’autre en venir à une décision, aussi déchirante soit-elle. Mais cette décision, insiste l’abbé Pouliot, elle sera prise à la suite d’une consultation et d’une recommandation par les gens de la communauté.
Questionné à savoir si l’on croit être en mesure de conserver encore longtemps deux églises à St-Georges, l’abbé Pouliot est resté fidèle à lui-même en précisant que cela pourrait durer tant et aussi longtemps que les communautés de St-Georges et de l’Assomption décideront de maintenir ces deux églises en place et contribueront financièrement à leur survie.
REVENONS À L'ESPRIT DE NOËL
En choisissant de consacrer la majeure partie de cette chronique à la nouvelle structure organisationnelle de nos paroisses, à la pénurie de prêtres, à la faible pratique religieuse de nos paroissiens et à la situation financière précaire de nos communautés, je ne souhaitais pas vous détourner du sens de la belle fête de Noël.
Cette année, chaque communauté de notre région aura au moins une messe de Noël, soit le 24, soit le 25 décembre. Même si la pandémie limite à 250 la présence de personnes dans une église lors d’une messe, on constate toujours que plusieurs chrétiens qui ne fréquentent pas les églises sur une base régulière durant l’année aiment assister à une messe de Noël.
Ainsi, lorsque vous pénétrerez dans l’église de votre communauté à Noël, ayez une pensée pour celles et ceux qui multiplient les efforts pour assurer la survie de nos églises paroissiales, sans trop savoir combien de temps cela durera encore et demandez-vous quel rôle vous pourriez jouer pour conserver vivant nos lieux de culte, car, comme me le confiait l’abbé Pouliot en guise de conclusion : «Les communautés ont leur destin en main».
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MEILLEURS VOEUX
Contrairement à mon habitude, je choisis de remplacer ma pensée de la semaine par mes vœux à l’occasion de Noël et du Nouvel An.
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