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Le salaire de nos élus

durée 18h00
20 mars 2023
duréeTemps de lecture 4 minutes
Par
Pier Dutil

LE SALAIRE DE NOS ÉLUS

À intervalles réguliers, le salaire de nos élus québécois refait surface et donne lieu à des débats souvent partisans à l’Assemblée nationale. Trop payés, pas assez payés, la question fait également l’objet de nombreuses discussions au sein de la population.

Là où la question devient délicate, c’est que ce sont les Députés eux-mêmes qui doivent voter pour fixer leur rémunération. Cette façon de faire place tous les élus dans une situation qui ressemble drôlement à un conflit d’intérêts.

UN NOUVEAU COMITÉ

Récemment le Gouvernement du Québec a mis en place un comité chargé d’évaluer les salaires de nos élus et de faire des recommandations. Le comité en question est formé de trois membres : Lise Thériault, ex-Ministre libérale, Martin Ouellet, ex-Député péquiste et Jérôme Côté, un spécialiste en ressources humaines. Notez qu’il n’y a aucun représentant de la CAQ et de QS au sein du comité et aucun élu actuellement en fonction. Le comité devra déposer son rapport et ses recommandations le 11 avril prochain.

Il importe de mentionner qu’au cours des vingt dernières années, plusieurs comités se sont penchés sur la question et ont fait des recommandations, lesquelles, jusqu’à date, sont demeurées lettres mortes.

Le dernier comité date de 2013 et était présidé par l’ex-Juge de la Cour suprême du Canada, Claire L’Heureux-Dubé. Deux ans plus tard, en 2015, le Gouvernement de Philippe Couillard avait décidé de ne pas donner suite aux recommandations suggérées alors que les Libéraux au pouvoir prônaient l’austérité.

LA SITUATION AU QUÉBEC

Dans l’édition du 18 février dernier du Journal de Québec, le journaliste Patrick Bellerose traçait un tableau de la rémunération des élus québécois.

Présentement, un député québécois gagne 101 561 $, montant auquel s’ajoute une allocation de dépenses maximum de 19 052 $. Un Député peut toucher un montant supplémentaire variant entre 5 000 et 15 000 $ selon des responsabilités supplémentaires qu’on lui confie comme le fait de présider des commissions parlementaires ou autres. Un important fonds de pension s’ajoute à cette rémunération.

Pour sa part, le Premier Ministre touche un salaire de 208 200 $, alors que les Ministres reçoivent 177 732 $.

LA SITUATION À OTTAWA

À titre de comparaison, les Députés fédéraux reçoivent un salaire de 189 500 $ plus le remboursement de diverses dépenses reliées à leurs fonctions. Ils bénéficient également d’un certain nombre de billets d’avion gratuits pour leur permettre de voyager d’Ottawa vers leurs circonscriptions.

La rémunération du Premier Ministre canadien est de 379 000 $, alors que celle des Ministres se chiffre à 279 900 $. Comme au Québec, les élus fédéraux bénéficient d’un fonds de pension généreux.

EST-CE TROP OU PAS ASSEZ?

Il est facile de faire des gorges chaudes et de clamer que nos élus sont trop payés. Mais, avant de critiquer, il importe de considérer le travail que doit abattre un élu.

Une fois élu, un Député ne s’appartient plus. Il est en fonction sept jours sur sept, il doit se rendre à Québec, loin de sa famille,  pour participer aux travaux parlementaires qui se déroulent souvent tard le soir. À moins de résider à proximité de la Capitale nationale, il se doit de prendre un logement et d’assumer une foule de dépenses reliées au fait qu’il travaille à l’extérieur de son comté.

Et lorsqu’il ne siège pas à Québec, le Député doit faire du bureau dans son comté, recevoir ses électeurs qui font appel à ses services, se déplacer un peu partout dans le comté pour rencontrer des groupes ou des gens qui s’attendent à sa présence. En somme, c’est un travail exigeant. 

Tout cela sans compter que tous les élus, peu importe le parti auquel ils appartiennent, sont toujours l’objet de critiques souvent exagérées. On peut le constater dans les médias et surtout sur les réseaux sociaux où plusieurs élus et les membres de leurs familles font même l’objet de menaces personnelles.

Et, finalement, à tous les quatre ans, leur emploi est remis en question. Il n’est pas toujours facile de se trouver un nouvel emploi après un séjour en politique, ce qui ajoute à l’insécurité.

Mais quand quelqu’un décide de se lancer en politique, il se doit d’en connaître les exigences et les conditions.

Quant à savoir si les élus sont trop ou pas assez payés, il faut considérer ce qu’il en coûte vraiment pour attirer des candidatures intéressantes. Un professionnel qui gagne déjà plus de 100 000 $ par année à travailler cinq jours par semaine durant 40 heures, qui jouit de ses fins de semaines en famille et qui couche à la maison tous les soirs risque peu de se lancer en politique, à moins d’avoir la vocation ou la passion.

RÉGLER LE PROBLÈME

Au Québec, tel que mentionné en début de chronique, le principal problème concernant la rémunération des élus réside dans le fait que ce sont ces mêmes élus qui fixent leurs conditions.

À Ottawa, on a réglé ce problème en établissant des salaires établis en comparaison avec ce qui se paie dans le privé et, une fois cela établi, les salaires sont indexés automatiquement, sans que les élus aient à intervenir.

On devrait procéder de la même façon à Québec une fois que le comité mis en place dernièrement aura déposé son rapport en avril prochain. On aurait qu’à adopter la nouvelle rémunération proposée et, pour les années à venir, ajuster le tout avec l’inflation. 

Mais un problème risque de se dresser dans ce dossier, à savoir qu’en 2023, le Gouvernement du Québec est en négociation avec la plupart de ses employés pour renouveler les conventions collectives qui viennent à échéance le 31 mars prochain. 

Si les élus s’attribuent une augmentation de salaire supérieure à celle des employés de l’État, les syndicats ne manqueront pas l’occasion de monter aux barricades, cela même si les salaires des élus n’ont pas bougé depuis près de 20 ans.

Je suis conscient que la question ne sera probablement pas résolue cette année, mais, en fin de compte, je nous invite à ne pas oublier que, finalement, dans la vie, on en a toujours pour notre argent.

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PENSÉE DE LA SEMAINE

Je dédie la pensée de la semaine aux contribuables québécois :

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